En Ardèche, les gars du coin assurent la relève agricole

En Ardèche, les gars du coin assurent la relève agricole

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Publié aujourd’hui à 02h50

Antoine Turrel a rabattu la capuche de son sweat rouge sur sa tête, tignasse bouclée qui dépasse. Juste avant midi, le jeune homme de 21 ans s’est extirpé du travail de la ferme pour venir trinquer sur la butte qui surplombe le petit château de pierre noire de Berzème, village ardéchois de moins de deux cents habitants. Malgré les premiers rayons de printemps, la bise est glaciale.

Le plateau du Coiron, vaste table de roche volcanique, est connu pour son exposition aux vents, qui sont redoutables l’hiver. Il est rude à vivre – Antoine en sait quelque chose, lui dont les copains ont dû, en janvier, monter en tracteur sur les routes gelées pour se rendre à son anniversaire. Dans la bande, on ne rate pas une occasion de faire la bringue et on est débrouillards.

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« Tu bois quoi ? », lui lance d’ailleurs l’un d’eux. « Un canon de rouge, s’il te plaît. » De la clique d’amis, ils sont presque tous là, accoudés à la buvette de la foire agricole. Avec ses étals de producteurs et ses tracteurs exposés sur la pelouse, la fête du jour est organisée par les élèves du lycée agricole d’Aubenas – ville moyenne à trente minutes de route –, par lequel la quinzaine de garçons regroupés sont tous, peu ou prou, passés en bac pro, puis en BTS pour certains. Mais ils se sont rencontrés bien avant ça, à l’école maternelle en bas de la butte. La plupart, issus de lignées d’agriculteurs dispersées sur le plateau, ont aujourd’hui décidé de reprendre la ferme familiale.

Léandre Figuière (à gauche) et Antoine Turrel (à droite) avec leurs amis. Les jeunes agriculteurs se retrouvent à la foire agricole de Berzème, sur le plateau ardéchois du Coiron, le 9 avril 2022.

A l’heure où les transmissions d’exploitations agricoles ne sont plus aussi automatiques et où deux tiers des agriculteurs français risquent de ne pas être remplacés, cette génération crée une dynamique forte sur le Coiron.

Antoine Turrel a, lui, franchit officiellement le pas en octobre 2021, en rachetant une partie des parts du groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC) de la ferme de Fay, à Sceautres, dans sa famille depuis quatre générations. Sur cet élevage de vaches et de poules, le boulot est partagé avec ses parents, Cathy et Laurent, la cinquantaine. Ils lui laisseront les clés à leur départ à la retraite, ainsi qu’à son acolyte du même âge Léandre Figuiere, dit « Fifi », qui s’est joint à l’aventure, après avoir réalisé tous ses stages de bac pro au sein de l’exploitation.

Les mains dans la terre ou le foin

Antoine comme les autres jeunes le disent : ils n’ont « jamais envisagé » de « faire autre chose » ou de « partir ailleurs ». « C’est important d’avoir son territoire accroché », souligne Robin Caddet, 25 ans, grand gaillard au béret noir – symbole de Berzème où se dispute le championnat du monde de lancer de béret. Ici, ils sont entourés de gars sur qui « on peut compter ». La bande de potes est au centre des trajectoires de cette nouvelle garde agricole, qui a écumé le territoire ensemble, les mains dans la terre ou le foin, la tête renversée dans les pneus d’engins pour jouer à faire des tonneaux. « On s’entraide, on se pousse entre nous. L’été quand on fait les ballots de foin, tout le monde vient donner un coup de main », raconte Antoine, à la réputation de tombeur du groupe, jeune homme coquet au look un brin hipster.

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