« Camaïeu, c’est mort ce soir » : déstockage, larmes et incompréhension avant fermeture définitive
Entre deux encaissements, Roxane Carneiro-Deneza tire un mouchoir et essuie ses larmes. Depuis jeudi 29 septembre, au lendemain du prononcé de la liquidation judiciaire de Camaïeu, la responsable-adjointe du magasin d’Orly (Val-de-Marne) reçoit des fleurs et des chocolats que lui apportent ses clientes. « Ce n’est pas mon patron que je pleure. C’est vous, madame », confie-t-elle, samedi 1er octobre, en remerciant l’une de ses fidèles clientes, à quelques heures de la fermeture définitive de la boutique où elle travaille depuis neuf ans.
Les paquets-cadeaux s’amoncellent derrière la caisse. Le montant de la recette grimpe. Dans cette boutique située dans la galerie de l’hypermarché E. Leclerc d’Orly, à proximité des quartiers populaires Les Aviateurs et La Sablière, les clientes sont venues en masse acheter des vêtements bradés à moins 50 %. Le directeur de l’hypermarché a dépêché son vigile pour canaliser la cinquantaine de personnes qui sans discontinuer patientent pour entrer. « Là, vous voyez, soudainement, c’est plus vraiment la crise ! », observe la responsable du magasin, Elodie – qui n’a pas souhaité que son nom de famille figure dans cet article.
Beaucoup sont là « pour saluer les vendeuses »
Beaucoup des clientes sont venues parce que « Camaïeu, c’est mort ce soir ». L’attrait des petits prix, des cintres distribués gratuitement et l’envie de solder une carte-cadeau ou un avoir les pressent à acheter. A beaucoup acheter. Quitte à choisir des vêtements d’été, tee-shirts bariolés, sandales vertes ou robes, et à regretter qu’« il n’y [ait] pas − 50 % sur les bijoux ».
D’autres sont là « pour saluer les vendeuses » et faire preuve de « solidarité » alors que « la vie est dure ». Parce qu’elle a « entendu aux infos que le montant de la recette, c’est pour les salariés », Elisabeth Pommier, retraitée de 66 ans, cliente Camaieu depuis « longtemps », est venue « faire un tour ». Et elle « achète sans vraiment de besoin » parce que « ce sera pour leur cagnotte », explique-t-elle, sans pouvoir croire que « cette fermeture soit aussi rapide ».
L’enseigne fondée en 1984, qui a été l’un des distributeurs les plus rentables du secteur de l’habillement féminin dans les années 1990, a été placée en redressement judiciaire début août, deux ans après sa reprise par la Financière immobilière bordelaise (FIB), société foncière détenue par l’homme d’affaires Michel Ohayon, 104e fortune de France, selon le magazine Challenges. Mercredi 28 septembre, le tribunal de commerce de Tourcoing a prononcé sa liquidation, après avoir écarté le plan de continuation présenté par M. Ohayon.
Il vous reste 52.02% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.