Assurance-chômage : une réforme critiquée par des économistes qui avaient soutenu Macron en 2017

Assurance-chômage : une réforme critiquée par des économistes qui avaient soutenu Macron en 2017

Mise en musique dans un décret publié mercredi 31 mars au Journal officiel, la réforme de l’assurance-chômage inspire de fortes réserves à de nombreux économistes, y compris parmi ceux qui ont soutenu Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2017. Les critiques tiennent à la fois au contenu de certaines dispositions mais aussi au moment choisi pour procéder à de tels changements.

Le projet du gouvernement « ambitionnait de traiter un problème réel mais localisé : l’abus des contrats courts », rappelle Jean Pisani-Ferry, professeur à Sciences-Po. « L’appliquer aujourd’hui, c’est risquer de pénaliser des précaires à la lisière du marché du travail qui ont été déjà durement frappés par le choc Covid », met-il en garde. L’ancien « directeur du programme et des idées » de M. Macron, pendant la course à l’Elysée il y a quatre ans, fait allusion à une innovation majeure : le nouveau mode de calcul du salaire journalier de référence (SJR), qui sert à déterminer le montant de l’allocation.

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Les règles encadrant ce mécanisme étaient dans le collimateur de l’exécutif car elles pouvaient se révéler plus avantageuses pour ceux qui ont été employés de façon fractionnée, en contrats courts, par rapport à ceux ayant travaillé de façon continue – avec comme conséquence des allers-retours incessants entre petits boulots et chômage indemnisé. C’est donc pour casser cette dynamique dite de la « permittence » (être en permanence dans des postes intermittents) que le SJR a été modifié.

« Ce n’est pas le moment »

Le problème, c’est que les dispositions qui auront cours désormais sont susceptibles de se traduire par des montants mensuels d’allocations-chômage plus faibles que dans le système antérieur, pour une partie des personnes dont l’activité prendra fin, après le 1er juillet. Cette incidence, les syndicats la dénoncent mais elle est assumée par le pouvoir en place, au motif qu’elle contribuerait à encourager les salariés à accepter des contrats d’une durée plus longue. Mais Jean Pisani-Ferry trouve que cette approche est critiquable car « le contexte n’est plus du tout le même » : « Nous ne sommes plus face à un marché du travail tendu où il était légitime d’accroître les incitations au retour à l’emploi. »

Plus largement, « engager une réforme conçue avant la crise, même si elle a été amendée, c’est donner le sentiment que le gouvernement ne prend pas la mesure de tout ce que la pandémie a bouleversé », juge Jean Pisani-Ferry. Il pense en particulier à « l’ampleur des réallocations d’emploi, en métiers et secteurs, qui risquent de devoir se produire ». En d’autres termes, les besoins en main-d’œuvre sont appelés à évoluer profondément, avec des branches professionnelles où les patrons voudront embaucher à tour de bras tandis que d’autres seront sur la tendance inverse : autant attendre que ces mutations aient lieu, avant de bouger les curseurs du régime.

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LJD

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