Covid-19 : la crise peut devenir une catastrophe humanitaire pour les travailleurs de l’économie informelle
L’ampleur de la crise économique et sociale dépassera probablement ce qui était prévu il y a encore peu. Dans un nouveau rapport, publié jeudi 29 avril, l’Organisation internationale du travail (OIT) revoit à la hausse ses prévisions de pertes d’heures travaillées. Dans une précédente étude, il y a trois semaines, la baisse du temps effectivement travaillé avait été estimée à 4,5 % au premier trimestre 2020, comparé au quatrième trimestre 2019, ce qui équivaut à 130 millions d’emplois à plein temps. Pour le deuxième trimestre, le repli atteindra 10,5 %.
« On continue de perdre des emplois à une vitesse extraordinaire. Nous avions estimé cette perte à 195 millions pour le deuxième trimestre. Aujourd’hui, nous tablons plutôt sur l’équivalent de 305 millions de postes supprimés », annonce Guy Ryder, le directeur général de l’OIT, qui regroupe les représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs de 187 Etats membres.
La dégradation de l’emploi dans le monde est due à la prolongation et à l’extension des mesures de confinement. En dehors de la Chine, où l’activité a partiellement redémarré au début du mois d’avril, « la situation s’est aggravée ailleurs, et 64 pays supplémentaires ont adopté des mesures de fermeture depuis le 1er avril, pour la plupart en Afrique, en Europe et Asie centrale, et dans les Amériques ». Ainsi, 68 % des travailleurs dans le monde vivent dans des pays où il existe des mesures de fermeture, obligatoire ou recommandée, des entreprises.
« La prochaine pandémie sera la famine »
L’OIT insiste sur l’extrême gravité que fait peser cette crise sur le secteur de l’économie informelle, soit 2 milliards de travailleurs dans le monde. Quelque 76 % d’entre eux (1,6 milliard) sont « fortement affectés par les mesures de confinement, dans les secteurs les plus touchés ». Ces travailleurs, majoritairement des femmes, n’ont aucune possibilité de travail à distance, ne disposent généralement pas de protection sociale et ont un accès limité aux services de santé. Pour eux, les pertes de revenus devraient atteindre 60 % à l’échelle mondiale, mais la chute pourrait s’élever à 81 % sur les continents où ce secteur est le plus important, en Afrique et en Amérique latine.
« Sans réaction internationale pour aider ces pays les plus défavorisés, qui n’auront pas les moyens de soutenir cette économie informelle, cette catastrophe deviendra un drame humanitaire, prévient Guy Ryder. Sinon, comme a alerté le Programme alimentaire mondial, la prochaine pandémie sera la famine. »
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