« L’assurance-chômage doit s’adapter à la segmentation du marché du travail »

Tribune. Les discussions sur la réforme de l’assurance-chômage s’ouvrent mercredi 30 septembre avec une double exigence : son adaptation à la crise sanitaire, qui rend peut-être moins urgentes certaines mesures incitatives, et sa préparation au « monde d’après ».

Pourtant, en matière d’emploi, celui-ci risque fort d’être à l’image de celui que nous connaissons : un monde où une petite partie des actifs souffre d’un risque disproportionné de perte d’emploi, où les allées et venues entre travail et chômage sont fréquentes, et où de nombreuses reprises d’emploi sont en réalité des retours chez le même employeur.

Dans ce monde, l’assurance-chômage endosse de fait de nouvelles missions : elle n’est plus une simple assurance contre des pertes ponctuelles de revenus. Elle finance également des épisodes de chômage répétés ; elle pallie l’insuffisance des revenus en emploi lorsque les contrats sont trop courts en permettant, dans certaines limites, le cumul salaire et indemnisation chômage.

Dans deux notes de l’Institut des politiques publiques, nous montrons qu’un quart des ressources du régime d’assurance-chômage sont mobilisées par ces « nouvelles » missions (Notes IPP n° 57 « Faut-il moduler les cotisations des employeurs à l’assurance-chômage ? », et n° 58 « L’assurance-chômage, miroir de la segmentation du marché du travail »). C’est un chiffre important, au-delà des déficits déjà très lourds constatés ces dernières années. Ce n’est pas le niveau de l’indemnisation qui est en cause, mais le fait que l’assurance-chômage n’a pas su s’adapter à la segmentation du marché du travail. A ce titre, deux évolutions nous semblent nécessaires.

Modérer les prolongations de droits

La première concerne l’activité réduite, qui permet de cumuler revenus d’activité et allocations-chômage. C’est un dispositif certes essentiel mais qui, sous sa forme actuelle, accentue la concentration des transferts financiers sur un petit nombre d’actifs, de secteurs et d’entreprises. Mal maîtrisé, il crée une disproportion entre les droits acquis et les contributions censées les justifier.

Il nous semble donc souhaitable de limiter le nombre de jours pouvant être passés en activité réduite et de modérer les prolongations de droits qu’elle autorise, tout en gardant le principe qui permet aux chômeurs de compléter leurs revenus d’allocation et de garder un contact avec l’emploi. Ce point, prévu dans la réforme, doit être conservé.

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« Les “territoires zéro chômeur” ont fait des miracles, mais c’est insuffisant pour assurer leur viabilité à terme »

Tribune. En 2016 a été lancé le projet Territoires zéro chômeur de longue durée (TZCLD). Ce projet partait d’une idée forte et simple : ce n’est pas le travail qui manque, et donc à coût égal, mieux vaut payer des chômeurs à effectuer des travaux utiles à la collectivité plutôt qu’à ne rien faire.

Dans ce but, ont été créées sur dix territoires expérimentaux des « entreprises à but d’emploi » (EBE), qui ont chacune recruté des dizaines de chômeurs en CDI à temps choisi. Avec l’idée d’arriver au plus vite à l’exhaustivité (recruter tous les chômeurs de longue durée volontaires du territoire), tout en respectant la non-concurrence avec les acteurs locaux.

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Si l’idée est simple, sa mise en œuvre s’avère un défi considérable : deux évaluations récentes montrent des résultats mitigés. Néanmoins, l’Assemblée nationale a voté, le 16 septembre, une loi prévoyant l’extension de l’expérimentation à 60 territoires, soit une échelle nettement plus réduite qu’initialement envisagée. Le Sénat doit se prononcer à son tour, le 7 octobre.

Absence d’étude méthodique du projet

Les partisans de ce dispositif plaident pour la poursuite de cette expérimentation au nom de son utilité écologique et sociale. Si celle-ci ne fait guère de doute, cela laisse intacte la question des résultats, tant économiques qu’humains, de cette expérimentation telle qu’elle a été menée jusqu’ici. Ses adversaires mettent au contraire l’accent sur des défauts majeurs de conception, qui expliquent le désarroi de nombreux salariés, et mettent en avant le coût plus élevé que prévu pour les finances publiques.

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Ayant participé au début de cette expérimentation sur l’un des dix terrains, il me semble que ce qui est en cause serait plutôt la manière dont la conduite de cette expérimentation a été pensée et mise en œuvre. Au-delà des défauts de conception relevés dans les évaluations, la réussite de ce projet suppose de relever deux défis majeurs : d’une part, le développement massif d’activités intensives en main-d’œuvre et génératrices de revenus ; d’autre part, le développement des personnes privées d’emploi afin que celles-ci puissent s’intégrer dans un collectif de travail et, si possible, évoluer vers des entreprises « normales ».

Or aucun de ces deux défis n’a fait l’objet d’une exploration méthodique et organisée un tant soit peu ambitieuse et innovante à l’échelle du projet. De sorte que les EBE sont aujourd’hui économiquement et humainement fragiles. Concernant les personnes, les questions que soulèvent les évaluations sont très réelles : les personnes recrutées sont des demandeurs d’emploi de longue durée, souvent cassés par des années de chômage, des carrières brisées, des accidents de vie…

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L’avenir incertain de l’emploi pour les personnes en situation de handicap

Carnet de bureau. « Recruter des personnes considérées comme vulnérables va être encore plus compliqué », alerte Arnaud de Broca. Le président de Collectif handicaps s’est inquiété de l’impact évident de la crise sanitaire sur l’accès ou le maintien en emploi des personnes en situation de handicap, à l’occasion de la présentation, le 23 septembre, d’une grande consultation IFOP-Agefiph sur la façon dont ils ont traversé la période Covid. Plus de 3 000 handicapés ont été interrogés du 11 au 18 septembre sur leur bilan en cette rentrée.

« L’impact du télétravail a été particulier sur la population handicapée. Cette enquête est globalement préoccupante mais réaliste, car elle traduit bien les retours que nous avons en tant qu’associations », a-t-il commenté. Les salariés témoignent d’une dégradation de leur état de santé physique (pour 37 % d’entre eux) et mentale (32 %) ; plus de deux actifs sur trois y voient un impact négatif sur leur vie professionnelle ; 45 % des télétravailleurs ont été davantage isolés.

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« Quand la taille des entreprises augmente, le sentiment de moindre accompagnement apparaît plus fort », précise Didier Eyssartier, le directeur général de l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph). Quant aux handicapés au chômage, 71 % sont pessimistes voire très pessimistes sur leurs chances de retrouver un emploi dans les trois prochains mois.

Rétropédaler sur le « décret Covid »

« On a bien conscience qu’il y a eu une fragilisation des parcours », a commenté Sophie Cluzel. Pour la secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées, « l’enjeu majeur est d’informer les employeurs sur tout ce qui est mis à leur disposition ». Au premier rang des dispositifs, la prime de 4 000 euros maximum annoncée fin août dans le cadre du plan de relance et accordée depuis le 1er septembre, et jusqu’au 28 février 2021, pour l’embauche d’une personne reconnue handicapée, sans limite d’âge. « 85 millions ont été fléchés sur cette mesure », insiste Mme Cluzel, qui appelle tous les employeurs à « ne pas baisser les bras maintenant ».

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Faire feu de tout bois, c’est le mot d’ordre lancé par la secrétaire d’Etat. Le « bois » en question étant les moyens existants avant le Covid – apprentissage, dispositif d’emploi accompagné, CDD tremplin – mais qui n’avaient pas suffisamment fait leur preuve. Même si la courbe du chômage des handicapés s’était enfin inversée en 2019, le taux de chômage était toujours du double de celui de la population active totale, à 18 %.

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Avis de décès de la valeur travail

« Autopsie de la valeur travail. A-t-on perdu tout sens de l’effort? », de Gérard Amicel et Amine Boukerche. Editions Apogée, 168 pages, 15 euros.

Le livre. « Le travail éloigne de nous trois grands maux : l’ennui, le vice, et le besoin ». C’est à partir de cette réflexion du Turc que le Candide de Voltaire en arrive à la conclusion que la destinée de l’homme est de travailler. L’avènement de la révolution industrielle viendra confirmer cette conception : jamais la valeur travail n’a été aussi centrale que dans les sociétés modernes productivistes.

Pourtant, cette valeur est en crise. Le chômage génère de nombreux drames sociaux, et même ceux qui ont le bonheur d’avoir un emploi peuvent vivre leur travail comme une épreuve physique et psychologique oppressante. « La vie misérable, laborieuse, douloureuse que mènent une multitude d’hommes prisonniers de l’emprise du travail semble contraire aux affirmations de Voltaire », affirment Gérard Amicel et Amine Boukerche.

En colonisant tout le temps d’une vie, la valeur travail n’a-t-elle pas fini par nier les fins auxquelles elle prétend ? Si la société idolâtre une valeur largement fantasmée, quelles sont les alternatives pour échapper à cette illusion ? s’interrogent les philosophes dans Autopsie de la valeur travail (Editions Apogée).

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« La valeur travail se meurt. Mais personne n’ose publier l’avis officiel de décès. Les discours puritains sur “le sens de l’effort” ne résoudront pas les difficultés économiques et sociales de notre époque. Ils visent au contraire à les masquer. » L’ouvrage montre la genèse historique de la centralité de cette valeur, puis creuse la réflexion sur la crise qui la frappe, en mobilisant philosophes, sociologues et économistes, d’Adam Smith à Rousseau, en passant par Locke, Marx et Proudhon. On revient sur les origines du management éthique avec Winslow Taylor, on pointe les limites du « slow management » en s’intéressant au compagnonnage médiéval, on s’interroge sur l’avenir du salariat avec André Gorz.

Suspicion généralisée

Alors que les économistes ont abandonné l’idée du travail comme mesure de la valeur d’échange de la marchandise, le progrès technologique a eu pour effet de réduire massivement le temps de travail. « Les appels incantatoires à la valeur travail sont donc en contradiction avec la réalité de la pratique politique et économique contemporaine. »

Les Etats cherchent à réduire les effectifs de leurs administrations et encouragent l’économie numérique, qui élimine les métiers traditionnels. « L’idéologie du mérite est une hypocrisie cruelle quand la valeur économique d’un emploi est inversement proportionnelle à sa valeur sociale. » Et que reste-t-il de la supposée rigueur économique et morale du capitalisme originel, dans un monde où des Etats surendettés sauvent de la faillite un système financier international devenu fou ?

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Les kits télétravail arrivent en entreprise et à domicile

« D’une centaine d’euros à plus de 1 000 euros, on en trouve dans toutes les gammes de prix, et adaptés à tous les espaces, parfois personnalisés. »

Océane, employée dans l’e-commerce, passée au télétravail intégral depuis le confinement, a opté cet été pour un ensemble chaise ergonomique et bureau d’occasion de la start-up Bluedigo, pour 216 euros : « J’étais sur une chaise de cuisine avec une mauvaise table, alors j’ai choisi d’investir dans un pack. » Car, reconnaît-elle « Je n’avais pas du tout d’équipement adapté ».

A l’image d’Océane, les télétravailleurs sont nombreux à vouloir s’équiper en mobilier de bureau, et cette demande n’est pas passée inaperçue auprès des vendeurs : des offres de « packs télétravail », regroupant un bureau, un siège et parfois quelques accessoires (tapis de souris, repose-pieds, lampe…) fleurissent sur la Toile.

D’une centaine d’euros à plus de 1 000 euros, on en trouve dans toutes les gammes de prix, et adaptés à tous les espaces, parfois personnalisés. Pour les petits appartements urbains, il existe même un pack Slim, avec bureau mural. « C’est une idée lancée pendant le confinement. Nous avons simplement appliqué ce que nous avons vécu chez nous, c’est-à-dire le déplacement de nos bureaux à la maison », explique la directrice générale de la société d’aménagement Ouest-Bureau, Marie-Eve Hamon.

« On avait déjà quelques packs dans notre offre Web, mais avec le confinement on l’a renforcée, se souvient Nicolas Rabadeux, chef de groupe produits du secteur mobilier du groupe Bruneau. On a opté pour une dizaine de packs concis, car plus l’on ajoute d’éléments, plus il y a un risque que le client ne s’y retrouve pas. C’est compliqué de tomber juste pour assortir et le bureau et le siège. »

Télétravail : faut-il un équipement standard ou sur mesure ?

« La start-up Bluedigo récupère du mobilier quasi neuf dans les entreprises qui déménagent, et les revend à faible coût. »

Les « packs télétravail » proposés par les enseignes ont le vent en poupe : comme le transfert du travail à la maison est dans l’air du temps pour cause de Covid-19, les ventes explosent. Sur le site CDiscount, les stocks de « packs bureau droit et chaise de bureau » sont déjà épuisés. Même constat chez Bruneau : « Il y a des ruptures de stock sur plusieurs ensembles ! Des gens se sont rués sur les produits », s’étonne encore Nicolas Rabadeux, chef de groupe produit du secteur mobilier du groupe Bruneau.

La directrice générale d’Ouest Bureau a, de son côté, constaté une poussée des ventes cet été : « Nous avons eu très peu de contacts clients pendant le confinement, mais un flux de demandes est arrivé à partir de juin, avec 40 % des commandes totales de notre site qui concernent la mise en place du télétravail ! »

Certains vendeurs ne manquent pas d’ingéniosité pour se démarquer. La start-up Bluedigo récupère du mobilier quasi neuf dans les entreprises qui déménagent, et les revend à faible coût, sous forme de pack écologique et économique. C’est la solution choisie par la salariée Océane, qui s’est équipée cet été : « J’ai repéré d’abord les produits que je cherchais et j’ai comparé sur Internet. Je voulais acheter d’occasion, même avec la livraison ce n’était pas cher ! ».

Une cinquantaine de modèles de bureaux et chaises

Les plus grandes enseignes – Ouest Bureau ou Bruneau – proposent des ensembles « à la carte », car le pack standardisé ne convient pas à tout le monde. « Nous ne voulons pas rentrer dans une standardisation des postes, on préfère répondre aux besoins ciblés de chaque collaborateur », explique Jean-Christophe Vinel, directeur RSE (responsabilité sociale des entreprises) de l’entreprise de services du numérique Tipco, qui préfère laisser le salarié faire son choix et lui donner une enveloppe. Vous avez besoin d’un fauteuil ? L’entreprise vous le rembourse sur note de frais et le fait livrer par l’enseigne partenaire.

Idem chez le cabinet de conseil en informatique Cellenza, qui dote chaque collaborateur d’une somme à dépenser sur un catalogue prédéfini avec Bruneau, pour créer son pack à partir d’une cinquantaine de modèles de bureaux et de chaises. « Le catalogue va du vrai bureau massif au bureau un peu plus design style nordique qui se pose plus facilement dans un salon, du fauteuil ergonomique un peu imposant au petit fauteuil design qui peut aisément se fondre dans la décoration. »

La méthode fonctionne, selon Emilie Ehrhardt, responsable de l’environnement de travail : « On envoie à tous nos salariés un bon de commande, chacun choisit ce qu’il veut et Bruneau vous livre votre pack à domicile en fonction de vos disponibilités. » Standardisés ou personnalisés, ces ensembles de mobilier représentent un nouveau marché.

Tandis que le télétravail s’installe durablement, l’idée est d’éviter les risques pour la santé des salariés, dont l’employeur est tenu responsable. Selon une étude de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, 50 % des 8 600 répondants ont déclaré être plus fatigués pendant le confinement qu’à l’ordinaire. Emilie Ehrhardt, responsable de l’environnement de travail du cabinet de conseil en informatique Cellenza, s’est occupée de l’approvisionnement de ses collègues en mobilier, et a elle-même profité d’un pack télétravail : « J’ai été équipée pour travailler de manière plus cohérente : il y a un moment où la chaise du salon et le bureau improvisé c’est sympa, mais ça fait quand même mal au dos ! »

« Loin d’être des gadgets »

Eviter les douleurs passe par une bonne installation et l’utilisation de matériel ergonomique : « Il est nécessaire que le matériel mis à disposition puisse être réglable et adaptable aux salariés et aux tâches spécifiques qu’ils effectuent. Plus un fauteuil est modulable, plus il s’adaptera à la morphologie et aux besoins de chacun. Il existe aussi des plans de travail à hauteur variable, ce qui permet d’alterner les postures, » explique Laurent Kerangueven, ergonome à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS).

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Télétravail : faut-il un équipement standard ou sur mesure ?

« La start-up Bluedigo récupère du mobilier quasi neuf dans les entreprises qui déménagent, et les revend à faible coût. »

Les « packs télétravail » proposés par les enseignes ont le vent en poupe : comme le transfert du travail à la maison est dans l’air du temps pour cause de Covid-19, les ventes explosent. Sur le site CDiscount, les stocks de « packs bureau droit et chaise de bureau » sont déjà épuisés. Même constat chez Bruneau : « Il y a des ruptures de stock sur plusieurs ensembles ! Des gens se sont rués sur les produits », s’étonne encore Nicolas Rabadeux, chef de groupe produit du secteur mobilier du groupe Bruneau.

La directrice générale d’Ouest Bureau a, de son côté, constaté une poussée des ventes cet été : « Nous avons eu très peu de contacts clients pendant le confinement, mais un flux de demandes est arrivé à partir de juin, avec 40 % des commandes totales de notre site qui concernent la mise en place du télétravail ! »

Certains vendeurs ne manquent pas d’ingéniosité pour se démarquer. La start-up Bluedigo récupère du mobilier quasi neuf dans les entreprises qui déménagent, et les revend à faible coût, sous forme de pack écologique et économique. C’est la solution choisie par la salariée Océane, qui s’est équipée cet été : « J’ai repéré d’abord les produits que je cherchais et j’ai comparé sur Internet. Je voulais acheter d’occasion, même avec la livraison ce n’était pas cher ! ».

Une cinquantaine de modèles de bureaux et chaises

Les plus grandes enseignes – Ouest Bureau ou Bruneau – proposent des ensembles « à la carte », car le pack standardisé ne convient pas à tout le monde. « Nous ne voulons pas rentrer dans une standardisation des postes, on préfère répondre aux besoins ciblés de chaque collaborateur », explique Jean-Christophe Vinel, directeur RSE (responsabilité sociale des entreprises) de l’entreprise de services du numérique Tipco, qui préfère laisser le salarié faire son choix et lui donner une enveloppe. Vous avez besoin d’un fauteuil ? L’entreprise vous le rembourse sur note de frais et le fait livrer par l’enseigne partenaire.

Idem chez le cabinet de conseil en informatique Cellenza, qui dote chaque collaborateur d’une somme à dépenser sur un catalogue prédéfini avec Bruneau, pour créer son pack à partir d’une cinquantaine de modèles de bureaux et de chaises. « Le catalogue va du vrai bureau massif au bureau un peu plus design style nordique qui se pose plus facilement dans un salon, du fauteuil ergonomique un peu imposant au petit fauteuil design qui peut aisément se fondre dans la décoration. »

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Quatre constats pour mieux négocier le télétravail

Droit social. Le contre-exemple des « télétravaux forcés » et confinés au domicile du printemps 2020, conséquence de la pandémie de Covid-19 permet d’établir quatre constats pour mieux négocier le télétravail élargi (salariés concernés plus durée) de demain.

Premier constat. L’extrême hétérogénéité des situations de chaque télétravailleur. L’organisation au sein de chaque entreprise est déjà très variable. Et sans parler des premiers de corvée souvent exclus de tout travail à distance, chaque salarié a un entourage, un domicile et des temps de transport spécifiques. Caricature : les parents se partageant un ordinateur avec un Wi-Fi problématique, à côté d’enfants en bas âge.

Conséquence. Le télétravail ne peut être conçu comme un discret temps partiel afin de s’occuper de sa famille. Les accords doivent éviter que le télétravailleur ne soit soumis à d’épuisantes injonctions contradictoires (atteindre ses objectifs-s’occuper des enfants), source de graves risques psychosociaux. Vu le très fort pourcentage de salariés aidants femmes (70 % pour des parents très âgés), le développement du télétravail au domicile pourrait aussi provoquer un recul de vingt ans en matière d’égalité.

Deuxième constat. Télétravailler n’est pas simplement emporter un ordinateur à la maison, mais installer physiquement et psychologiquement un peu de l’entreprise au domicile. Sur une longue période, une trop grande porosité entre vie privée et vie professionnelle est désastreuse pour tout le monde : quand on rentre « chez soi » et qu’on a l’impression de « revenir au bureau »… D’où la préparation d’une résolution sur l’indispensable droit de déconnexion au Parlement européen, mais aussi des accords d’entreprise voulant « prévenir l’hyperconnection et préserver la santé des salariés », comme chez Total.

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Conséquence. Le choix individuel du télétravail percutant le collectif, passer à trois ou quatre jours par semaine exigera une réorganisation profonde de toute l’entreprise, et des équipes. Mais également, s’il intervient au domicile, de chaque petit écosystème familial. Avec souvent, au-delà de trois jours par semaine loin de l’entreprise, un réexamen de l’équilibre vie professionnelle-vie personnelle, voire de la centralité du travail salarié structurant nos vies et nos villes.

La question du statut

Troisième constat. Nombre d’entreprises vont chercher à réduire fortement leurs coûts : à commencer par l’immobilier, mais également la masse salariale. Or, la délocalisation d’un travail effectué à distance par des peu qualifiés est aisée. Aujourd’hui déjà, des centres d’appels sont implantés à Casablanca, et l’informatique est traitée en Inde.

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Disney supprime 28 000 emplois aux Etats-Unis à cause de la pandémie de Covid-19

Les portes du parc Disneyland sont fermées, au début de la pandémie, à Anaheim, en Californie, le 14 mars.

Les salariés de Disney mis au chômage technique depuis le mois d’avril espéraient un coup de téléphone pour être rappelés au travail. Vingt-huit mille d’entre eux vont être licenciés définitivement en raison de l’absence de calendrier pour la réouverture du parc californien de Disneyland.

L’annonce est liée au conflit entre le géant du divertissement et l’Etat de Californie sur la question de la réouverture partielle du parc d’attractions. Elle intervient quelques heures après que les autorités locales ont annoncé que le comté d’Orange, siège du parc, n’avait pas fait assez de progrès dans la lutte contre l’épidémie de Covid-19 pour envisager une réouverture. Les parcs à thème se sont plaints qu’aucune feuille de route spécifique les concernant n’avait été édictée. Quatre-vingt mille emplois seraient directement dépendants du parc dans la région d’Anaheim, où le chômage s’est envolé.

« Nous sommes prêts à ouvrir et espérons avoir prochainement des directives de l’Etat » de Californie, a déclaré sur une vidéo le vice-président de Disneyland, Patrick Finnegan. Le groupe a rouvert partiellement ses activités de restauration et d’hôtellerie. Les deux tiers des personnels licenciés étaient salariés à temps partiel. L’entreprise employait, à la fin de l’année 2019, plus de 220 000 personnes.

Rien n’est plus comme avant

En Floride, les autorités de l’Etat, républicaines, sont beaucoup plus allantes sur la réouverture de l’économie, et le parc Disneyworld, situé à Orlando (Floride), a rouvert ses portes partiellement depuis le mois de juillet. Mais une visite dans un des parcs d’attractions de la région (le Musée de l’espace de cap Canaveral) était édifiante : parkings déserts, restaurants fermés, rien n’est plus comme avant dans le monde du tourisme américain tandis que les salariés de Disney se ruaient, début septembre, à la banque alimentaire organisée chaque samedi à Orlando par le syndicat du groupe.

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Disney a perdu 4,72 milliards de dollars (4,09 milliards d’euros) au deuxième trimestre 2020, sa première perte depuis plus de dix ans. L’activité parc d’attractions a accusé un déficit de 2 milliards de dollars, avec une chute des recettes de 85 %.

L’action du groupe avait rebondi lorsqu’il est apparu que, comme son concurrent Netflix, Disney enregistrait d’excellents résultats mondiaux avec l’ouverture de son service de diffusions de films à la demande, Disney+. Celui-ci avait séduit plus de 60 millions de téléspectateurs en neuf mois de lancement. Devant la persistance de la pandémie, Disney a lancé son film Mulan en vidéo à la demande en septembre, au prix de 30 dollars, au grand dam des réseaux de salles de cinéma qui auraient dû le diffuser à partir du 21 août.

L’affaire confirme que faute de vaccin fiable et généralisé, une reprise normale de l’économie du loisir et du tourisme est inenvisageable.

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Les perspectives des jeunes diplômés bouleversées par la crise

Pour Madeleine (le prénom a été modifié), 24 ans, l’année 2020 s’annonçait pleine de promesses. Master de marketing en poche, elle venait de décrocher un CDI dans un cabinet de conseil francilien. « J’étais épanouie, mes collègues étaient sympas, je sentais que je montais en compétences », se souvient-elle avec une pointe de nostalgie. Mais mi-avril, en plein confinement, son employeur a mis fin à sa période d’essai. « Il m’a dit qu’il était très content de mon travail, mais que, vu la situation, il ne pouvait pas me garder. » Le choc passé, vaillamment, Madeleine s’est remise à chercher du travail. L’entreprise où elle avait réalisé son alternance lui a proposé de reprendre son ancien poste de chef de produit… mais en tant qu’intérimaire. Fini le confort du CDI. « Ce n’est pas toujours facile de rester motivée. J’ai l’impression d’avoir fait un bond d’un an en arrière. Autour de moi, en ce moment, tout le monde a revu ses ambitions à la baisse… »

Sur le site de l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), les offres d’emploi à destination des diplômés débutants (moins d’un an d’expérience) ont dégringolé de 42 % entre janvier et août 2020 par rapport à 2019 (contre − 34 % pour l’ensemble des cadres). Cette chute concerne aussi bien les start-up que les grandes entreprises, observe la plate-forme d’offres d’emploi Welcome to the Jungle, spécialiste des jeunes diplômés. Résultat : le nombre de titulaires de diplômes « bac + 3 et plus » inscrits à Pôle emploi a bondi de 68 % entre février et juillet 2020.

Renoncements déstabilisants

Stages avortés, ruptures de périodes d’essai, CDD non renouvelés, promesses d’embauches décalées, retours précipités de l’étranger… De nombreux jeunes diplômés ont vu leurs projets d’avenir mis à rude épreuve par la crise sanitaire. Des renoncements déstabilisants à cette période charnière où ils sont censés prendre leur envol. « Pour des jeunes qui se projetaient dans le démarrage rapide de leur vie active, la crise génère une inquiétude légitime, et une forme de frustration », analyse Dominique Monchablon, psychiatre, chef de service de la Fondation santé des étudiants de France et à l’école de commerce ESCP.

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« Les jeunes diplômés ont beau être mieux armés que ceux qui sont sans qualifications, ce serait une erreur de penser qu’ils sont épargnés par les difficultés actuelles. Le gel des embauches ou le ralentissement des recrutements opérés par beaucoup d’entreprises les frappent directement », insiste le directeur général de l’APEC, Gilles Gateau.

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Les discussions reprennent sur la réforme de l’assurance-chômage

La réforme de l’assurance-chômage va-t-elle être vidée de sa substance ou retouchée à la marge ? C’est l’un des principaux enjeux de la rencontre organisée, mercredi 30 septembre, entre le ministère du travail et les partenaires sociaux. Les protagonistes doivent, en effet, se pencher sur les aménagements susceptibles d’être apportés à un dispositif très controversé, partiellement mis en vigueur à partir de la fin 2019 avant d’être suspendu – presque intégralement –, du fait de la crise.

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Le gouvernement assure cependant qu’il n’est nullement question d’y renoncer, tout en se disant prêt à amender les textes. Les syndicats, de leur côté, réclament un abandon de ces mesures, les jugeant punitives pour les demandeurs d’emploi.

Indemnité plus faible

La réunion de mercredi donne le coup d’envoi à un cycle d’échanges entre l’exécutif, les organisations de salariés et les mouvements d’employeurs. Une quinzaine de thèmes doivent faire l’objet de concertations durant l’automne. Dans les sujets abordés, il y a donc l’assurance-chômage, dont les règles avaient été modifiées par deux décrets pris en juillet 2019. Prévues au départ pour s’appliquer en plusieurs étapes – de novembre 2019 à mars 2021 –, les nouvelles dispositions sont dénoncées par les syndicats.

Premier grief : il est lié au durcissement des conditions requises pour bénéficier du régime, puisque les personnes doivent avoir travaillé plus longtemps pour pouvoir toucher une allocation. Les organisations de salariés sont également contre les changements introduits dans le calcul de la prestation, car ils vont pénaliser les chômeurs ayant enchaîné des contrats courts (l’indemnisation versée risquant d’être plus faible, à cause du « salaire de référence » qui est déterminé différemment).

Lire aussi l’éditorial : Assurance-chômage, une réforme punitive

La réforme indispose aussi le patronat, mais avec une intensité moindre. Les mouvements d’employeurs s’opposent, en effet, à l’instauration d’un bonus-malus : destiné à combattre la précarité sur le marché du travail, ce mécanisme augmente les cotisations des entreprises qui se séparent fréquemment de leurs collaborateurs et diminue celles des sociétés dont les effectifs sont stables. Seuls sept secteurs sont concernés, parmi lesquels l’hôtellerie-restauration.

« Annulation » de la réforme

Tous ces points durs vont être passés en revue mercredi. Du côté des syndicats, les discours restent inchangés. La CFDT ne veut pas de ces textes qui ont « pour effet de réduire les droits des demandeurs d’emploi », confie Marylise Léon, la numéro deux de la centrale cédétiste. Pour elle, la vocation de l’assurance-chômage est de « garantir aux personnes ayant perdu leur activité une allocation, essentielle notamment pour les plus précaires ». La concertation qui débute mercredi présente toutefois, selon elle, le mérite d’ouvrir une « réflexion » sur le rôle du système d’indemnisation en temps de crise.

Michel Beaugas (FO) affirme, pour sa part, que « la protection accordée aux chômeurs ne doit pas être amoindrie, a fortiori durant une période où le nombre de personnes privées de travail flambe » : « Il faut revenir aux règles qui prévalaient avant les décrets de 2019. » La CGT, par la voix de Denis Gravouil, est partisane, elle aussi, d’une « annulation » de la réforme. Elle compte mettre à profit les discussions à venir pour défendre des propositions qui améliorent le sort réservé aux chômeurs.

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Les organisations patronales, elles, vont exprimer, à nouveau, leur hostilité au bonus-malus, avec d’autant plus de vigueur que celui-ci s’applique à des activités dont certaines ont été durement touchées par la récession. « Il faut essayer de trouver des solutions alternatives », estime Eric Chevée, vice-président de la Confédération des petites et moyennes entreprises, tout en reconnaissant que « ce n’est pas évident ».