Devant la justice, la directrice générale de Santé publique France se défend d’avoir contribué à rétrograder une consœur
Entre deux réunions consacrées à la gestion de l’épidémie de Covid-19, la directrice générale (DG) de Santé publique France (SPF), Geneviève Chêne, a honoré un rendez-vous judiciaire, les 5 et 19 avril, devant la 31e chambre du tribunal correctionnel de Paris. Mme Chêne était citée à comparaître, à l’instar de trois médecins légistes bordelais, pour « harcèlement moral » et « dénonciation calomnieuse ».
Partie civile dans cette affaire, la médecin Karine Dabadie reproche au quatuor d’avoir contribué à son éviction, en décembre 2019, du poste de responsable de l’unité médico-judiciaire et du Centre d’accueil d’urgence des victimes d’agression (Cauva) rattaché au pôle de santé publique du CHU de Bordeaux.
Qualifiée de « longue et houleuse » par les avocats de la défense, l’audience a mis en relief l’atmosphère délétère qui a longtemps prévalu au sein de l’unité médico-judiciaire Cauva de Bordeaux. Haines recuites, règlements de comptes et autres algarades ont miné ce service, déjà marqué par l’éviction en 2018 de la professeure Sophie Gromb, mise en examen pour « harcèlement moral » par un juge d’instruction de Douai (Nord) en octobre 2021.
« J’ai des consignes de Mme Chêne »
A la barre, Mme Dabadie a déclaré s’être vu notifier verbalement son éviction, le 11 décembre 2019, par la successeure de Mme Chêne à la tête du pôle de santé publique du CHU de Bordeaux, la professeure Anne-Marie Rogues. « Mme Rogues m’a dit : “On m’a demandé de vous destituer, vos collègues disent qu’il y a de grosses difficultés managériales, j’ai des consignes de Mme Chêne” », a raconté Mme Dabadie, actuellement en disponibilité et qui a obtenu, en juillet 2021, l’annulation par le tribunal administratif de Bordeaux de la décision du CHU de l’écarter de ses fonctions.
Dans le cadre de la procédure pénale, elle met en avant une note cosignée, le 30 octobre 2019, par Mme Chêne, destinée au directeur général du CHU de Bordeaux ainsi qu’au président de la commission médicale d’établissement. Dans ce document sont notifiés les reproches formulés contre Mme Dabadie (« attitudes peu confraternelles », « management révélant des pratiques contestables »). La note ferait écho à des griefs qui auraient été émis par trois médecins légistes, reçus ce 30 octobre 2019 par Mme Chêne, nommée la veille « DG » de SPF par un décret d’Emmanuel Macron.
« Sidérée » par les accusations portées à son encontre, Mme Chêne « conteste les infractions reprochées » tout en expliquant que Mme Dabadie, recrutée en juin 2018, « s’est renfermée sur elle-même sur fond de mésentente avec des praticiens ».
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