L’agriculture connectée

Elles témoignent une diminution très nettement perceptible, surtout en Allemagne, et l’ascension des périls. Pour la deuxième fois successive, l’institution communautaire abaisse ses perspectives d’accroissement du produit intérieur brut (PIB) pour 2019 à 1,4 % désormais pour l’ensemble de l’UE, et à 1,2 % pour la zone euro. En février, elle prédisait encore 1,5 % de croissance pour l’UE et 1,3 % pour la zone euro.
Distensions entre Pékin et Washington
En cause, principalement, le retard de la croissance chinoise et les anxiétés liées au commerce mondial, à débuter par les risques d’escalade protectionniste entre la Chine et les Etats-Unis. Le Brexit, qui n’a continuellement pas eu lieu faute de majorité politique au Royaume-Uni sur un traité de séparation, n’arrange rien. « Les risques qui entourent [nos] perspectives restent élevés », précède Valdis Dombrovskis, le vice-président de la Commission pour l’euro et le dialogue social.
« Sur le plan externe, ils ont trait à une augmentation des conflits commerciaux ainsi qu’à la faiblesse des marchés émergents, surtout la Chine. En Europe, nous devrions demeurer attentifs à l’éventualité d’un “Brexit sans accord”, aux anxiétés politiques et à un possible retour du cercle vicieux entre emprunteurs souverains et banques », déclare le politique letton.
Depuis Washington, Christine Lagarde, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), a elle aussi tranché « impératif » mardi que les tensions commerciales entre la Chine et les Etats-Unis s’adoucissent : « Elles représentent une menace sur l’économie mondiale », a-t-elle évalué.
La situation allemande effraye notamment à Bruxelles. Le modèle de la première économie européenne est sous pression : tournée vers l’exportation, et encore très dépendante de son industrie automobile en pleine mutation, elle n’a cessé de ralentir ces derniers mois. Mardi, la Commission a réaffirmé qu’outre-Rhin, le PIB ne pourrait croître que d’un tout petit 0,5 % en 2019. Berlin découvrait encore le double en janvier, presque quatre fois plus en octobre 2018 (1,8 %).
L’Italie, le « maillon faible »
L’Italie reste examinée comme le « maillon faible » de la zone euro, avec une croissance atone (+ 0,1 % en 2019), un défaut public bien au-delà des recommandations liées au Pacte de stabilité et de croissance (- 2,5 % du PIB en 2019 et même – 3,5 % en 2020) et, principalement, une dette publique continuellement étendu (133,7 % du PIB), la plus forte de la zone euro après celle de la Grèce (174,9 % du PIB). Bruxelles avait réussi à apaiser le jeu avec le gouvernement populiste (du Mouvement 5 étoiles et de la Ligue, d’extrême droite) à l’automne 2018, mais les tensions domineraient reprendre juste après les élections européennes, début juin, quand la Commission éditera ses « recommandations » pays par pays.
Lundi 6 mai, Sebastian Kurz, le chancelier autrichien, n’a pas délibéré à présenter du doigt la situation transalpine, dans un entretien à la Stampa : « L’Italie risque de menacer l’ensemble de la zone euro si l’Union européenne ne durcit pas ses règles en matière d’endettement public excessif. »
Est-ce un moyen, pour le jeune dirigeant, qui gouverne en alliance avec le parti d’extrême droite FPÖ, de mettre en garde contre une coalition des populistes (italiens, autrichiens, hongrois….), à droite de sa famille politique européenne, les conservateurs du PPE ? Des sanctions pour les pays européens surendettés « empêcheront l’Italie, par exemple, de finir comme une deuxième Grèce à cause de politiques d’endettement irresponsables », a fait valoir le chancelier au quotidien italien. C’est le seul moyen « d’éviter que l’Italie ne mette toute la zone euro en danger », a-t-il dclaré.
« Nouvelles réformes propices à la croissance »
En rapprochement, la situation française paraît clairement plus désirable, avec une croissance dans la moyenne haute cette année (1,3 % du PIB). Une prévision pratiquement équivalente à celle de la Banque de France, qui table sur une hausse de 1,4 % en 2019. En revanche, l’Hexagone reste en queue de peloton européen pour son déficit public (encore 3,1 % du PIB prévu en 2019), ce qui laisse peu de marges de manœuvre au gouvernement Philippe pour accomplir la promesse du président Macron de réduire l’impôt sur le revenu des Français. Quant à la dette publique, elle devrait poursuivre à se rapprocher gravement des 100 % du PIB, à 99 % cette année.
Ce tableau général absorbant donnera-t-il des références aux tenants des réformes en zone euro ?
« L’économie européenne tient bon face à une conjoncture mondiale moins convenable et à des anxiétés persistantes. Nous devrions toutefois nous tenir prêts à porter plus de soutien à l’économie si nécessaire, en parallèle avec de nouvelles réformes propices à la croissance », a prévenu le commissaire à l’économie Pierre Moscovici.
Le Conseil européen de fin juin aurait à cet égard aménagé un rendez-vous important : les dirigeants de l’Union devraient enfin y décider des modalités adoptes pour l’embryon de budget de la zone euro homologué fin 2018. A condition que les Pays-Bas et la dizaine de petits pays qu’ils allient ne poursuivent pas à torpiller ce projet porté par la Commission Juncker et le président Macron.
Les nouveaux internes aspirent à plus de stabilité, au grand préjudice de certains de leurs aînés pour qui la médecine est un sacerdoce.
« On observe encore le médecin comme une personne à part, qui doit s’accorder totalement à son métier et éponger tous les problèmes de la société. On nous en demande beaucoup… » Trop ? Amina – dont le prénom a été changé – n’est pas loin de le penser. Chaque semaine, elle dédie entre soixante et quatre-vingts heures à l’hôpital. Depuis trois ans, cette étudiante de 28 ans est interne en psychiatrie en Champagne-Ardenne.
Passage obligatoire pour, chaque année, 8 000 étudiants en médecine, l’internat se compose de stages continus dans des centres hospitaliers, sur trois à cinq ans selon les branches. Lourdes journées d’examens, gardes de nuit, week-ends d’astreinte, tâches officielles et cours à l’université en parallèle… Cette période très intense ne permet pas toujours aux futurs médecins de dégager un temps de repos suffisant à leurs yeux.
Avant-goût d’un métier très captivant, l’internat sonne comme une alarme pour une nouvelle génération d’internes avide d’équilibrer vie professionnelle et vie personnelle. Amina a fréquemment le sentiment de devoir renoncer à des parts importantes d’elle-même. Femme engagée depuis toujours, elle a été contrainte de délaisser les associations antiracistes et féministes dans lesquelles elle est compromise. L’interne en psychiatrie aimerait aussi avoir le temps, chez elle, de cultiver son potager, et ainsi recouvrer le goût des aliments faits maison. « La médecine est mon travail, pas mon identité globale », veut-elle rappeler.
Soixante heures de travail chaque semaine
Son cas n’est pas le seul. Sur les réseaux sociaux, des internes relaient les respirations de cette nouvelle génération qui ne perçoit plus tout sacrifier à la médecine. Aviscene (son pseudo sur les réseaux) est l’un d’eux : il comptabilise 60 000 fans sur Facebook et enregistre en moyenne 30 000 vues sur ses vidéos YouTube, dans lesquelles il raconte son quotidien à l’hôpital. « Oui, les jeunes médecins ordonnent débuter à 8 heures et finir à 18 h 30 : et alors ? », lance-t-il sans détour. L’interne de 25 ans, en quatrième semestre de médecine générale dans la région lilloise, avoue ne pas vouloir « faire partie de ces professionnels qui arrivent à l’hôpital à 7 heures, partent à 21 heures, et n’ont jamais le temps de voir leurs enfants ».
Un « sentiment d’inutilité » existe chez les partenaires sociaux qui font cette semaine une dernière série de réunions avec Jean-Paul Delevoye.
La fin du premier chapitre arrive. Depuis le lundi 6 mai et jusqu’au vendredi suivant, Jean-Paul Delevoye effectue une dernière série de meeting avec les partenaires sociaux sur le débat de la réforme des retraites. Le haut-commissaire qui s’occupe de ce chantier titanesque parachève ainsi une concertation ouverte durant l’automne 2017. A l’ordre du jour des ultimes rendez-vous : la « transition entre l’emploi et la retraite » et les « nouveaux droits en faveur des jeunes et des aidants ».
Les ordonnances d’employeurs et de salariés, au terme de ce long exercice, s’écoutent au moins sur deux points : M. Delevoye leur a octroyer une attention très forte, et les débats virent d’une grande tenue. Frédéric Sève (CFDT) parle d’un processus « de qualité qui a permis de mettre les sujets sur la table ». « Nous avons pu bien travailler lors des rencontres bilatérales, avec des documents qui nous étaient remis plusieurs jours à l’avance, ajoute Pascale Coton (CFTC). Il fallait bien un an et demi pour arriver à un tel projet puisqu’il s’agit de faire converger quarante-deux régimes. »
« Nous avons pu faire le point sur le système et mener des discussions intéressantes, qu’il serait bienvenu de capitaliser lors de la rédaction de la loi, en dépit des désaccords que nous pouvons avoir avec M. Delevoye », déclare Eric Chevée, de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). « Je crois qu’il n’y a pas beaucoup de personnalités qui auraient pu remplir cette mission comme il l’a fait, juge Alain Griset, président de l’Union des sociétés de proximité (artisans, commerçants, professions libérales). Il a bien compris les caractéristiques de nos adhérents. »
Des députés de la majorité, en pointe sur le dossier, se présentent encore plus apologique à l’égard du haut-commissaire. « Jean-Paul Delevoye a su voir le chemin de la pédagogie et de l’explication, ce qui était loin d’être évident », déclare Laurent Pietraszewski, élu LRM dans le Nord. « C’est quelqu’un de bienvaillant, à l’écoute et qui a ouvert toutes les portes. Sa méthode de travail est à reproduire, pour d’autres réformes », ajoute Corinne Vignon, députée macroniste de Haute-Garonne. Présidente du Comité de suivi des retraites et en parlant à titre personnel, Yannick Moreau observe, elle aussi, que la concertation a été approfondie, et qu’elle a donné la possibilité d’approcher « de nombreux sujets avec des documents dont on peut apprécier le sérieux » : « Les personnes suivant la préparation de la réforme – en raison de leurs fonctions parlementaires ou d’expertise, ou encore de journaliste – ont, en effet, pu, après chaque étape, avoir conscience de ces documents, ce qui est rare. »
La réforme de la formation des enseignants est un sujet pas trop connu de la loi « pour l’école de la confiance », administrée par le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer. Choisie en Février, cette loi doit être vérifier en séance publique par le Sénat à partir du 14 mai.
Ce texte envisage surtout des dispositifs de « préprofessionnalisation » des étudiants se dirigeant à l’enseignement, la création d’instituts nationaux du professorat et de l’éducation (INSPÉ) venant se substituer aux actuelles écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ÉSPÉ) et le déplacement du concours, en ce moment en fin de master 1, vers la fin du master 2. Cet ensemble de mesures, dont les conditions de mise en œuvre sont encore dans un grand flou, inquiète les formateurs d’enseignants que nous sommes.
Il représente à nos yeux un danger, pour les élèves comme pour les futurs enseignants, et pourrait déclarer une profonde dévalorisation du métier. Dans sa forme actuelle, le projet, en envisageant le recours massif à des étudiants non qualifiés pour enseigner devant des élèves, est un dévoiement du principe même de la formation professionnelle. Jamais cet expédient n’avait été érigé en principe organisateur de la formation des enseignants et de l’entrée dans le métier.
Suivant le projet, l’emploi de milliers d’étudiants non qualifiés pour faire la classe aura lieu par deux voies : la « préprofessionnalisation », et plus encore la formation dans les INSPÉ, avant le concours d’embauche. La première concernera chaque année 3 000 étudiants, « assistants d’éducation » qui pendant trois ans à partir de la deuxième année de licence « pourront se voir confier des charges d’éducation, de pédagogie et d’enseignement », selon l’article 14 de la loi.
Dans les dispositifs d’initiation au métier d’enseignant qui existent aujourd’hui, les responsabilités données aux étudiants doivent rester en adéquation avec leurs aptitudes. Dans le projet actuel, certaines charges demanderont de réelles compétences d’enseignant sans que la responsabilité exacte des étudiants soit clairement définie : ce sont les enseignements pratiques interdisciplinaires (EPI) et les activités pédagogiques complémentaires (APC), qui contribuent à l’acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture.
Sept avertis, dont d’anciens directeurs de l’entreprise, se présentent à partir de lundi devant le tribunal correctionnel de Paris à la suite de la vague de suicides de salariés entre 2007 et 2010.
Au siège de France Télécom, dans le 15e arrondissement à Paris, le comité exécutif est rassemblé. Les derniers chiffres du trafic des lignes téléphoniques fixes viennent de lui être octroyés. Autour de la table, on veut croire à une erreur. Une dégringolade pareille, c’est impossible. On vérifie. « Les chiffres étaient malheureusement justes », déclare Louis-Pierre Wenes, alors président d’Orange France et numéro 2 de France Télécom.
C’était durant l’automne 2006. Durant l’été, le trafic de la voix sur Internet avait commencé. Sur le marché des télécommunications, ouvert à la compétition depuis la fin des années 1990, de nouveaux opérateurs désorganisaient la vieille maison. Le « dégroupage » imposé en 2002 par la règle européenne leur avait donné accès à la boucle locale – les bandes de fréquence du cuivre. Sur tout le territoire, la guerre s’aggravait à coups d’innovations technologiques et de diminution des tarifs. La dette de France Télécom s’était augmenter, son chiffre d’affaires et ses marges avaient immergé.
Cette situation économique est le cœur de la défense des sept annoncés qui exposent à compter du lundi 6 mai devant le tribunal correctionnel de Paris pour riposter de « harcèlement moral » ou d’entente de ce délit, en leur qualité d’anciens membres de la direction de France Télécom.
Commencer les 673 pages de l’ordonnance de renvoi, c’est choir une liste de prénoms et de noms comme on en voit manifestés sur les monuments aux morts des villages
Entre eux, l’ancien PDG, Didier Lombard, son directeur exécutif, Louis-Pierre Wenes, et le directeur groupe des ressources humaines, Olivier Barberot, pourchassai en tant qu’auteurs primordiaux d’une stratégie d’entreprise « visant à affaiblir les salariés et agents, à créer un climat professionnel anxiogène » et ayant eu « pour objet et pour effet un abaissement des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité » des salariés, un délit fouetté d’un an d’incarcération et de 15 000 euros d’amende. L’entreprise France Télécom, personne morale, est elle aussi révoquée devant le tribunal.
Trente-neuf personnes ont été tenues en qualité de cibles dans ce dossier. Parmi elles, dix-neuf se sont donné la mort entre 2007 et 2010. Ouvrir les 673 pages de l’ordonnance de renvoi scellée de la juge d’instruction Brigitte Jolivet, c’est d’abord effondrer sur une litanie de prénoms et de noms comme on en voit marqués sur les compositions aux morts des villages.
Réunies lundi 6 mai par le premier ministre, plusieurs distributions se présentent sceptiques sur la conduite d’un tel rendez-vous.
Opération récupération. Lors de sa conférence de presse du 25 avril, le Président de la République a accompli la « mobilisation générale pour le travail, l’emploi et ses grandes transitions ». Le chef de l’Etat a convoité y associer les corps intermédiaires qui, depuis le début de la législature, ont la sensation d’être traités comme quantité négligeable. A charge pour le premier ministre d’orchestrer la complicité avec les partenaires sociaux, les associations d’élus et les organisations environnementales. Une première réunion doit avoir lieu lundi 6 mai, dans la matinée à Matignon, sous l’égide d’Edouard Philippe. Objectif fixé par le président de la République : que l’ensemble des protagonistes puissent « proposer d’ici à septembre des solutions concrètes » aux problèmes mis en exergue par le mouvement des « gilets jaunes ».
Le 29 avril, M. Philippe a précisé l’esprit dans lequel se déroulera cette rencontre. Pas question de parler de « conférence sociale » : le terme rappellerait trop les conclaves de l’ère Hollande, durant lesquels « tout le monde s’emmerd[ait] », suivant la formule lancée à l’époque par Jean-Claude Mailly, alors numéro un de FO. L’idée, a souligné M. Philippe, est de travailler « collectivement », de « faire confiance » aux acteurs de la société civile et de se projeter dans l’avenir – quitte à aller un peu au-delà du quinquennat. Il s’agit, selon le premier ministre, de reproduire « à la façon dont nous voulons produire en 2025, à la façon dont nous voulons vivre, dont nous voulons arriver au plein-emploi », a-t-il détaillé, s’inscrivant dans le prolongement de l’intervention de M. Macron, quatre jours en avant.
« Grand gloubi-boulga »
« Personne ne sait ce qu’il y a dedans », présentait néanmoins, vendredi, l’un des participants. A cette date, la liste des thèmes qui seront approchés n’était pas encore connue des organisations d’employeurs et de salariés. « C’est un peu le grand bazar, personne n’a les mêmes éléments », s’étonne également Marylise Léon, la numéro deux de la CFDT. Sur la forme donnée à ce « sommet », plusieurs personnalités invitées se montrent critiques. « Qu’on ait des grand-messes nationales pour lancer le processus, pourquoi pas ? Mais ce type de fonctionnement est complètement dépassé, juge le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux. L’important est ce que l’on va pouvoir faire en régions. » Président de la CFE-CGC, François Hommeril confie être peu enthousiaste à l’idée de participer à « un grand gloubi-boulga de la société civile ». « Ça devient un peu usant d’être considéré sans aucun autre égard, dit-il. La démocratie française, ce n’est tout de même pas sophistiqué : si le pouvoir en place engage une réforme qui touche le monde du travail, les partenaires sociaux doivent être associés. Notre organisation n’a aucune envie de servir de faire-valoir, nous voulons un mandat clair. » Ça risque de être un « cauchemar », se déplore un participant : « J’y vais avec mon iPad. Les gens sont nombreux, ils sont très longs et ils sont très chiants. »
Une sanction financière guette aussitôt les sociétés qui n’ont pas encore édité leur index sur l’égalité femmes-hommes.
C’est désormais officiel : le décret posant à l’amende les sociétés qui n’ont encore pas fait acte de clarté en diffusant leur index sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes est paru le 30 avril au Journal officiel, remettant effectives les punitions promises par le gouvernement. Établi par la loi « avenir professionnel » de septembre 2018, cet index consiste en une série d’indicateurs admettant à l’entreprise de savoir où elle en est en matière de promotion et d’égalité salariale entre ses assistants des deux sexes, afin de mettre en place des mesures correctives si besoin.
Le décret envisage donc une sanction financière afin de sanctionner les employeurs n’ayant encore pas publié cet index. Seules les entreprises de plus de 50 salariés sont concernées par cette obligation. En premier lieu celles de plus de 1 000 salariés. En effet, celles-ci avaient uniquement jusqu’au 1er mars pour diffuser ces données.
Fin avril, sur les quelque 1 300 entreprises intéressées, plus de 80 % avaient publié leur index, selon les données du ministère du travail. Les entreprises ayant au moins 250 salariés jouir de d’un répit supplémentaire, allant jusqu’au 1er septembre. De même concernées, les petites entreprises aux effectifs compris entre 50 et 250 salariés auront jusqu’au 1er mars 2020 pour se mettre en conformité.
Sanction jusqu’à 1 % de la masse salariale
Les sociétés en dehors des clous sont donc méfiants de renvoyer une pénalité, calculée en fonction de leur situation particulière et qui pourra atteindre au maximum 1 % de la masse salariale. « Mais la sanction ne doit être que l’ultime recours une fois que tous les autres moyens ont été épuisés », a prévu Muriel Pénicaud dans Les Echos du 29 avril.
Les employeurs insoumis risquent d’abord de se voir rappelés à l’ordre par l’inspection du travail. Ils devront alors « se mettre en conformité dans un délai d’exécution fixé en fonction de la nature du manquement et de la situation relevée dans l’entreprise et qui ne peut être inférieur à un mois », mentionne le décret. Le délai de six mois maximum pour se poser en conformité, qui figurait dans la version antérieure de l’article R. 2242-3 du code du travail, est rompu – possiblement afin de laisser plus de temps aux entreprises espacées des objectifs fixés.
Depuis l’application de ce dispositif en 2017, les pratiques digitales des salariés n’ont pas réellement changé regrettent les consultants Vincent Baud et Caroline Sauvajol-Rialland .
Le nouvel article L2242-8 du code du travail appliqué depuis le 1er janvier 2017 dans le cadre de la loi travail envisage que chaque entreprise de plus de 50 salariés du secteur privé négocie par an avec ses partenaires sociaux la mise en place de dispositifs de régulation de leurs usages numériques, mais aussi d’actions de formation. A défaut d’accord, une charte simple suffit à contenter le législateur.
Qu’en est-il quinze mois plus tard ? Quelques sociétés parmi les plus grandes ont signé des accords dont l’application semble suivre la même logique que celle des 35 heures en son temps : les mesures ne s’appliquent qu’aux travailleurs qui se sentent concernés ! Pour les autres, les chefs ou ceux qui aspirent à le devenir, pas de transformation. Au même temps, les fins de justice accordant aux salariés le paiement d’heures travaillées non rémunérées et-ou la reconnaissance du préjudice de harcèlement « numérique » se réunissent.
La digitalisation du travail est une révolution du contenu, mais aussi du vécu au travail
Traiter ce sujet de façon défensive revient à passer à côté d’une occasion de premier plan : regarder en face l’activité numérique de ses assistants pour en maîtriser les excès quantitatifs et qualitatifs, n’en conserver que le meilleur au profit de la société comme des salariés ! C’est donc sur la culture digitale des sociétés qu’il faut agir.
En 2013, plus de 71 % des travailleurs avaient un usage professionnel des outils digitaux, pour une moyenne d’utilisation de 4,3 heures par jour. Cette proportion est passé en 15 ans de 40 % ; l’augmentation se poursuit au point que plus d’un salarié sur deux dispose actuellement d’une adresse mail professionnelle, qu’un quart d’entre eux travaille avec un ordinateur portable et 45 % avec un téléphone portable.
Conflit de valeurs
Les outils ne font que se varier : téléphones, mails, messageries instantanées, réseaux sociaux d’entreprise, applications de travail en mode projet… La digitalisation du travail est une révolution du contenu mais aussi du vécu au travail comparable à ce qu’ont été préalablement sa mécanisation, son automatisation, son informatisation et sa robotisation. A deux grandes différences près.
Tout d’abord, ce changement technologique est en prise directe avec la vie privée des salariés, alors que toutes les autres apercevaient leur effet direct s’interpréter au temps et au lieu de travail. Le digital bouleverse les équilibres personnels en plaçant les salariés face à un conflit de valeurs : dois-je répondre à mon manageur alors que je suis en train de dîner un samedi soir ? Dois-je examiner mes mails pendant mes congés ? Ultérieurement, les salariés n’ont pas été préparés à bien utiliser les outils numériques. Une faiblesse d’autant plus grave qu’ils sont passés du statut d’outils de travail à celui d’un vrai mode de travail.
Le gouvernement et la majorité désirent définir le cadre juridique pour ces personnes dans le cadre du projet de loi d’administration des mobilités.
Établis dans un style de no man’s land juridique, les salariées des plates-formes numériques sont peut-être sur le point d’en sortir. Le gouvernement et des députés macronistes aboutissent, en effet, leur réflexion sur ce dossier crucial, puisqu’il touche notre modèle social, très amplement structuré autour du salariat. L’objectif est double : attendrir l’activité des entreprises et étoffer les droits des individus qu’elles embauchent. Des agencements devraient être pris dans le projet de loi d’orientation des mobilités, maintenant en cours d’examen au Parlement.
Depuis certaines années, on vie dans l’émergence d’une nouvelle catégorie d’actifs, payés à la tâche par des plates-formes numériques (comme Uber ou Deliveroo) en contrepartie d’un service soutenu à un consommateur. Qu’ils soient livreurs à vélo ou chauffeurs, fastueusement de ces travailleurs « ubérisés » relèvent du régime du microentrepreneur, pour lequel il existe une « présomption de non-salariat » : différemment dit, ils sont considérés comme des indépendants et ne bénéficient pas de la couverture sociale agréé à un travailleur « ordinaire ». De son côté, la plate-forme qui met en relation « son » salarié avec un client est soumise à des prélèvements moins lourds qu’une société dont la main-d’œuvre est salariée.
Ces changements encaissent l’inquiétude, surtout parmi les syndicats, qui y voient un détricotage insidieux du code du travail. Elles ouvrent aussi sur des contentieux, à l’initiative – en particulier – de ces « ubérisés » : ils sont, en effet, quelques-uns à avoir sollicité à la justice de requalifier en contrat de travail leur relation avec les plates-formes. La quasi-totalité d’entre eux ont d’abord été déboutés. Mais deux conclusions récentes, de la Cour de cassation et de la cour d’appel de Paris, leur ont donné gain de cause, ébranlant, du même coup, les grandes enseignes – Uber et consorts : celles-ci ont peur, dorénavant, que leur modèle économique soit déstabilisé.
Faire une charte
C’est donc dans cette disposition que le gouvernement et des élus LRM ont déclenché une entente sur le sujet. Une démarche similaire avait été engagée en 2018 : elle avait débouché sur l’adoption d’un amendement à la loi « avenir professionnel », soutenu par Aurélien Taché, député La République en marche (LRM) du Val-d’Oise. Invalidé par le Conseil constitutionnel, la modification en question a été réintroduite, sous une forme réécrite, dans le projet de loi d’orientation des mobilités. Il donne la possibilité aux plates-formes d’établir une « charte » sur leur « responsabilité sociale », dans laquelle sont définis leurs « droits et obligations » ainsi que ceux des « ubérisés » utilisés par elles.
« Bonjour, risque mildiou sur la parcelle A. Mardi 23 avril. » Il est 8 heures et le responsable du Mas digital de SupAgro Montpellier vient d’acquérir un texto d’alerte. Établi sur le domaine du Chapitre, à Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault), le Mas numérique est un laboratoire vivant de la viticulture 4.0, soutenu par une quinzaine d’entreprises partenaires. Ici il n’y a pas encore de robot ramasseur ou de tracteur autonome, mais des outils numériques déjà exploités et mis à l’épreuve de la réalité du terrain. « Il ne faut pas croire que le numérique va régler tous les problèmes de l’agriculture, pose d’emblée Thomas Crestey, garant du site, mais le potentiel est important. Notre cheval de bataille, c’est d’être rationalistes et de trouver des solutions accessibles et simples pour aider les agriculteurs et les former. »
La station météo, enfoncée en plein milieu du domaine, fait partie des outils branchés symboliques de l’agriculture digitale, de plus en plus adoptée par les agriculteurs. Elle calcule en constance la température, l’hygrométrie, la pluviométrie, l’humectation des feuilles… Des données précieuses qui admettent de nourrir un algorithme de calcul de risque de développement des maladies de la vigne. Mais aussi de mesurer précisément la vitesse du vent et d’honorer la codification qui impose de ne pas traiter au-dessus de 19 km/h.
Détermination et tâtonnement
Dans « la réserve phyto », un boîtier admet de scanner tous les produits utilisés chaque jour. Un gain de temps immense pour les agriculteurs qui doivent faire une déclaration pour chaque traitement. Du fait des multiples codifications et engagements, plus de la moitié dédient entre 5 et 10 heures par semaine aux démarches administratives, selon un baromètre Terre-net Bva réalisé en 2015. « Le boîtier est ultérieurement embarqué dans le tracteur avec une balise GPS, ce qui permet de suivre précisément si les traitements ont bien été effectués et les zones traitées, détaille Thomas Crestey. Ce type d’outil est très précieux pour alléger la charge de travail des agriculteurs tout en garant aux attentes de traçabilité. »
« Le numérique va nous admettre d’accélérer la transition, mais ça n’est pas une baguette magique »
Gagner en détermination, la grande valeur ajoutée du numérique. Avec les objectifs du plan Ecophyto 2 de diminuer de 50 % l’utilisation de pesticides d’ici 2025, les exploitations sont contraintes de réaliser des dosages continuellement plus minutieux. Pour appeler l’équivalent de la surface d’un terrain de foot, l’équipe du Mas numérique appose une quantité de produits phytosanitaires qui tiendrait dans une canette de soda. Les tracteurs doivent ensuite rouler à 5 km/h sans excès de vitesse pour apposer la même quantité partout. « L’opinion publique est vent debout contre les pesticides, mais il faut comprendre la réalité de l’agriculteur, ajoute Thomas Crestey. Le passage ne peut pas se mener en deux ans. Nous procédons par tâtonnements et surtout nous travaillons avec le vivant. En agriculture nous n’avons qu’un seul essai par an. Le numérique va nous admettre d’accélérer la transition, mais ça n’est pas une baguette magique. »
Ici, comme dans plusieurs exploitations viticoles, les tracteurs ont plus de 20 ans. Dans ces conditions, comment répondre à ces objectifs de détermination sans de lourds investissements dans des machines dernier cri ? L’équipe de Thomas Crestey mise sur de petits objets connectés. Sur le tracteur un débitmètre et un GPS ont été établis. Le conducteur peut suivre sur son smartphone si le flux d’épandage est constant et la vitesse de 5 km/h respectée. Des capteurs ont été additionnés sur les tracteurs pour alerter le chef d’exploitation toutes les 200 heures d’utilisation afin de procéder à sa révision. Un moyen simple de prévoir les casses machines.
Des solutions multiples
Mais pour voir tout le potentiel de l’agriculture digital, il faut se tourner vers les autres filières. « Dans les grandes cultures et surtout l’élevage bovin, [ces outils] sont plus communs dans les usages, juge Guillaume Vigneron, ingénieur innovation chez Smag, un éditeur de logiciels pour l’agriculture collaborateur du Mas numérique. La filière viticole est la dernière à [les] intégrer. » Selon les chiffres de l’Observatoire des usages de l’agriculture numérique, 77 % des éleveurs de vaches laitières utilisent des outils numériques pour la gestion de la reproduction.
« Agriculteur, c’est un métier de terrain, humain, cyclique, varié, en pleine mutation »
Devant cette explosion de solutions numériques, les agriculteurs contrôlent le manque de communication entre les outils. « Ils sont parfois obligés de réintégrer plusieurs fois les données dans différents outils, ce qui est une perte de temps infini, pointe Guillaume Vigneron. L’objectif est de faire transmettre les solutions ensemble. On voit aussi apparaître le métier de designer UX et UI dans notre secteur pour abréger les interfaces, les rendre plus ergonomiques. » Côté conscription, tous les professionnels espèrent que le développement des nouvelles technologies va éveiller des vocations. « Il y a un décalage important entre la reproduction du métier d’agriculteur et la réalité, regrette Thomas Crestey. C’est un métier de terrain, humain, cyclique, varié, en pleine mutation. Là où les produits phytosanitaires acceptaient de ne pas trop comprendre ce qui se passe aux champs, il va falloir des têtes pensantes pour analyser les données et prendre les bonnes décisions. »