Diversité dans les médias : des rédactions incapables de rompre avec l’entre-soi

Diversité dans les médias : des rédactions incapables de rompre avec l’entre-soi

Harry Roselmack, présentateur du JT de TF1, en 2006.

Enfant d’agriculteur, handicapé, issu de famille monoparentale ou d’origine étrangère, ils sont passés par l’association La Chance aux concours (devenue La Chance pour la diversité dans les médias) ou la Prépa égalité des chances de Lille, qui aident depuis la fin des années 2000 les étudiants boursiers à préparer et à passer les concours des écoles de journalisme.

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Diplômés d’écoles reconnues, ils donnent à leur tour de leur temps pour accompagner leurs successeurs éventuels jusqu’au sein de rédactions encore socialement très homogènes. « Quand je regardais la télé, petit, et que je compare avec la diversité sociale qu’on peut y voir aujourd’hui, je ne dis pas que c’est nickel, mais on revient de loin ! », se réjouit toutefois Madjid Khiat, journaliste à Franceinfo (la télé). Née en 2016, la chaîne d’info est effectivement dotée d’un cahier des charges « qui lui impose d’aller chercher d’autres visages », explique Marie-Anne Bernard, à France Télévisions.

« Faire office de quota »

Dans d’autres rédactions plus anciennement constituées, la diversité ethnoculturelle s’impose plus lentement, et paraît encore se résumer à quelques visages (Kareen Guiock, présentatrice du 12.45 sur M6 depuis neuf ans, Karine Baste-Régis, nouvelle joker d’Anne-Sophie Lapix sur France 2). « Je suis journaliste à Franceinfo parce que je bosse comme tout le monde, revendique M. Khiat. Ça me rendrait fou qu’on me résume à mes origines. » Une de ses consœurs, qui souhaite rester discrète, reconnaît avoir renoncé à un poste dans une autre chaîne après avoir compris que le recruteur était plus intéressé par sa couleur de peau que par son professionnalisme. « J’aurais eu l’impression de faire office de quota », condamne-t-elle. Le principe de la discrimination positive est perçu négativement.

« Ceux qui décrochent le plus du métier, ce sont ceux qui étaient les plus pauvres à l’origine » Zahra Boutlelis, reporter à « C à vous »

« L’arrivée d’Harry Roselmack à la présentation du 20 heures de TF1, en 2006, n’a rien changé sur le fond », pointe Faïza Zerouala, journaliste à Mediapart. A ses yeux, « il y a toujours un soupçon de moins bonnes compétences chez les journalistes “racisés” ou de milieux populaires ». Tous ceux que nous avons interrogés font effectivement part d’une « impression d’avoir dû en faire deux fois plus que les autres » pour parvenir à une relative stabilité professionnelle. « Mais est-ce que c’était le cas, ou est-ce que je me suis mis des boulets aux pieds toute seule ? », interroge Nastasia Haftman, correspondante de TF1 en Italie, consciente que la précarité qu’elle a connue dans sa jeunesse a durablement entamé sa confiance en elle.

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