Les doctorants étrangers libérés de l’augmentation des frais d’inscription universitaire
Dans une conférence au « JDD », la ministre Frédérique Vidal affirme que les frais d’inscription resteront fixes pour les étudiants français et européens.
L’augmentation des frais d’inscription à l’université pour les étudiants étrangers ne s’apposera définitivement pas aux doctorants, « qui jouent un rôle essentiel dans les laboratoires de recherche », a avisé, dimanche 24 février, la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Frédérique Vidal, dans un entretien au Journal du dimanche (JDD).
Dès la rentrée 2019, les étudiants hors Union européenne (UE) nécessiteront payer 2 770 euros par an en licence et 3 770 euros par an en master – contre 170 euros en licence et 243 euros en master à l’heure actuelle – dans le cadre d’une stratégie exposée par l’exécutif comme soucieuse d’« équité financière » et d’attractivité internationale.
Angoisse sur une augmentation générale des droits d’inscription
Les doctorants devaient au début être intéressés par la mesure. Mais sur la foi de la recommandation d’un rapport issu d’une concertation (remis en février au gouvernement), Frédérique Vidal a raconté qu’ils seront définitivement exemptés. « Nous suivrons cette préconisation. Et on va travailler, dans le cadre de la loi de programmation de la recherche prévue pour 2020, afin d’élargir l’accès aux contrats doctoraux », affirme la ministre dans Le JDD. Pour raffermir l’attractivité des universités françaises, la ministre mise aussi sur l’ouverture d’un bureau d’accueil consacré aux étudiants étrangers dans toutes les universités, dès la rentrée 2019.
L’augmentation ciblée sur les étudiants étrangers « n’est certainement pas le prélude à une augmentation généralisée des droits d’inscription, ajoute Frédérique Vidal. Mais visiblement l’inquiétude persiste. Nous allons donc prendre un décret fin mars, afin d’assurer qu’à l’avenir, pour les étudiants français et européens, les droits d’inscription seront fixes et ne pourront pas augmenter plus que l’inflation. »
Plusieurs universités, dont Paris-Sud, Strasbourg, Rennes-II, Toulouse Jean-Jaurès, Aix-Marseille, Angers et Paris-Nanterre ont d’ores et déjà éclairci leur refus de mettre en œuvre cette hausse des droits pour les étudiants étrangers. Ces établissements comptent pour cela utiliser la possibilité d’exonération qui existe dans un décret de 2013, à augmentation de 10% de leurs étudiants. Un taux qui ne devrait pas évoluer, a avisé Frédérique Vidal, inversement à la recommandation du rapport remis au gouvernement sur le sujet, d’augmenter ce taux à 15% afin que les universités puissent exonérer l’ensemble des étudiants extra-européens, si elles le souhaitent, dans les années qui viennent. « Comme l’élévation des droits d’inscription ne concerne que les nouveaux arrivants, les établissements pourront facilement les exempter cette année en respectant le plafond actuel », a assuré la ministre.
Emmanuel Macron, s’en est fixement pris aux partenaires sociaux jeudi 21 février à la suite à cet échec. Il leur reproche particulièrement de se défausser de leurs responsabilités sur l’Etat qui va reprendre la main dans ce dossier.
« On vient d’avoir un exemple de vraie négociation sociale, a ridiculisé le chef de l’Etat, devant les présidents des départements réunis à l’Elysée. On a dit aux partenaires sociaux : “Trouvez-nous une solution pour le chômage, vous êtes autour de la table, vous êtes responsables”, alors même que les syndicats ne rémunèrent plus le chômage, c’est le contribuable. »
« On est dans un drôle de système ! Chaque jour dans le pays, on dit : “corps intermédiaires, démocratie territoriale, démocratie sociale, laissez-nous faire.” Et quand on donne la main, on dit : “mon bon monsieur, c’est dur, reprenez-la.” Et le gouvernement va devoir la reprendre, car on ne peut pas avoir une défaillance augmentée sur le chômage comme on a depuis tant d’années. »
Bonus-malus
Après un meeting de la dernière chance mercredi, syndicats et patronat ont, par conséquence, échoué à trouver un accord sur la réforme de l’assurance-chômage voulue par l’exécutif. Les syndicats avaient fait du bonus-malus – un dispositif permettant de moduler les cotisations patronales en fonction du recours aux contrats de courte durée – une condition sine qua non de leur participation aux pourparlers. Mais le patronat est brutalement opposé à cette mécanique qu’il juge « mortifère » pour l’emploi.
Le gouvernement, qui sollicitait aussi de se mettre d’accord sur un plan d’économies de plus d’un milliard d’euros chaque année durant au moins trois ans, va actuellement reprendre la main. Avec deux objectifs supplémentaires :
La sortie de M. Macron a été peu estimée du côté des syndicats et du patronat. Ripostant aux propos du président, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, lui a Tweeter: « Et si la démocratie ne passait pas par des petites phrases polémiques ou médias interposés ? Nul doute qu’elle fonctionnerait mieux dans notre pays. »
« La démocratie sociale a souvent prouvé son efficacité et sa responsabilité lorsqu’elle n’est pas soumise à des lettres de cadrage impossibles, conduisant sciemment une négo dans l’impasse », a ajouté Laurent Berger sur le réseau social. « Rechercher des boucs émissaires peut être tentant à court terme mais contre-productif pour l’avenir », a-t-il déclaré.
« Opération de communication »
De son côté, la CGT, dans une déclaration, reproche à M. Macron « de se livrer à une belle opération de communication qui relève du scandale, avec une opération de destruction depuis plusieurs mois ». Avant d’ajouter:
« Macron est un menteur, en prétendant que la protection sociale n’appartient plus aux employés, et que les syndicats sont responsables de l’échec, quand celle-ci incombe au patronat… et à Macron lui-même ! (…) Macron est aussi un manipulateur : il a requis une négociation impossible pour faire des économies sur le dos des chômeurs et au passage mettre la main sur la gestion de l’assurance-chômage. La conséquence possible est une exclusion de tous les contre-pouvoirs dans l’assurance-chômage. »
Le secrétaire général de Force ouvrière, Yves Veyrier, a aussi tenu à répondre aux critiques de M. Macron : « Non, monsieur le président de la République, on ne vient pas d’avoir “une vraie discussion sociale”. » Selon lui, « la lettre de cadrage que votre gouvernement a imposée, d’une part, et certaines de vos interventions publiques durant le déroulement de la négociation, d’autre part, ne nous ont “pas donné la main” mais allaient à l’encontre de ce principe. »
Des jugements formulées pareillement par le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux sur Twitter : « Le gouvernement n’a pas donné la main aux partenaires sociaux, il leur a dit de négocier en montrant publiquement les résultats de la tractation à l’avance, y compris pendant la négociation. »