Coronavirus : les salariés de PSA hostiles à une réouverture rapide des usines

Coronavirus : les salariés de PSA hostiles à une réouverture rapide des usines

Entrée principale de l’usine PSA de Mulhouse, à Sausheim (Haut-Rhin), le 16 mars.
Entrée principale de l’usine PSA de Mulhouse, à Sausheim (Haut-Rhin), le 16 mars. SEBASTIEN BOZON / AFP

L’information s’était répandue, vendredi 27 mars dans l’après-midi, comme une traînée de poudre : malgré la progression de la pandémie de Covid-19, PSA allait rouvrir ses usines dans les plus brefs délais. Le groupe automobile, qui avait fermé ses sites industriels deux semaines auparavant, venait de publier un communiqué indiquant qu’il mettait en place « des mesures sanitaires renforcées afin de créer les conditions d’une reprise d’activité sécurisée et progressive ».

Au même moment, dans au moins deux usines françaises du groupe, à Valenciennes (Nord, boîtes de vitesses) et à Douvrin (Pas-de-Calais, moteurs), étaient évoquées en comité social et économique (CSE) non seulement les mesures à mettre en place (port de masque, distances de sécurité, nettoyage…), mais aussi une reprise dès la semaine du 30 mars, en effectif réduit.

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La réaction syndicale ne s’est pas fait attendre : un rejet franc et massif du principe de reprise rapide, venu y compris des organisations les plus enclines à rechercher le compromis. « La reprise d’activité ne pourra s’envisager qu’après le pic de l’épidémie dans notre pays » a déclaré FO, première organisation syndicale du Groupe PSA, dans un communiqué diffusé le 27 mars.

La CFTC (troisième syndicat), au ton habituellement modéré, a adressé, lundi 30 mars, un courrier à Carlos Tavares, le président de PSA, dans lequel Franck Don, le délégué central PSA du syndicat chrétien, ne mâche pas ses mots. « Il est hors de question de demander aujourd’hui aux salariés de PSA de sortir de chez eux, alors que le gouvernement vient de prolonger la période de confinement », déclare M. Don dans cette missive, que Le Monde a pu consulter.

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« Pour envisager une reprise d’activité, même progressive, deux conditions au minimum devront être réunies, poursuit le syndicaliste. Le pic de l’épidémie sera derrière nous et les soignants français bénéficieront du matériel de protection nécessaire à l’exercice de leur activité. Il n’est pas question que PSA utilise pour ses propres besoins des masques, des blouses, des lunettes de protection, alors que médecins, infirmières, policiers ne peuvent en bénéficier en nombre suffisant. Ces conditions étant encore loin d’être remplies, il serait indécent de parler de reprise d’activité. »

Scepticisme

Face au front syndical, PSA a amorcé un rétropédalage en souplesse, affirmant qu’aucune date de réouverture n’était définie nulle part. « On met en place le protocole sanitaire renforcé dans nos usines sans production, avec par exemple la pose de marquages au sol, puis on fait un audit, détaille un porte-parole de l’entreprise. Il s’agit d’anticiper afin d’être prêt le jour venu. Le redémarrage sera décidé avec nos partenaires sociaux. »

Le groupe français n’est pas le seul à piaffer d’impatience, tant l’immobilisation des usines engloutit les précieuses réserves de trésorerie des entreprises. Aux Etats-Unis, où le pic épidémique est loin d’être atteint, Ford, Fiat Chrysler, Honda et Toyota ont pris des mesures dès le jeudi 26 mars pour redémarrer leurs usines nord-américaines au début ou à la mi-avril.

En France, le rival de PSA, le groupe Renault, adopte une stratégie assez différente, consistant à réduire encore un peu plus l’activité

Ford, en particulier, a déclaré vouloir rouvrir cinq usines de montage entre le 6 avril et le 14 avril. Une décision, là-bas aussi, accueillie avec scepticisme par le puissant syndicat automobile United Auto Workers (UAW). « Avant de mettre en place un quelconque plan de reprise dans une usine, la direction devrait se demander : “Voudrais-je y envoyer mon propre fils ou ma propre fille ?” », a déclaré Rory Gamble, le président de l’UAW.

En France, le rival de PSA, le groupe Renault, adopte une stratégie assez différente, consistant à réduire encore un peu plus l’activité, alors que l’ensemble de ses usines françaises sont à l’arrêt depuis le 16 mars. A partir du lundi 30 mars, une grande partie des salariés en Ile-de-France (les activités liées au siège et à la recherche et développement qui étaient jusqu’alors en télétravail à temps plein) passent en activité partielle à 50 % sur une plage limitée au matin. « Les personnes dont l’activité le nécessite continueront à travailler à temps plein », souligne l’entreprise.

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Renault fait par ailleurs savoir que des négociations ont été ouvertes avec les organisations syndicales pour la mise en place d’un « contrat de solidarité et d’avenir », qui vise à transformer une partie des congés des salariés en rémunération et à « ajuster » les augmentations salariales. Des mesures analogues à celles prises lors de la crise de 2008-2009.

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