Hutchinson, filiale de Total, va supprimer un millier d’emplois en France

Hutchinson, filiale de Total, va supprimer un millier d’emplois en France

Le groupe Hutchinson compte 80 usines dans le monde, dont 25 dans l’Hexagone.
Le groupe Hutchinson compte 80 usines dans le monde, dont 25 dans l’Hexagone. Hutchinson

Acteur historique de l’industrie du caoutchouc, le groupe Hutchinson est frappé de plein fouet par la crise économique. L’entreprise a confirmé, vendredi 5 juin, qu’elle prévoyait un plan de départs volontaires d’environ un millier de salariés, sur un effectif de 8 000 personnes en France. Une décision motivée par « la situation actuelle dans l’automobile », a assuré une porte-parole de l’entreprise au Monde. Elle assure que « ce plan fera, bien sûr, l’objet de négociations avec les organisations syndicales » et qu’« il n’y aura aucun licenciement ».

Pas de quoi cependant rassurer les syndicats du groupe, qui compte 80 usines dans le monde, dont 25 dans l’Hexagone. Selon la CFDT, ces mesures de départ pourraient concerner 3 000 salariés sur l’effectif mondial et 6 000 intérimaires, auxquels Hutchinson ne ferait plus appel. Le groupe emploie environ 40 000 personnes.

Hutchinson, filiale du groupe pétrolier Total depuis 1974, fabrique et commercialise des produits issus de la transformation du caoutchouc. Spécialisée dans les élastomères, la société fait partie des experts mondiaux des systèmes antivibratoires, de la gestion des fluides, ainsi que de l’étanchéité de précision et de carrosserie.

La société compte parmi ses principaux clients l’industrie automobile et l’aéronautique, deux secteurs durement affectés par les mesures de confinement qui ont mis la planète à l’arrêt pendant deux mois. D’après les syndicats, la direction du groupe a annoncé début juin que les résultats du mois de mars étaient inférieurs de 60 % à ceux de 2019, et que ceux du mois de mai seraient encore plus mauvais.

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Les organisations syndicales soulignent également les effets pervers de la décision de Total de ne pas utiliser le dispositif de chômage partiel, tout en assumant le versement des salaires à 100 %, ce qui a laissé un trou de trésorerie important, explique la CFDT dans un tract. La CGT souligne pour sa part que le groupe pétrogazier a fait le choix de ne pas recourir à ce dispositif pour pouvoir verser librement des dividendes à ses actionnaires.

Le risque d’une perte de compétences

La direction a déjà identifié près de 800 personnes pouvant prétendre à un départ en retraite anticipée au niveau national, dans le cadre d’une rupture conventionnelle collective. L’entreprise souhaite ouvrir les négociations immédiatement, pour que le plan puisse prendre effet dès septembre et se terminer en janvier 2021. « C’est choquant », estime Didier Godde, coordinateur CGT du groupe. « Les salariés viennent à peine de sortir de la pandémie et on nous fait ce type d’annonce ! ». Les deux syndicats appellent à prendre le temps de la discussion. « Il faut aussi regarder en détail l’impact des mesures de soutien à l’automobile », note M. Godde. « On travaille à 75 % pour l’industrie automobile. Elle ne va pas rester à l’arrêt éternellement ».

Pour les organisations syndicales, le risque est que l’entreprise perde des compétences et des salariés en CDI, et qu’elle se retrouve à recourir à davantage d’intérimaires et de CDD lorsque l’activité reprendra. « Le groupe profite de la crise pour réduire la voilure. Il faut se rendre compte qu’on parle de plus de 10 % des effectifs en France ! », ajoute Didier Godde.

Pour l’heure, l’industriel ne précise pas quels sites pourraient être concernés par les suppressions de postes, ni si des usines situées en France pourraient fermer leurs portes. « Le PDG nous a promis qu’il n’y aurait pas de fermeture de site en France. C’est ce qu’on espère », détaille Farid Meslati, coordinateur CFDT du groupe.

Les syndicats estiment que la direction brosse un portrait trop négatif de l’entreprise pour pouvoir justifier ce plan de départ

Ni la CGT ni la CFDT n’envisagent de se lancer dans des tractations sur ce plan de départ. « On veut d’abord des réponses à nos questions sur la stratégie du groupe, sur la préservation de l’emploi, des garanties pour la suite », précise M. Meslati, qui privilégie plutôt un accord sur des départs anticipés. « On peut arriver quasiment au même nombre de départs et préserver l’emploi pour la reprise », veut-il croire.

Les syndicats estiment également que la direction brosse un portrait trop négatif de l’entreprise pour pouvoir justifier ce plan de départ. Ils s’interrogent également sur le rôle de Total, un actionnaire qui jouit d’une forte stabilité financière. « Si un groupe comme Total ne montre pas l’exemple pour soutenir l’industrie française, qui va le faire ? On va finir par démanteler toutes nos filières de haut niveau technologique, si on continue comme ça », s’inquiète Didier Godde, de la CGT.

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LJD

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