Grève dans la fonction publique d’Etat : les modalités de retenues sur salaire « disproportionnées », selon un organe du Conseil de l’Europe
La France enfreint la Charte sociale européenne en appliquant à certains fonctionnaires grévistes des retenues de salaires excessives, a considéré, dans une décision rendue publique mardi 14 février, le Comité européen des droits sociaux (CEDS). L’instance, rattachée au Conseil de l’Europe et chargée d’examiner le respect de ce traité ratifié par la France, avait été saisie par la Confédération générale du travail (CGT), sur la règle dite du « trentième indivisible » à laquelle sont soumis les agents de la fonction publique d’Etat.
Ils sont en effet privés d’un trentième de leur rémunération par jour de grève, même s’ils ne font grève qu’une heure ou une demi-journée (à l’inverse, notamment, du secteur privé dans lequel la retenue sur salaire est proportionnelle à la durée de l’arrêt de travail). Le CEDS a donné raison à la CGT en estimant que cette règle « constituait, dans son effet, une restriction d’un droit fondamental », à savoir le droit de grève.
Le dispositif « entraîne une retenue disproportionnée sur le salaire des grévistes et revêt un caractère punitif », concluent les juristes européens. Le CEDS relève par ailleurs l’absence de « justification objective et raisonnable » à la différence de traitement entre les 2,5 millions d’agents de la fonction publique d’État et ceux des versants territorial (2 millions d’agents) et hospitalier (1,2 million), qui ne sont pas soumis à la règle du trentième indivisible.
Pas d’effet contraignant
Cette décision de la CEDS n’a toutefois pas de force « exécutoire » dans le droit national. Dans un communiqué, la CGT a estimé qu’il y avait « urgence à ce que l’employeur public et les juridictions internes appliquent les recommandations du CEDS, comité participant à l’effectivité et la protection des droits sociaux des travailleurs.es ».
Il s’agit cependant d’une « belle victoire (…) dans cette période de mobilisation sociale », estime la CGT. Depuis le mois de janvier, les syndicats présentent un front uni contre la réforme des retraites proposée par le gouvernement, qui prévoit de repousser progressivement l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans et d’accélérer l’allongement de la durée de cotisation requise pour toucher une retraite à taux plein.