L’Allemagne, durement frappée par la pénurie de main-d’œuvre, s’apprête à réformer sa politique migratoire
« Réceptionniste, temps plein, 2 300 à 2 700 euros brut par mois, 25 jours de congé par an. » Sur le site Internet de cette chaîne d’hôtellerie allemande créée à Berlin en 1999, des dizaines d’offres d’emploi du même type se succèdent, dans une liste qui semble interminable : réceptionniste, personnel de salle pour le petit déjeuner, agent de maintenance… Presque aucune expérience n’est demandée ; les conditions semblent attractives. Toutefois, les candidatures se font rares. « C’est catastrophique. Nous avons énormément de mal à trouver des gens », déplore une cadre de ce groupe, qui préfère rester anonyme par crainte de l’effet négatif sur l’image de son entreprise, cruciale dans le recrutement. « La situation est devenue extrêmement critique. Nous allons sans doute revoir nos plans de croissance à la baisse. »
La pandémie de Covid-19, qui a conduit à des licenciements et mis un coup d’arrêt à l’embauche dans le secteur, a aggravé une situation déjà tendue. « Dans l’hôtellerie, les carrières ont perdu de l’attractivité auprès des candidats, qui redoutent le retour d’éventuelles restrictions. Et ceux qui sont là subissent le stress de devoir assurer le service en effectif réduit, ce qui conduit à des départs et affecte l’image de ces emplois. C’est un cercle vicieux », poursuit cette même source.
Dans l’hôtellerie et la restauration, comme dans les aéroports, où les 7 300 emplois vacants ont provoqué d’importantes perturbations cet été, la pénurie est particulièrement prégnante. Mais ce n’est que la partie la plus visible du problème. Selon un sondage de l’institut économique IFO, paru début août, tous secteurs confondus, une entreprise sur deux ne parvient pas à recruter. Presque deux millions de postes sont vacants, a relevé l’institut IAB en août. Un record absolu.
Menace sur la reprise de la conjoncture
Dans certains métiers, le personnel manquant pourrait ne jamais revenir, tant la bataille pour les recrues et les apprentis est impitoyable sur le marché. « Après la pandémie, beaucoup de salariés déçus du tourisme et de l’hôtellerie-restauration ont redécouvert l’attractivité des métiers de l’artisanat. Certains se sont tournés vers nous », témoigne Lasse Kutzbach, qui dirige une entreprise spécialisée dans les toitures et les structures en bois. « Nous en avons profité, car nous offrons une atmosphère familiale et une formation de qualité », se félicite-t-il, en montrant l’effervescence des travailleurs dans la cour remplie de poutres de son atelier, au cœur du quartier de Tempelhof, à Berlin. S’il estime n’avoir pour l’instant pas de mal à dénicher des candidats, en raison du bouche-à-oreille positif qui s’est créé autour de son entreprise, il reconnaît être une exception au sein de sa branche. Dans les métiers de l’artisanat, 150 000 postes sont actuellement non pourvus.
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