Face au Covid-19, l’industrie allemande de la viande obligée de réformer ses conditions de travail

Face au Covid-19, l’industrie allemande de la viande obligée de réformer ses conditions de travail

L’usine Tönnies de Rheda-Wiedenbrück (Rhénanie-du-Nord-Westphalie), en avril 2018.

C’est une des conséquences positives de la crise sanitaire due au Covid-19 en Allemagne : l’industrie de la viande, aux conditions de travail largement considérées comme scandaleuses, a été contrainte au changement. Une loi, entrée en vigueur au 1er janvier, impose à la filière de mettre fin au recours aux travailleurs recrutés par le biais d’entreprises en sous-traitance, constitutif de son modèle économique. Au printemps 2020, la découverte d’un important foyer d’infection chez les ouvriers venus d’Europe de l’Est dans un abattoir du groupe Tönnies, puis dans d’autres usines, avait relancé un scandale connu depuis longtemps et permis au gouvernement d’imposer enfin une réforme.

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C’est la fin d’une hypocrisie au pays de la « viande pas chère » : les Allemands s’accordaient à condamner les conditions de travail chez les industriels, mais continuaient d’acheter pour quelques euros leurs saucisses à barbecue chez les discounters ou les marques distributeurs à bas prix. Et pour cause : les entreprises du secteur pouvaient en toute légalité pratiquer des prix faibles, en faisant travailler une forte proportion d’étrangers recrutés par l’intermédiaire de cascades d’entreprises en sous-traitance, aux pratiques peu scrupuleuses, parfois mafieuses, très difficiles à contrôler. Les abattoirs pouvaient ainsi produire en Allemagne en profitant des salaires et des conditions de travail en vigueur dans les pays les plus pauvres d’Europe de l’Est. Ces ouvriers exploités se voyaient le plus souvent proposer un logement dans des foyers collectifs au confort rudimentaire, dont le loyer était prélevé sur leur paye, avec une couverture sociale et sanitaire quasi inexistante.

Un chiffre d’affaires de 40 milliards d’euros par an

Jusqu’au bout, les industriels du secteur ont tenté de repousser la réforme. Leur recours en urgence déposé devant la Cour constitutionnelle allemande a été rejeté fin décembre 2020. Dans la branche de la viande, qui réalise un chiffre d’affaires de 40 milliards d’euros par an, l’année 2021 marquera donc une césure. Les « contrats d’usine » (contrats de sous-traitance entre une entreprise et un prestataire de personnel pour une production donnée) sont désormais interdits dans l’abattage, la découpe et la transformation de la viande. A partir du 1er avril, le travail en intérim ne sera plus autorisé que dans des exceptions très strictes et seulement pendant trois ans. Le recrutement d’intérimaires ne devra pas excéder quatre mois, ils devront être rémunérés au même niveau que le personnel permanent.

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LJD

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