les femmes et le travail
Le premier Congrès international d’histoire des entreprises aura lieu à Paris, du 11 au 13 septembre 2019. Quarante sessions sont organisées autour de trois grands axes : le rôle des entreprises dans l’émergence d’un capitalisme « à la française » ; les défis de la mondialisation et de la modernité ; écrire actuellement l’histoire des entreprises.
La conférence inaugurale « A quoi sert l’histoire des entreprises ? » sera présentée à la Sorbonne par les professeurs Liliane Hilaire-Perez (EHESS) et Matthias Kipping (université York de Toronto). Trois tables rondes auront lieu à l’ESCP Europe : « Les entreprises racontent-elles des histoires » (avec Corinne Lepage, ancienne ministre) ; « La fabrique de l’histoire des entreprises » ; « La place des femmes dans l’entreprise » (avec Nicole Notat et Danièle Fraboulet).
Retrouvez le programme détaillé sur le site du congrès, organisé par l’ENS, le CNRS, les universités Paris-Dauphine, Paris-Nanterre et Evry, l’Ecole Polytechnique, la BNF, le CNAM, etc., avec le soutien d’entreprises (Saint Gobain, BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole, Renault, etc).
Tribune. Les femmes ont toujours travaillé. Mais cela n’a pas toujours été visible, ni admis. Gourmandes en main-d’œuvre, les entreprises de la seconde révolution industrielle ont recouru au travail des femmes, le salariat le rendant visible. On se souvient des conditions de travail imposées aux femmes dans les mines, symbolisées par Catherine Maheu dans le Germinal, d’Emile Zola. La loi du 19 mai 1874 prohibe le travail au fond. Pourtant, l’apport du travail des femmes dans certaines professions, à certaines périodes ou encore comme complément salarial, est indispensable. Les femmes travaillent donc aussi dans les entreprises… Mais, comme se demande Danièle Fraboulet, professeure émérite d’histoire actuelle à Paris-XIII, dans ses travaux sur les organisations patronales, y ont-elles vraiment leur place ?
Si les femmes ont toujours exercé des activités débordant la sphère domestique – agriculture, industrie rurale à domicile, ateliers urbains –, l’essor de l’industrialisation et de l’urbanisation impose le travail des femmes dans les usines, minoritaires jusqu’en 1914. L’hostilité du mouvement ouvrier au travail des femmes reflète alors les représentations sociales du travail féminin, où sont exaltées les vertus féminines (modestie, habileté…), jugées souvent peu compatibles avec un travail salarié. Mobilisées pour l’effort de la première guerre mondiale dans les emplois les moins qualifiés, remplaçant les hommes partis au front, elles ont été priées de regagner leur foyer dès la fin du conflit, afin de repeupler le pays, de s’occuper des enfants, de reprendre leurs activités non payer. Il fallait limiter toute concurrence avec les hommes pour l’accès à l’emploi ou le niveau des rétributions.
Longue attente
Durant l’entre-deux-guerres, en liaison avec l’essor du secteur tertiaire qui suit celui de l’appareil productif, elles investissent certains emplois dans l’administration – les demoiselles des Postes – et dans les services généraux des entreprises, où elles occupent parfois des postes à responsabilité pour les plus diplômées, même si la majorité reste cantonnée aux emplois peu qualifiés. La crise des années 1930 stoppe ce mouvement.
Leur présence dans l’entreprise s’accentue avec la reconstruction. Le contexte social et politique évolue avec l’octroi du droit de vote en avril 1944 et la suppression en 1946 de la notion de « salaire féminin », inférieur à celui des hommes. Si au cours des « trente glorieuses » le travail des femmes croît fortement, les qualifications, les rémunérations, les perspectives de carrière sont toujours moindres que celles des hommes et leurs trajectoires professionnelles demeurent discontinues. Les politiques publiques oscillent entre mesures de soutien aux travailleuses et incitations à rester chez soi pour élever les enfants.