Le lourd tribut imposé aux chômeurs

Le lourd tribut imposé aux chômeurs

En annonçant, mercredi 27 mars, à l’issue d’un séminaire gouvernemental consacré à la thématique du travail, une troisième réforme en trois ans de l’assurance-chômage, le premier ministre, Gabriel Attal, savait qu’il allait prendre de front les partenaires sociaux. Certes, les formes sont respectées : le gouvernement va laisser le patronat et les syndicats aller au terme de leurs négociations sur l’emploi des seniors, qui comprennent un volet sur l’indemnisation des plus de 55 ans. Les discussions qui devaient se terminer mercredi ont été prolongées jusqu’au 8 avril à leur demande. Mais Gabriel Attal a été suffisamment explicite sur ses projets pour montrer que l’Etat entend reprendre la main sur la gestion de l’assurance-chômage.

Alors que les déficits publics s’emballent sous l’effet du ralentissement de la conjoncture, l’Etat cherche ainsi à faire plusieurs milliards d’euros d’économies sur le régime d’indemnisation des chômeurs. Trois pistes sont à l’étude : réduire la durée d’indemnisation, actuellement de dix-huit mois, revoir la période de travail ouvrant droit à indemnisation et réduire le niveau d’indemnisation.

Les deux premières sont privilégiées, le premier ministre précisant que la durée d’indemnisation ne serait pas inférieure à douze mois. Ces annonces ont provoqué un tir de barrage des syndicats. Compte tenu des excédents actuels du régime, ils s’étaient entendus avec les patrons sur une baisse de leur cotisation et sur une amélioration de l’accès à l’assurance-chômage pour les primo-entrants sur le marché du travail. Ces évolutions sont jugées inopportunes par le gouvernement.

Le gouvernement se dédit

La volonté de l’Etat de reprendre le contrôle sur le système d’assurance-chômage est en germe depuis 2017. Le basculement des cotisations salariales sur la contribution sociale généralisée, l’objectif d’en finir avec le chômage de masse ont conduit le gouvernement à se montrer de plus en plus directif pour tendre vers le plein-emploi et faire de l’Unédic l’un des instruments de sa politique, au côté de la réforme de France Travail et du développement des formations professionnelles. Cette stratégie ne pouvait déboucher que sur une confrontation avec les partenaires sociaux. Les syndicats et le patronat restent attachés à la protection des chômeurs et à la défense des intérêts des entreprises, là où le gouvernement pose le retour rapide vers l’emploi comme la condition principale du maintien de l’Etat-providence.

Les nouvelles pistes esquissées par Gabriel Attal, qui devraient entrer en application par voie réglementaire dès l’automne, vont faire peser sur les chômeurs un lourd tribut. Il sera ressenti d’autant plus durement qu’il se met en place alors que la conjoncture n’est pas bonne et que le chômage s’est mis à augmenter de nouveau.

Bousculé par l’ampleur des déficits, le gouvernement se dédit sur ce sujet, puisqu’il s’était promis en 2023 de lier le durcissement du régime d’indemnisation à l’amélioration du marché de l’emploi. Sa précipitation à engager une nouvelle réforme est d’autant plus contestable qu’il n’a pas pris le temps d’évaluer l’impact des deux précédentes pour en corriger les effets néfastes. Son initiative sera interprétée comme un coup porté aux plus précaires au nom du gage qu’il devait donner aux agences de notation financière. Après l’opposition sur la réforme des retraites, le divorce avec les syndicats n’en est que plus lourd de sens.

Le Monde

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LJD

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