Des pistes pour limiter la prolifération des CDD d’usage
Pour combattre la précarité dans le monde du travail, il faut stopper l’expansion incontrôlée d’une des formes d’emploi les plus instables : le CDD d’usage (CDDU). C’est le sens des recommandations dévoilées, mardi 15 juin, par deux parlementaires macronistes : le député (LRM, Val-de-Marne) Jean-François Mbaye et le sénateur (RDPI, Hauts-de-Seine) Xavier Iacovelli. Dans le rapport qu’ils ont réalisé à la demande de Matignon, une vingtaine de pistes sont esquissées, le but étant de réduire « de 20 % en trois ans » les recrutements conclus par le biais de ce dispositif.
Créé par une ordonnance de 1982, le CDDU se singularise par sa flexibilité extrême : il peut être renouvelé à l’infini et ne prévoit, à de rares exceptions près, aucune prime de précarité lorsqu’il arrive à son terme, contrairement au CDD de droit commun. A l’origine, ce statut atypique devait être cantonné aux secteurs où « il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI, en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère, par nature, temporaire de ces emplois ». Mais le système, après de multiples dévoiements, s’est développé au-delà de son cœur de cible : alors que les CDDU devraient concerner « une petite vingtaine de métiers », ils sont en réalité dix fois plus à être touchés, comme le constatait un rapport remis, fin 2015, par l’inspection générale des affaires sociales (IGAS).
Rationaliser les pratiques
Ce succès se lit dans les chiffres : en 2019, quelque 9,2 millions contrats de ce type ont été signés par 4,8 millions de personnes, soit un peu plus de 16 % « de l’ensemble des embauches », selon les données recueillies par MM. Iacovelli et Mbaye. C’est dans l’industrie des « arts et spectacles » que les employeurs y recourent le plus. Au sein du peloton de tête, il y a aussi les hôtels-cafés-restaurants, les instituts de sondage, les entreprises de services à la personne, les établissements privés d’enseignement, les foires et salons… Dans 42 % des cas, la durée du CDDU est de « moins d’un jour ».
Alors que les « abus » sont légion et identifiés de longue date, le CDDU semble « susciter une forme de désintérêt » de la part des pouvoirs publics, « mais également des partenaires sociaux », regrettent MM. Iacovelli et Mbaye. Une telle inertie s’avère d’autant plus dommageable aujourd’hui, que des milliers d’« intermittents de l’emploi » ont vu leurs « difficultés » s’accroître avec la récession liée à l’épidémie de Covid-19. C’est pourquoi les deux élus émettent des propositions pour « réguler » le dispositif, sans pour autant le remettre en cause dans son principe même. Selon eux, le CDDU est adapté au modèle économique de certaines activités. Il peut, de surcroît, « avoir la faveur » des parties en présence – celle du patron mais aussi de son salarié – et constitue, dans certaines situations, un « rempart » contre le travail au noir.
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