Changement de tête à la direction interministérielle du numérique, en pleine crise interne

Changement de tête à la direction interministérielle du numérique, en pleine crise interne

Malaise à la direction interministérielle du numérique

« Incompréhension », « violence », « souffrance » : les mêmes mots se répètaient au fil des entretiens. Plus de vingt agents de la direction interministérielle du numérique (Dinum), chargée d’accompagner tous les ministères dans leur transition 2.0, avaient accepté de témoigner auprès du Monde de la dégradation de leurs conditions de travail depuis la réorganisation de leur administration, début 2019, sous l’impulsion du directeur Nadi Bou Hanna. Les deux tiers de ces salariés ont quitté la Dinum, un tiers y est resté. Tous ou presque ont souhaité garder l’anonymat.

Mardi 7 décembre, à la veille de la publication de cette enquête par Le Monde, Nadi Bou Hana a annoncé par mail à ses équipes quitter ses fontions « mi-janvier », « après trois années d’une intensité exceptionnelle », précise-t-il. Ce départ correspond-il au « souhait » de M. Bou Hana, comme il l’écrit, ou est-il imposé par le gouvernement pour répondre à la crise traversée par le service ?

Depuis plus de deux ans, selon les agents interrogés par Le Monde, les arrêts maladie, les burn-out, les prescriptions d’antidépresseurs se sont multipliés au sein de ce service central, placé sous l’autorité du premier ministre et sous la tutelle de la ministre de la transformation et de la fonction publiques, Amélie de Montchalin. Les lettres ouvertes, courriers aux autorités, saisines de la médecine du travail et des syndicats n’y auraient rien changé. Au point d’entraîner une véritable hémorragie de personnel aux compétences pourtant pointues et recherchées, attiré là au départ par l’ambition de moderniser l’action de l’Etat.

Les témoins rencontrés par Le Monde dénoncent le management de M. Bou Hanna, décrit comme autoritaire et déshumanisé, mais aussi l’incohérence de la stratégie mise en œuvre et une politique de ressources humaines qui précarise une filière-clé dans la réussite de la transformation numérique de l’Etat, pourtant promue comme l’un des axes forts du programme d’Emmanuel Macron en 2017. Une ambition sans cesse renouvelée pendant le quinquennat, alors que la crise sanitaire accentuait le besoin d’ouverture des données et d’accès aux services publics dématérialisés, au point qu’un budget de 500 millions d’euros a été déployé jusqu’en 2022.

Précarisation inquiétante des équipes

Après le service d’information du gouvernement, auquel Le Monde avait consacré une enquête le 16 juillet, c’est la deuxième entité dépendant des services du premier ministre qui se voit mise en cause par ses agents pour des pratiques de management brutal. La première est située au 4e étage du 20, avenue de Ségur, à Paris, la seconde au 5e. Une ex-employée de la Dinum y dénonce « un climat de peur », une « violence insidieuse » et « un mal-être général ». Elle raconte des « pics de travail quasi intenables de plusieurs semaines », avec l’obligation de cumuler les responsabilités laissées vacantes par des départs non remplacés. Arrêtée, placée sous antidépresseurs, sans perspective d’évolution, elle a fini par abréger son contrat.

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LJD

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