« Le chiffre d’affaires est à zéro », la crise du coronavirus met en péril les petites compagnies aériennes
Marc Rochet, patron d’Air Caraïbes et de French bee, les deux compagnies aériennes du Groupe Dubreuil, n’en revient toujours pas. « Nous vivons quelque chose que nous n’avons jamais vécu ! », raconte-t-il, abasourdi. En fin connaisseur du transport aérien, il estime que rien ne sera plus comme avant, quand la pandémie de Covid-19 sera passée. « Le monde de demain ne sera plus le même après une crise d’une telle intensité », pense-t-il. A l’en croire, la consolidation du secteur menace d’être sévère. « Je n’ai jamais vu une crise du transport aérien ne pas conduire à une restructuration du marché. Je ne vois pas pourquoi la France échapperait à cette règle. »
Il n’est pas le seul à entrevoir une restructuration d’importance. Pour Pascal de Izaguirre, PDG de Corsair, ce sont les compagnies à bas coût qui pourraient faire les frais de la pandémie. « La crise va laisser des traces » chez les gens. Elle pourrait induire « un changement de comportement des consommateurs ». Le patron de Corsair redoute que la sortie du confinement sonne aussi la fin de la frénésie de voyages à moindre prix, qui a fait, depuis plus de vingt ans, le bonheur, et surtout la fortune, de compagnies à bas coût telles que Ryanair et easyJet. « Les low cost vont être très touchées, car le goût de voyager en permanence pour pas cher va en partie disparaître. »
Elles ne sont pas les seules. La low cost long-courrier « Norwegian est aussi menacée, car elle est déjà sous perfusion des autorités norvégiennes », signale M. de Izaguirre. Cette entreprise, qui doit supporter une dette de 2 milliards d’euros, est d’autant plus en difficulté que son modèle économique n’a pas encore eu le temps de faire ses preuves.
Les coûts fixes persistent
Pour le patron de Corsair, c’est tout le transport aérien et pas seulement le segment du low cost qui sera affecté. Même la clientèle d’affaires pourrait être touchée. Celle qui rapporte le plus aux compagnies aériennes. « La faute… au télétravail », selon lui. « Avec la généralisation du télétravail pendant cette période, les entreprises sont en train de découvrir que ce n’est pas la peine d’envoyer leurs cadres prendre l’avion », prétend M. de Izaguirre.
Si la demande pour des vols en classe affaires pique du nez, cela pourrait être un drame pour des compagnies, « comme Air France, qui ont décidé de miser à fond sur les passagers business ». Selon M. Rochet, la survie d’Air France passera par des décisions brutales, comme celle « de fermer les lignes qui perdent de l’argent ».