Des médecins salariés oppose les déserts médicaux
Initier début 2018, le centre de santé départemental a déjà appelé 37 médecins et permis à 15 000 patients de rattraper un médecin traitant.
Denis Evrard est un maire chanceux. Plusieurs années après le départ à la retraite de son dernier médecin généraliste, sa ville de 2 000 habitants, à la périphérie de Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire), arrive enfin de récupérer un praticien. Grâce à une décision départementale originale pointant à lutter contre les déserts médicaux, Lux est devenue, le 11 mars, la douzième « antenne » du centre de santé de Saône-et-Loire. Avec ses 37 médecins salariés, ce mécanisme lancé début 2018 a d’ores et déjà permis à 15 000 personnes de reprendre un médecin traitant. Une réussite dans un département où le nombre de généralistes avait amoindri de 13,5 % entre 2007 et 2017.
Avec ses adjoints, l’élu divers gauche a installé ces derniers jours dans les boîtes aux lettres de tous ses administrés le mode d’emploi de la nouvelle antenne : un médecin présent quatre à cinq demi-journées par semaine, abordable seulement sur rendez-vous, mais avec des créneaux d’urgence disponibles le jour même, et sans dépassement d’honoraires. « Les généralistes des communes avoisinantes sont saturés, ils ne saisissent plus de nouveaux patients, explique M. Evrard. Et pour aller consulter à Chalon, quand on n’a pas de voiture, il faut adapter au moins quarante minutes en bus. Pour certaines personnes âgées, c’est très difficile. »
Pour cheminer, le mécanisme départemental prévoit une prise en charge des locaux et des charges (chauffage, ménage) par les municipalités. C’est un local municipal de 40 m2 établi par les agents municipaux dans une partie de la maison des associations, pour un peu plus de 15 000 euros, qui a fait l’affaire. « Etre obligé de payer avec les deniers publics pour avoir un médecin, ça m’a un peu chiffonné au départ, reconnaît M. Evrard, qui a été sollicité le jour de l’ouverture par des infirmières libérales venues lui solliciter la même aide… Mais c’était la moins mauvaise solution. On n’avait pas certainement le choix, c’était ça ou rien. »
Satisfaits de leurs conditions d’exercice
Le docteur Eric Lequain, 56 ans, qui garantit aussitôt les quatre à cinq demi-journées de consultation par semaine à Lux, est un médecin heureux. Il y a dix ans, il avait tiré un trait sur quinze années d’exercice en libéral à Mercurey, une autre commune du département, pour former un emploi salarié au centre de transfusion sanguine. « J’étais parti parce que je ne pouvais pas maîtriser mon temps de travail, dit-il. J’arrivais à 7 h 30 le matin, je repartais à 20 heures, avec un sandwich au milieu. Je faisais cinq à six patients par heure. Il ne fallait pas être trop malade pour venir me voir… » Grâce aux conditions présentées par le département, il dit avoir repris goût à l’exercice de son métier.
La ministre des solidarités et de la santé Agnès Buzyn a dit apercevoir dimanche de « offrir une augmentation de la durée de travail » lors des débats avec les collaborateurs sociaux « dans le cadre de la réforme générale » des retraites. « La question de l’âge de départ à la retraite est sans arrêt sur la table, à gauche comme à droite », a élevé, dimanche 17 mars, la ministre lors du « Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI ».
« Moi, j’entends ces débats. Le président de la République avait pris lors de sa campagne la promesse devant les Français de ne pas manipuler à l’âge de départ au retrait. Après, nous allons mener un changement des retraites pour rendre les retraites plus universelles, plus compréhensibles pour les Français et avoir un système qui poursuit notre système par répartition, peut-être que cela, ça sera en discussion avec les partenaires sociaux dans le cadre de la réforme générale », a-t-elle exposé.
Propos tenus à titre personnel
« Je n’y suis pas hostile », a continué la ministre, consultée sur l’enjeu de renvoyer l’âge de départ à la retraite. « Je suis médecin, je vois que la durée de vie augmente d’année en année, elle agrandi moins vite ces dernières années mais elle a amplement augmenté », a-t-elle fait valoir. « Est-ce que, alors que le nombre d’actifs réduit, nous allons pouvoir soutenir sur les actifs le poids des retraites qui vont accroitre en nombre et en durée ? Nous savons que cet équilibre-là va être de plus en plus difficile à tenir », a-t-elle estimé.
Comme on lui rapportait, en fin d’émission, les réflexes de surprises suscitées sur les réseaux sociaux par ses proclamations, la ministre a accentué qu’elle s’exprimait à titre personnel. « Je pense qu’un jour, un jour, nous serons obligés de travailler plus longtemps sinon notre système de retraite ne pourra pas tenir », a-t-elle précisé.
« Ce que j’ai dit, c’est que j’ai vu ces propositions affermir du grand débat. A partir du moment où les Français l’évoquent, c’est sur la table. A partir du moment où toutes les propositions qui sont amenées par le grand débat vont être étudiées, nous enseignerons celle-là comme les autres. Elle n’est pas [mise] sur la table actuellement par le gouvernement », a-t-elle retracé.