Les chaires de professeur junior, cette nouvelle voie de recrutement qui irrite certains universitaires
« Soutien à tous les déçus de la campagne de recrutement des maîtres de conférences [MCF]. » « C’est ma première campagne MCF et c’est déprimant. Je n’ai aucune audition. » « Je pense avoir plus de chances au casting de la Star Academy qu’à la campagne MCF. » Comme chaque année, en ce début du mois de mai, les réseaux sociaux bruissent de la déception des nombreux jeunes chercheurs qui se cassent les dents sur le concours de recrutement.
Mais cette année, leurs coups de gueule face à la pénurie de postes à l’université croisent des annonces qui suscitent leur intérêt autant qu’elles leur font parfois grincer des dents : « L’université recrute sur trois chaires de professeur junior », « Une opportunité unique : chaire de professeur·e junior en éthologie (…), un environnement scientifique exceptionnel, une ville ensoleillée, the job you want ! »
Une opportunité unique : Chaire de Professeur.e Junior en Ethologie 🦒🐠🦟🐁🦋 au #crca @CbiToulouse @UT3PaulSabatier à… https://t.co/YJaJTpxBxs
— clairerampon1 (@clairerampon)
Les candidatures pour la seconde vague de recrutement des nouvelles chaires de professeur junior (CPJ), créées par la loi de programmation pluriannuelle de la recherche de 2020, sont en effet lancées depuis peu. Le système, qui s’inspire des tenure tracks répandues aux Etats-Unis, permet aux titulaires d’un doctorat d’accéder directement à un poste de professeur des universités ou directeur de recherche, sans passer par la case « maître de conférences » – et le concours de recrutement qui va avec –, après trois à six ans de contrat de recherche avec des objectifs à atteindre.
Cent trente-cinq CPJ sont ouvertes cette année, dans la foulée des 92 annoncées fin 2021. Un démarrage relativement lent au regard de l’objectif de 300 chaires par an initialement fixé, et des 1 500 à 2000 maîtres de conférences et professeurs des universités recrutés annuellement. Mais il faut dire que deux ans après leur création, et alors même que le processus de sélection et de recrutement de la première vague n’est pas terminé, les débats sur cette nouvelle voie d’accès sont encore vifs au sein de la communauté universitaire. « Le sujet fâche. Ne citez pas mon nom s’il vous plaît, je vais me faire étriper par certains collègues », dit en souriant le directeur d’une grosse unité de recherche en droit, qui n’a pas osé demander de CPJ, mais qui estime à voix basse que ces contrats, adossés à une dotation élevée pour mener les recherches (200 000 euros en moyenne sur trois ans), peuvent constituer un « coup d’accélérateur énorme » pour un laboratoire. Cependant, ils viennent remettre en question « la symbolique du recrutement sur concours ».
« Pas d’argent magique »
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