Coronavirus : échange housses mortuaires contre masques Décathlon, la grande débrouille des hôpitaux
« Je recherche, urgent, des sets de dialyse. » « J’ai un bon stock de pyjamas en cas de besoin. » « Quelqu’un peut fournir du gel hydroalcoolique ? » « Je dispose de cinq pousse-seringues électriques »… Sur la boucle WhatsApp, les messages de ce type sont nombreux. La dernière de ces offres a déclenché une cascade de réactions d’intérêt, de propositions de troc, de promesses.
Il ne s’agit ni de trafic ni de marché noir. Seulement d’un groupe informel qui mêle des cadres hospitaliers de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et des directeurs de cliniques franciliennes. Ils s’y lancent des bouteilles à la mer, des appels à l’aide et se donnent des coups de main salvateurs.
Nuit et jour, depuis presque un mois, les responsables des achats des établissements de santé mènent une course qui semble sans fin pour glaner, ça et là, de quoi équiper leurs soignants. Début mars, chaque établissement disposait, théoriquement, de stocks de matériel permettant de répondre à une crise majeure. Mais ces dernières semaines ont prouvé qu’ils étaient parfois insuffisants. Le 12 mars, quand Emmanuel Macron a annoncé l’ouverture du « plan blanc » pour les hôpitaux, « personne ne s’est rendu compte alors de l’étendue de la crise qui arrivait ni de sa durée », avoue une directrice d’un grand établissement francilien. « Les draps jetables, les masques sont produits en Chine, les gants en Malaisie. Quand la Chine a commencé à tousser, nous nous sommes dit que cela allait piquer », détaille Stéphane Michot, responsable des achats à l’Hôpital américain de Paris, situé à Neuilly-sur-Seine.
« Tous dans la même barque »
En mars, les directeurs des achats des hôpitaux et cliniques « ont eu la tête dans le guidon pour la recherche de masques, raconte une cadre de santé parisienne, sans suffisamment regarder le reste. Et puis nous avons commencé à manquer de draps, de surblouses et de médicaments alors que les patients continuaient de déferler. » « WhatsApp permet d’échanger sur les besoins et les capacités de chacun en temps réel », témoigne Jean-Philippe Gambaro, directeur de la clinique Floréal, à Bagnolet (Seine-saint-Denis).
Les trocs s’organisent en quelques coups de pouces sur l’écran d’un smartphone. « Nous étions en pénurie de masques, la clinique Ambroise-Paré de Neuilly-sur-Seine nous a dépannés avec des masques Décathlon, nous les avons échangés contre des housses mortuaires que nous avions en abondance », admet M. Michot, de l’Hôpital américain. Les groupes des directeurs des achats sont ceux « de la débrouille, de la persévérance », rend compte un directeur d’hôpital de l’Oise. Mais aussi de la solidarité.
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