Covid-19 : l’usure des internes de médecine, en première ligne

Covid-19 : l’usure des internes de médecine, en première ligne

Opération de retournement d'un patient, qui nécessite entre six et huit personnes, à l’hôpital Lyon Sud, le 13 avril.

Corentyn Ayrault vient d’achever une semaine de quatre-vingt-dix heures de travail. Encore une et ce sera, pour l’interne en anesthésie-réanimation, la fin de son stage au bloc central des urgences et à la maternité de la Pitié-Salpêtrière (Assistance publique-Hôpitaux de Paris, AP-HP). La fin, aussi, d’un tunnel de trois semaines à un rythme extrême, sans s’arrêter, hormis pour le repos de sécurité obligatoire, « pour dormir » après vingt-quatre heures de garde.

Depuis que la troisième vague de l’épidémie frappe de plein fouet l’Ile-de-France, l’homme de 26 ans a accepté d’aller aider, en plus de son semestre en anesthésie, dans un service de réanimation de l’hôpital, débordé par l’afflux de patients atteints du Covid-19.

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Ces jeunes médecins qui effectuent leur internat – après la sixième année d’études de médecine – dans différents services pendant trois ans au moins, à un rythme semestriel, sont en première ligne depuis le début de la crise épidémique qui bouleverse l’hôpital. Mais loin de l’élan durant la première vague, l’usure et la fatigue dominent. Avec une tension particulière en Ile-de-France, où les internes pourraient manquer dans certains services de réanimation dans les jours qui viennent.

« C’est sûr qu’à part la gloire, on n’a pas grand-chose », témoigne le jeune francilien, un peu écœuré, qui rappelle qu’il est « payé pareil », quel que soit le nombre d’heures alignées. « Je le fais parce que je sais que ça rend service, mais c’est vrai que je suis un peu à bout », reconnaît-il, après une année sur le front du Covid-19. Les conditions de travail « à faire pleurer » pèsent de plus en plus lourd. Tenues de protection en papier, pas de cantine, lit en plastique pour se reposer en garde… « On travaille dans des réanimations qui galèrent tellement qu’on doit mettre deux patients dans une même chambre, on n’a pas le choix, mais c’est dangereux, lâche-t-il. C’est ahurissant. »

« Le Covid a pris le pas sur toutes les autres pathologies »

Le 3 mai, à l’heure du changement de stage de l’ensemble des internes déployés dans le système hospitalier français, Corentyn Ayrault partira en anesthésie, à Bordeaux, en espérant échapper au Covid-19. En Ile-de-France, il n’a pas été le seul à effectuer ce choix : de manière relativement inédite, à entendre certains médecins, plusieurs services de réanimation vont se retrouver sans interne, ou avec beaucoup moins de jeunes médecins que durant le semestre qui vient de s’écouler. Les postes vacants existent en permanence, le nombre de stages ouverts étant toujours supérieur d’au moins 7 % à l’effectif, mais la désaffection touche cette fois-ci fortement des réanimations sous le feu de la troisième vague épidémique.

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