Fantasme ou risque réel, les Etats-Unis se divisent sur l’inflation
La hausse du salaire minimum horaire fédéral attendra. Les démocrates ont, fin février, renoncé à adopter la hausse de 7,25 dollars (6 euros) à 15 dollars voulue par le président Joe Biden, faute de majorité suffisante au Sénat. Les experts du Congrès ont jugé qu’il fallait non pas une majorité simple, mais une majorité qualifiée de 60 sénateurs sur 100.
De longues négociations vont s’engager en faveur d’une hausse moindre – peut-être 11 dollars –, mais l’affaire n’aura pas l’ampleur prônée depuis des années par la gauche démocrate. Si moins de 2 % des salariés sont au salaire minimum fédéral, inchangé depuis 2009, son relèvement à 15 dollars aurait concerné finalement 15 % de la population active et, surtout, aurait changé radicalement la donne dans les Etats ruraux des plus pauvres, de l’Alabama au Montana, en touchant plus du quart des travailleurs.
C’était trop pour les républicains, qui ne veulent pas d’une telle mesure en période de chômage, et pour ceux qui craignent une résurgence de l’inflation. Les démocrates se concentrent désormais sur le seul aspect budgétaire du plan Biden ; approuvé par la Chambre des représentants, il doit être adopté au Sénat, où les démocrates ne disposent de la majorité que grâce à la voix de la vice-présidente des Etats-Unis, Kamala Harris.
Des marchés financiers inquiets
Ce plan, de 1 900 milliards de dollars, soit près de 10 % du produit intérieur brut (PIB) est vivement contesté, notamment parmi les économistes keynésiens de renom, Larry Summers, ancien secrétaire au Trésor de Bill Clinton, et Olivier Blanchard, ex-économiste en chef du Fonds monétaire international (FMI). Ce plan comporte deux volets : l’un destiné à aider les plus pauvres et les collectivités territoriales – il est peu contesté ; le second vise à envoyer un chèque de 1 400 dollars à chaque Américain gagnant moins de 75 000 dollars par an. Cette mesure est jugée inutile – elle n’aide pas les pauvres – et va gonfler le revenu des classes moyennes, qui a pourtant fortement augmenté en 2020, en raison des aides massives décidées par l’administration Trump et de l’épargne forcée en période de pandémie.
Mais Joe Biden est pris dans un récit politique, qui laisse entendre qu’il n’y a eu aucune solidarité sous Trump – ce qui est faux – et décrit l’Amérique comme si 2021 était l’année de la pandémie, alors qu’elle est celle du rebond, économique et sanitaire – le nombre de nouveaux cas de Covid-19 s’est plus que divisé par trois depuis début janvier.
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