La rémunération de base est une source de bien-être pour ses attributaires en Finlande

Helsinki dresse un premier bilan du projet, qui ajustait à donner à des chômeurs une allocation sans condition. L’objectif est positif sur la qualité de vie, mais sans effet sur le taux d’activité.

L’expérimentation finlandaise de la rétribution de base avait attiré l’attention du monde entier sur ce petit pays de 5,5 millions d’habitants. Vendredi 8 février, les chercheurs chargés de superviser le projet, mené du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2018, en ont présenté une évaluation préliminaire couvrant la première année. Résultat : si le revenu de base n’a pas permis d’augmenter le taux d’activité de ses bénéficiaires, il a amplement amélioré leur bien-être.

Lancé par le gouvernement de coalition, dirigé par le centriste Juha Sipilä, le dispositif pointait à tester de nouvelles idées pour réformer un régime de la sécurité sociale d’une complexité parfois kafkaïenne et augmenter le taux d’emploi, le plus faible des pays nordiques.

Fin 2016, 2 000 Finlandais à la recherche d’un travail ont été tirés au sort pour collaborer au projet, sans pouvoir refuser. Agés de 25 à 58 ans, ces cobayes ont perçu pendant deux ans une indemnité de 560 euros non imposée, séparément de leurs autres ressources, en remplacement de l’allocation chômage.

En meilleure santé et moins stressés

L’application était contestée. Ses opposants arguaient que le revenu de base risquait d’encourager les chômeurs à la paresse. Ses partisans, au contraire, étaient convaincus qu’il les remettrait en selle. Finalement, « ce n’est ni l’un, ni l’autre », constate le professeur Olli Kangas, un des pères du projet, guère étonné du résultat qui « correspond à ce qui a pu être observé dans de précédentes expérimentations menées aux Etats-Unis et au Canada, dans les années 1970 ».

Donc, selon les premières suites de l’évaluation, 43,7 % des personnes ayant reçu le revenu de base ont occupé un emploi pendant la première année du projet, contre 42,5 % pour les membres d’un groupe témoin, composé de 2 000 chômeurs tirés au hasard. En moyenne, les premiers ont travaillé 49,64 jours dans l’année, contre 49,25 pour les seconds. « Il est possible toutefois que les chiffres soient différents sur le long terme, et que les gens réagissent au bout d’un an », remarque M. Kangas.

Les chercheurs, simplement, ont pu examiner des différences : ceux qui ont perçu le revenu de base sont plus nombreux que les chômeurs à se dire en bonne santé (55 %, contre 46 %) et sont moins stressés (17 % contre 25 %).

La RATP perd une opportunité dans un débat du travail hors norme

La justice vient de commander un revers à la RATP et au ministère de l’intérieur dans des conflits du travail entièrement atypiques. En 2018, l’entreprise publique avait renvoyé deux de ses agents au motif qu’ils auraient fait courir un risque à la sécurité de leurs collègues et des usagers. Sa décision était étayée sur deux avis rendus par un service rattaché au directeur général de la police nationale. Les avis en question ont été récemment annulés par le tribunal administratif de Paris, ce qui remet en cause le choix du transporteur de se séparer de ces salariés.L’un des différends intéresse M. X : embauché, il y a six ans, à la RATP en qualité d’opérateur de maintenance, il avait demandé sa mutation en vue de devenir conducteur de métro. L’autre contentieux implique M. Y, recruté en novembre 2017 pour conduire le métro. L’un comme l’autre ont donc été congédiés en 2018, à quelques mois d’intervalle, dans des circonstances analogues : ils ont d’abord été relevés de leurs fonctions avant de recevoir, quelques jours plus tard, une lettre de résiliation.Pour couvrir la rupture du contrat de travail, la direction s’est emportée d’une enquête administrative, qu’elle avait réclamée au ministère de l’intérieur. Cette investigation avait abouti à la conclusion que le comportement des deux hommes n’était pas « compatible » avec le poste convoité ou occupé, sans qu’un motif soit donné.Métiers jugés sensibles

Une telle action est prévue par la loi du 22 mars 2016. Elle offre la possibilité aux sociétés de transport de voyageurs de contrôler le pedigree de personnes qui désirent travailler chez elles ou de salariés déjà en place qui veulent changer d’affectation. Ces contrôles ne sont admises que pour certains métiers jugés sensibles – par exemple chauffeur de bus ou agent de sécurité.

Le but est de se garantir que les intéressés ne représentent pas une menace pour les personnels et la clientèle. C’est le Service national des enquêtes administratives de sécurité (Sneas), placé sous la tutelle du ministère de l’intérieur, qui se charge de « scanner » le profil des personnes. Il s’appuie, particulièrement, sur des fichiers relatifs « à la prévention du terrorisme ou des atteintes à la sécurité et à l’ordre publics ».

M.X et M. Y ont été surpris d’apprendre le soupçon pesant sur eux. Et le traitement qui leur a été réservé les a profondément choqués. Primo : ils ignoraient tous des raisons pour lesquelles un avis d’incompatibilité avait été émis à leur égard. En outre, l’avis accusé ne leur avait pas été notifié et la RATP avait mis fin à la relation de travail, sans qu’ils puissent se défendre. S’estimant victimes de pratiques expéditives qui ont violé leurs droits, ils se sont tournés vers le tribunal administratif de Paris afin d’obtenir l’invalidation de la sentence du Sneas.

Argumentation différent

La démarche promise a tourné à leur avantage. S’agissant de M. X, le juge a estimé que le ministère de l’intérieur n’avait produit « aucun élément factuel » permettant de démontrer que le salarié « constituerait une menace pour la sécurité ou l’ordre public ». Du fait de cette « inexacte application » de la loi, le requérant est « fondé » à solliciter l’annulation de l’avis d’incompatibilité.

Quant à M. Y, l’argumentaire du tribunal est distinct mais parvient au même résultat : l’agent « aurait dû avoir notification de l’avis d’incompatibilité » et ce dernier aurait dû, de surcroît, « être motivé ». Or, tel n’a pas été le cas. Dans ces conditions, M. Y est, lui aussi, en droit de réclamer « l’annulation » de l’avis du Sneas.

Le ministère de l’intérieur et la RATP se bornent à déclarer qu’ils ont pris acte des jugements du tribunal, prononcés le 31 janvier. Un appel sera-t-il interjeté ? Pas de réponse, à ce stade. Toute laisse à penser, par ailleurs, que la RATP n’a pas l’intention de revenir sur sa décision de congédier les deux hommes.

La bataille judiciaire continue

Ce licenciement, M. X et M. Y le contestent, en parallèle, devant la justice prud’homale. Pour le premier, l’audience, au début prévue vendredi 8 février, a été repoussée au 6 mars. Son avocat, Me Raphaël Kempf, « ne voi[t] pas comment les prud’hommes ne pourraient pas tenir compte de la décision du tribunal administratif ». Autrement dit, la logique voudrait, selon lui, que la RATP soit condamnée, la rupture du contrat de travail ne reposant sur aucune « cause réelle et sérieuse ».

M.Y, lui, est déjà passé devant les prud’hommes, mais il a été débouté, le 1er février. Son conseil, Me Thierry Renard, avait sollicité que les débats soient rouverts de manière à prendre en considération l’invalidation de l’avis d’incompatibilité, mais il n’a pas été suivi. Il va donc faire appel.

Outre M. X et M. Y, quatre autres hommes, au moins, ont été remerciés de la même manière par la RATP. Epaulés par Me Thierry Renard, trois d’entre eux ont déjà promis des actions en référé devant les prud’hommes, qu’ils ont perdues. Les conclusions ont été rendues avant le jugement du tribunal administratif de Paris. Mais la bataille va continuer, affirme Me Thierry Renard : des requêtes sur le fond ont été déposées. Celui-ci compte aussi s’adresser au juge administratif afin que soit annulé l’avis d’incompatibilité émis à l’encontre de ses clients.

 

KLM lutte pour protéger son autonomie vis-à-vis d’Air France

Benjamin Smith, directeur général d’Air France-KLM (au centre), et Pieter Elbers (à gauche), PDG de KLM, en visite à l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol, en octobre 2018.
Benjamin Smith, directeur général d’Air France-KLM (au centre), et Pieter Elbers (à gauche), PDG de KLM, en visite à l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol, en octobre 2018. Elodie Gregoire / Air France

Une partie des salariés de la compagnie néerlandaise redoute que le mandat de leur patron ne soit pas renouvelé par Air France-KLM en avril.

Un parfum de fronde flotte dans l’air chez KLM. Une partie des salariés de la compagnie néerlandaise se mobilise pour parvenir au renouvellement, en avril, du mandat de son président, Pieter Elbers. Une pétition lancée vendredi 1er février a déjà recueilli environ 9 000 signatures sur les 32 000 salariés de KLM.

Aux Pays-Bas, certains prêtent à Benjamin Smith, le directeur général d’Air France-KLM, la volonté de bénéficier de l’occasion pour s’en débarrasser. Une inquiétude née il y a quelques semaines, à l’occasion d’une visite à l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol. Face aux cadres et aux personnels de la compagnie néerlandaise, dont il a salué les résultats, il n’a jamais prononcé le nom du patron de KLM.

En décembre, dans un entretien au site spécialisé Luchtvaartnieuws, M. Elbers avait rappelé son souhait de conserver ses fonctions « pour quatre ans de plus, au moins ». Du côté d’Air France-KLM, on fait savoir que « des discussions » ont lieu entre les deux conseils d’administration d’Air France-KLM et de KLM. Toutefois, M. Smith « n’a encore pris aucune décision ». Selon nos renseignements, celle-ci ne devrait pas intervenir avant la publication des résultats annuels du groupe, prévue le 20 février. « Il n’y a pas d’urgence. Le calendrier, c’est fin avril », fait-on savoir de bonne source.

Aux yeux du patron d’Air France-KLM, Pieter Elbers exposerait deux défauts rédhibitoires. D’une part, il a fait figure de rival potentiel. A la suite de la démission de Jean-Marc Janaillac d’Air France-KLM, en mai 2018, il a longtemps été montré comme un possible successeur. « Il n’y a pas de question d’ego », veut-on croire chez Air France-KLM. D’autre part, il serait devenu gênant sur le plan stratégique.

« Créer des synergies et de la valeur »

Depuis son arrivée, à l’été 2018, à la direction générale d’Air France-KLM, Benjamin Smith a pris les commandes d’Air France. Il a débarqué sans états d’âme deux des principaux cadres de la compagnie, le directeur général Franck Terner et le directeur des ressources humaines Gilles Gateau.

Dans la foulée, il a appelé une nouvelle équipe dirigeante, avec « la volonté de garder la main sur Air France », note un syndicaliste de la compagnie. Outre ce renouvellement des cadres, M. Smith a taillé dans les marques du groupe, actant l’éloignement de Joon et le passage sous pavillon Air France de Hop !, filiale axée sur les vols court-courriers et les transversales régionales.

« Chômage en masse mais emplois non pourvus : où est le défaut ? »

 

De nombreuses offres d’emploi restent non pourvues en France.
De nombreuses offres d’emploi restent non pourvues en France. PÔLE EMPLOI/ FLICKR/CC BY 2.0

Dans sa chronique, Gilbert Cette l’économiste estime que pour accepter de résoudre les difficultés de recrutement, il faut réformer la formation professionnelle et rendre certaines professions plus attractives.

La simultanéité des difficultés de recrutement et d’un chômage en gros soulève des interrogations sur la concordance entre la formation des actifs et les besoins des entreprises. Ce thème faisait l’objet d’une conférence structurée le 18 décembre 2018 par la direction des études et des statistiques (DARES) du ministère du travail. Il ressort des travaux présentés, comme par exemple ceux de Michael Orand (DARES), que cette coexistence traduit en réalité des situations contrastées selon les secteurs, et n’appelle donc ni les mêmes réponses, ni des procès simplistes sur l’inertie des demandeurs d’emploi ou les exigences démesurées des employeurs.

Les fortes créations d’emplois sur les dernières années se sont interprétées dans de nombreux pays européens par l’augmentation depuis 2015 des difficultés de recrutement signalées par les entreprises, jusqu’à des niveaux récents depuis dix ans. Cela n’est guère étonnant dans des pays à faible taux de chômage, comme l’Allemagne, où le marché du travail est globalement en tension. Elles sont plus surprenantes en France qui pâtit toujours d’un chômage massif. Elles y font craindre l’émergence de freins à la croissance et donc aux créations d’emploi et à la baisse du chômage, qui seraient liées à un mauvais fonctionnement du marché du travail.

Fortes tensions

La « courbe de Beveridge » – du nom de l’économiste et politicien britannique William Beveridge (1879-1963), théoricien et pionnier de l’Etat-providence – fournit une représentation synthétique de la qualité de ce fonctionnement : elle associe le taux de chômage aux offres d’emploi non satisfaites. Cette relation est négative, une diminution du taux de chômage se traduisant logiquement par de plus fortes tensions. Or, comme l’a montré une nouvelle étude (Le marché du travail français est-il en tension ?, de Françoise Drumetz et Rémy Lecat, Bloc-note Eco, Banque de France), on observe un déplacement de cette courbe vers le haut sur les années récentes en France : les tensions sont plus fortes alors que le taux de chômage reste le même, ce qui certifierait de la dégradation du fonctionnement du marché

RSA : 1 bénéficiaire sur 4 toujours pas guidé au bout de 6 mois

Une personne présente les brochures informant sur le RSA mises à la disposition des usagers dans un centre de la CAF à Paris.
Une personne présente les brochures informant sur le RSA mises à la disposition des usagers dans un centre de la CAF à Paris. FRANCOIS GUILLOT / AFP

Selon une étude de la Drees, 17 % des personnes profitant du revenu de solidarité active n’ont pas été orientées par leur conseil départemental six mois après leur inscription.

Le nombre de bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) « orientés vers un parcours d’insertion » a doucement amélioré en 2017, mais près d’un quart n’était toujours pas accompagné au bout de six mois, selon une étude publiée jeudi 7 février par la Drees.

La quasi-totalité des attributaires du RSA et de leurs conjoints, soit 2,1 millions de personnes majeures, étaient fin 2017 « soumis aux droits et devoirs associés à cette prestation », rappelle le service statistique des ministères sociaux.

Mais le droit à un complément et l’obligation de recherche d’emploi restaient théoriques pour 17 % des intéressés, qui n’avaient pas été « orientés » par leur conseil départemental.

Variable selon le département

Ce rapport a doucement baissé par rapport à fin 2015 (20 %) et dépend logiquement de « l’ancienneté dans le RSA » : avant 6 mois elle culmine à 50 %, entre 6 mois et un an elle atteint 23 %, au-delà d’un an elle concerne encore 12 % des bénéficiaires.

Le taux de complément varie aussi fortement d’un département à l’autre : Paris et la Sarthe approchent du sans-faute avec 98 %, quand les Ardennes sont à la peine avec 48 %.

Les écarts sont encore plus formulés pour le délai « entre la date de demande du RSA et celle d’orientation vers un chemin d’orientation », qui était en moyenne de 94 jours en 2017, avec un minimum de 32 jours en Eure-et-Loir et un maximum de 162 jours dans l’Yonne – cette donnée n’étant disponible que pour la moitié des départements.

 

Salariés aléatoires : comment les contrats courts ont été augmenté en trente ans

Suivant les derniers chiffres de l’Insee, la proportion de salariés embauchés en contrat court s’est fixée depuis les années 2010 après avoir été multipliée par quatre.

En 2017, 1,2 million de personnes « en emploi » ont utilisé un contrat court – moins de trois mois –, que ce soit en CDD ou en mission d’intérim. Cela représente 4,4 % de tous les salariés à un instant T de l’année 2017. Cependant si, à un instant donné, les contrats courts sont très minoritaires dans l’emploi, ils représentent près de 75 % des embauches (hors intérim), contre 55 % en 2004, un salarié pouvant être embauché plusieurs fois dans l’année en contrat court.

Cette augmentation en trente-cinq ans cache d’importants écarts entre les différentes catégories socioprofessionnelles. Ainsi, chez les ouvriers, la part de contrats courts est de 10,6 %, bien plus élevée que celle que l’on retrouve chez les cadres (1,5 %). Mais, même à l’intérieur de ces catégories, les disparités peuvent apparenter à des gouffres.

Chez les ouvriers, on monte à 22,4 % chez les « ouvriers non qualifiés de type industriel » ou 15,6 % chez les ouvriers agricoles. A l’inverse, chez les cadres, cette part explose à 16,4 % dans les « professions de l’information » ou celles « des arts et des spectacles », voire la restauration, où il existe la éventualité d’embaucher en CDD d’usage (pour des besoins ponctuels ou occasionnels, il n’est soumis à aucun délai de carence et ne donne pas droit à une prime de précarité en fin de contrat).

Chez tous les salariés intéressés par les contrats courts, la proportion de ceux qui vivent avec moins de 1 000 euros par mois est plus élevée que dans le reste de la population « en emploi ». Ils sont environ 17 % à être en dessous de ce seuil, que l’Insee observe comme un seuil de pauvreté, contre 8 % pour les personnes qui occupent un emploi en France.

 

l’AFPA contrainte à se joindre ou à disparaître par la Cour des comptes

Face aux difficultés financières, l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) se retrouve devant à un choix très simple : soit « elle évolue en profondeur », soit « elle est vouée à disparaître ». Voilà le constat sans appel que dresse la Cour des comptes, dans son rapport annuel diffusé mercredi 6 février. La haute juridiction estime, en effet, qu’« une restructuration de grande ampleur, à mener sans délai, (…) est nécessaire pour redresser la situation » de cet établissement public, qui emploie environ 8 000 personnes et affiche « une perte d’exploitation cumulée » de près de 508 millions d’euros entre 2013 et 2017.

En 2017, les deux tiers des sans-emploi ayant effectué un stage à l’AFPA ont décroché un emploi « au cours des six mois suivants ».

Une telle défaite est difficile à admettre pour « un opérateur de référence » comme l’AFPA. Celle-ci peut se prévaloir d’un « savoir-faire dans le domaine pédagogique » qui est connu et elle dispose d’un réseau de « plateaux techniques » à travers le territoire sans équivalent. Ses performances en matière d’insertion professionnelle sont au-dessus de la moyenne : ainsi, en 2017, les deux tiers des chômeurs ayant effectué un stage à l’AFPA ont décroché un emploi « au cours des six mois suivants ». De surcroît, elle « joue un rôle important dans la formation des moins qualifiés » et anime un programme d’accompagnement en faveur de réfugiés qui produit des résultats très intéressants.

Contre tous ces atouts, l’agence est sur la pente du déclin depuis une dizaine d’années. Deux facteurs essentiels ont pesé : l’ouverture à la concurrence de la formation professionnelle et le transfert aux régions des compétences sur cette thématique. Pour l’AFPA, cette répartition des cartes s’est traduite par une baisse des commandes qui lui sont adressées. Dans le même temps, sa « compétitivité » s’est érodée, du fait de « coûts de structure trop élevés ». Les dépenses de personnel représentaient 62 % des charges d’exploitation en moyenne, sur la période 2013-2017. Un poids lié à la présence de nombreux cadres dans les effectifs (33 %, soit presque vingt points de plus que la moyenne calculée dans les autres organismes de formation professionnelle).

Des « défaillances » dans son « organisation »

La direction a essayé de corriger le tir, avec l’aide des pouvoirs publics, en engageant une « refondation » en 2012. Sans succès. Ce qui démontre « une incapacité à s’adapter ». L’AFPA est responsable de cet état de fait, avec des « défaillances » dans son « organisation » qui n’ont pas été traitées. Mais l’État n’est pas exempt de reproches puisque son action s’est bornée, durant des années, à renflouer l’AFPA en injectant des dizaines de millions d’euros, sans fixer de cap clair, aux yeux de la Cour.

« Après une décennie d’atermoiements coûteux », un « plan de transformation » a « enfin » été présenté en octobre 2018. Il prévoit, à ce stade, la suppression de 1 540 emplois et la création de 600 postes ainsi que la fermeture d’une quarantaine de sites. L’offre de services sera renouvelée, tout en restant concentrée sur le cœur de métier de l’établissement : les publics espacés de l’emploi et ceux qui évoluent vers d’autres horizons professionnels. En dépit de ces mesures, que la Cour approuve, « l’avenir de l’AFPA est loin d’être assuré », d’autant que son chiffre d’affaires va continuer de décroître, à court terme. Il lui dépendra donc de « revoir [son] modèle économique, pour le rendre compétitif » et de « restaurer [sa] rentabilité ».

De son côté, l’État devra « pleinement assumer son rôle de tutelle en accompagnant » la mutation de l’agence. Toute nouvelle aide financière qu’il lui accordera devra être préparée « à des objectifs précis de résultat financier » : s’ils ne sont pas atteints, « la fermeture » de l’opérateur sera à envisager, pour les magistrats de la rue Cambon. Difficile d’être plus clair.

 

Délit au travail détaché : la Cour des comptes appelle à une plus grande détermination

Dans son rapport annuel exposé mercredi, la juridiction financière estime que le système de sanctions de la France est trop faible contre ce type d’emploi en développement.

Des améliorations ont été accomplies pour combattre la fraude au travail détaché, mais il subsiste d’« importantes marges d’amélioration ». Dans son rapport annuel, la Cour des comptes suggère plusieurs pistes afin d’endiguer le phénomène, synonyme de droits violés pour les salariés, de concurrence déloyale pour les entreprises et de recettes perdues pour la Sécurité sociale.

En 2017, quelque 516 000 personnes ont été utilisées en France dans le cadre d’un détachement – procédure qui permet à une société européenne d’envoyer du personnel dans un autre Etat membre de l’Union, pour une mission temporaire. Les patrons intéressés sont tenus de respecter le « noyau dur » du code du travail applicable dans le pays d’accueil – c’est-à-dire un corpus de règles fondamentales sur le smic, la durée maximale de travail, etc. En revanche, le travailleur détaché reste affilié au système de protection sociale du pays d’origine, avec des taux de cotisation qui sont souvent inférieurs à ceux pratiqués dans l’Hexagone. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles le détachement est régulièrement critiqué, au motif qu’il inciterait l’importation de main-d’œuvre à moindre coût, au détriment d’entreprises tricolores qui ne peuvent pas lutter à armes égales.

En France, l’appel à cette forme d’emploi, qui s’est beaucoup développée depuis l’élargissement de l’Union aux pays d’Europe centrale et orientale, se révèle « significatif » dans plusieurs secteurs : l’agriculture, en tout premier lieu, mais aussi le BTP et, dans une moindre mesure, l’industrie, énumère la Cour des comptes. Ce sont les Portugais qui œuvrent le plus fréquemment sous ce régime juridique, devant les Polonais, les Allemands et les Roumains (pour l’exercice 2017). Fait très étonnant : les Français arrivent en cinquième position ; les sociétés qui les emploient de cette façon sont principalement implantées au Luxembourg, en Allemagne, en Belgique et… à Monaco !

« Ce n’est pas le statut en lui-même de travailleur détaché qui pose problème », observe la haute juridiction. Mais il se trouve que les règles encadrant le dispositif sont souvent foulées au pied : « omission de formalités obligatoires » (par exemple la « déclaration préalable »), « non-respect du “noyau dur” » du code du travail (avec des horaires à rallonge et des rémunérations dues qui ne sont pas versées), infractions plus complexes – des personnes sont détachées alors que leur activité en France est durable et ne peut donc pas relever du détachement… Précision importante : ces pratiques « font toutes intervenir un bénéficiaire final installé » dans l’Hexagone. Différemment dit, des travailleurs tricolores s’associent à de telles combines et en tirent profit.

Les entreprises doivent avoir un référent contre le harcèlement sexuel

Depuis le début de 2019, les comités sociaux et économiques (CES) nécessitent désigner leur interlocuteur au sein de l’entreprise. Cependant, cette avancée sociale est plus facile à établir dans les grandes que dans les moyennes et petites entreprises.

« La loi travail du 8 août 2016 a partiellement modifié la charge de la preuve en matière de harcèlement sexuel : c’est à l’employeur de prouver que les faits reprochés par la victime présumée de harcèlement ne sont pas fondés »
« La loi travail du 8 août 2016 a partiellement modifié la charge de la preuve en matière de harcèlement sexuel : c’est à l’employeur de prouver que les faits reprochés par la victime présumée de harcèlement ne sont pas fondés »

Tandis que l’annulation du sexisme au quotidien dont sont victimes de nombreuses femmes n’en terminent plus de pleuvoir, la loi du 5 septembre 2018 « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » a apporté de nouveaux moyens d’interdire les droits des salariés victimes de harcèlement sexuel au travail. Un référent « harcèlement sexuel et agissements sexistes » doit ainsi être désigné au sein de tous les Comités sociaux et économiques (CSE) depuis le 1er janvier.

Cette nouvelle instance spécifique du personnel doit être mise en place dans toutes les entreprises d’au moins 11 salariés d’ici au 1er janvier prochain. Le référent « harcèlement sexuel et agissements sexistes » est indiqué par les membres du comité, pour la durée de son mandat. Les entreprises d’au moins 250 salariés sont doublement concernées, puisqu’elles doivent désigner un second référent « chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes », indique le texte de loi.

« Les modalités de sa désignation par l’employeur sont libres », déclare Denis Lesigne, directeur Capital Humain chez Deloitte. « La désignation de référents en matière de harcèlement sexuel dans l’entreprise est une vraie avancée, car ils peuvent être un phare dans la tempête pour les victimes, considère Me Blanvillain, avocate au sein du cabinet Aguerra avocats, spécialisé dans le droit du travail et membre du réseau Eurojuris. Cela va aussi dans le sens de la jurisprudence : l’entreprise n’a pas seulement un devoir de prévention, mais aussi de réaction ».

Implication de l’employeur

La loi travail du 8 août 2016 a relativement modifié la charge de la preuve en matière de harcèlement sexuel : c’est à l’employeur de prouver que les faits reprochés par la victime présumée de harcèlement ne sont pas fondés. Encore faut-il que les employeurs soient avertis de leurs nouvelles obligations. « Les entreprises sont à peine au courant de la nécessité de désigner des référents », regrette Me Blanvillain.

Protection individuelle : quelle implication de l’employeur ?

« L’employeur devra utiliser des dispositifs, des mécanismes, des appareils ou des installations qui (...) sont capables d’assurer la protection des salariés contre les risques professionnels et d’en limiter ainsi les conséquences »
« L’employeur devra utiliser des dispositifs, des mécanismes, des appareils ou des installations qui (…) sont capables d’assurer la protection des salariés contre les risques professionnels et d’en limiter ainsi les conséquences » Philippe Turpin / Photononstop

Le code du travail à travers le « document unique  » convoque que tout employeur doit saisir des mesures de sécurité ad hoc pour assurer la santé physique et mentale de ses salariés.

Question de droit social. Tout patron est tenu de supprimer ou de réduire les risques professionnels afin d’assurer la sécurité et de protéger la santé physique et mentale des salariés de sa société, y compris des travailleurs temporaires. Pour ce faire, il doit prendre les mesures de sécurité ad hoc. Elles doivent être mises en œuvre, conformément à des principes généraux de prévention énumérés par le code du travail, dans un inventaire transcrit des risques propre à chaque unité de travail. C’est ce qu’on appelle le « document unique ».

L’employeur devra utiliser des dispositifs, des mécanismes, des appareils ou des installations qui, par leur conception, leur agencement et matériaux constitutifs utilisés, sont capables de garantir la protection des salariés contre les risques professionnels et d’en limiter ainsi les conséquences. Les équipements de protection sont, en principe, intégrés ou ajoutés aux moyens de production ou aux postes de travail.

Il s’agit de « protection collective », lorsque les dispositifs assurent indistinctement la sécurité du salarié affecté au poste et celle des autres personnes présentes à proximité : par exemple, un sol antidérapant pour prévenir le risque de chute sur un sol glissant ou l’encoffrement des machines avec des matériaux adaptés, pour lutter contre le bruit.

Résolu par le code du travail

Si l’analyse obligatoire par l’employeur en révèle l’exigence, ces mesures collectives peuvent être complétées par un ou plusieurs équipements de protection individuelle (EPI) : des lunettes de protection, des gants de manutention, des vêtements de pluie, des casques de chantier, des harnais antichute, des appareils respiratoires à ventilation assistée, etc.

L’équipement de protection individuelle est défini dans le code du travail. Selon l’article R.233-83-3, c’est un « dispositif ou moyen destinés à être porté ou tenu par une personne en vue de la protéger contre un ou plusieurs risques susceptibles de menacer sa santé ou sa sécurité ».

Les EPI sont choisis en fonction des risques à prévenir, des conditions de travail et des utilisateurs. Sont prises en compte les tâches réalisées par l’utilisateur, taille de l’utilisateur, composition des produits utilisés, normes en vigueur… Le médecin du travail peut être associé à leur sélection. Et les équipements de protection individuels sont fournis gracieusement à chaque salarié.

L’employeur a l’engagement de former les salariés à l’utilisation des EPI, les informer sur les règles en vigueur dans l’entreprise (affichage des consignes de sécurité, règlement intérieur, sanctions, etc.). Il doit par ailleurs faire vérifier les EPI périodiquement et les changer lorsqu’ils sont brisés ou périmés.