Le « savoir-être » des ex-salariés de l’hôtellerie-restauration séduit les autres secteurs
« J’ai pas mal roulé ma bosse », reconnaît Antoine Biewesch, 29 ans, qui a été tour à tour barman, maître d’hôtel et groom dans des établissements de prestige à Paris et en Suisse. Aujourd’hui, il est conseiller immobilier au sein d’une agence du réseau Orpi à Nogent-sur-Marne, dans le Val-de-Marne. A l’instar d’Antoine, de nombreux salariés ont abandonné l’hôtellerie-restauration.
C’est une véritable hémorragie qu’a connue le secteur, déjà confronté à une pénurie chronique de main-d’œuvre avant la pandémie. « Avant la crise sanitaire, de 130 000 à 150 000 emplois demeuraient vacants, explique Vincent Sitz, président de la commission emploi-formation du Groupement national des indépendants hôtellerie-restauration (GNI), et entre les deux confinements, quelque 110 000 personnes ont quitté le secteur. »
La raison de cette désertion est connue : le secteur est peu attractif. Une étude de la direction de la recherche du ministère du travail (Dares) datant de 2018 le confirme : l’hôtellerie-restauration figure en tête des métiers les moins favorables au bien-être psychologique. Les horaires à rallonge, les coupures entre les services, le travail les week-ends et les jours fériés, les heures supplémentaires non payées, un style de management très pyramidal, voire quasi militaire… ont fait fuir nombre de salariés. Il faut dire que ceux-ci ont eu le temps de se remettre en question durant les confinements.
Ils aspirent désormais à une « vie normale ». « Je n’ai pratiquement jamais accompagné mes enfants à l’école », regrette ainsi Morgane Rouanet, aujourd’hui en pleine reconversion professionnelle. Si, au départ, il y a une vingtaine d’années, elle a choisi l’hôtellerie-restauration « par vocation », elle souligne les carences du secteur : « Il y a une grande différence entre le rêve et la réalité. C’est vraiment très mal payé et il n’y a ni reconnaissance, ni promotion interne. » Ce que confirme Antoine Biewesch : « Même en mouillant sa chemise, il n’y a pas de reconnaissance », regrette le jeune homme.
« Compétences comportementales »
Certains secteurs, eux-mêmes en quête de main-d’œuvre, ouvrent leurs portes à ces reconvertis : c’est le cas, notamment, des services à la personne, de la grande distribution, de la logistique, de l’immobilier, des domaines où les conditions de travail sont jugées meilleures.
« Je suis persuadé que la main-d’œuvre venant du secteur est bien accueillie dans d’autres domaines, car leurs compétences comportementales sont appréciées », affirme Pierre Courbebaisse, président de l’AFEC, organisme de formation. Il est vrai que la liste de leurs atouts est longue : sens du service client, habitude de travailler dans l’urgence, faculté d’être à la fois au four et au moulin, dynamisme, grande adaptabilité… Autant de soft skills (« compétences comportementales ») aisément transférables dans d’autres secteurs.
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