Face aux crises, les investisseurs préfèrent les directions bicéphales

Face aux crises, les investisseurs préfèrent les directions bicéphales

« Les dirigeants n’aiment guère diviser leur pouvoir, mais lorsque de grandes turbulences traversent l’entreprise, ils finissent par céder. »
« Les dirigeants n’aiment guère diviser leur pouvoir, mais lorsque de grandes turbulences traversent l’entreprise, ils finissent par céder. » Otto Dettmer/Ikon Images / Photononstop

Depuis le début de l’année, il y a deux pilotes chez l’avionneur Boeing. David Calhoun, un ancien de General Electric et du groupe d’investissement Blackstone, a revêtu la casquette de CEO : chief executive officer ou directeur général en français. Et Larry Kellner, ex-dirigeant de Continental Airlines, est devenu chairman, soit président du conseil d’administration du groupe.

Le géant Boeing, après plusieurs mois de crise et deux crashs du 737 MAX ayant entraîné la mort de 346 personnes, a revu et corrigé son organigramme. Fini le système pyramidal avec un numéro un tout puissant, président et directeur général, incarné par Dennis Muilenburg. Il a été renvoyé en décembre 2019. Le constructeur préfère dorénavant l’option aigle à deux têtes.

Le trop grand optimisme de Dennis Muilenburg avait plombé Boeing. Il croyait que la Federal Aviation Administration accorderait au 737 MAX le droit de voler à nouveau d’ici à la fin de 2019. En fait, sa prévision s’est révélée fausse. Elle a provoqué la fureur des politiques, des compagnies aériennes clientes, des investisseurs et des familles des victimes. Cet exemple est souvent cité aujourd’hui par les militants de la bonne gouvernance, fervents avocats de la séparation des rôles.

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Remettre les clés du pouvoir entre les mains d’une seule personne « n’a aucun sens », explique ainsi le professeur Charles Elson, responsable du centre John Weinberg, à l’université du Delaware. « Le directeur général, dont l’activité doit être supervisée par le conseil d’administration, ne peut superviser ce même conseil d’administration [CA]. Lorsque le CA est dominé par le président-directeur général, il est beaucoup plus passif », poursuit-il. Et en cas de crise majeure, comme celle du coronavirus, mieux vaut deux dirigeants, plutôt qu’un seul… Si l’unique PDG tombe malade, qui le remplace ?

Le bon moment

Ces arguments ont convaincu de nombreux investisseurs institutionnels. Ainsi est-il inscrit dans les statuts du puissant fonds de pension Calpers, chargé de la retraite des fonctionnaires de l’Etat de Californie, que « le président du CA doit favoriser une culture d’ouverture et des débats constructifs qui permettent à des points de vue différents de s’exprimer ». « Les rôles du DG et du président du CA, est-il précisé, ne doivent être cumulés que dans des circonstances très limitées. »

Les manageurs du fonds anglais LGIM (Legal General Investment Management) sont encore plus nets. Le groupe responsable du placement d’1,4 trillion d’euros a lancé une campagne anticumul dans les grandes entreprises cotées en Bourse aux Etats-Unis, en France et en Espagne. Lorsque le fonds d’investissement américain BlackRock, la banque JP Morgan Chase, Facebook ou encore Amazon réuniront l’assemblée générale annuelle de leurs actionnaires, ils entendront les objections des représentants de l’investisseur LGIM.

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LJD

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