L’argot de bureau : les « REX » sont le rétroviseur du progrès
Propriétaire d’un hôtel-restaurant à la mer, vous vous baladez sur ces plates-formes où les utilisateurs notent leur expérience : « Le serveur jette les plats sur la table, et il sait à peine viser » ; « j’ai bien aimé la plage de l’hôtel, mais il y avait trop de sable à mon goût » ; « je n’ai pas pris une suite pour dormir dans un lit de camp »… Des mauvais retours, des raisons de se lamenter ? Non, vous venez simplement de faire un « REX client ».
Le REX n’est ni un dinosaure ni un chien policier allemand, mais un acronyme pour « retour d’expérience » ; certains préfèrent le mot-valise « Retex ». Faire des REX, c’est analyser la gestion d’événements passés pour en tirer des leçons.
Cette manière de faire provient de l’armée, créatrice du « débriefing », et des industries à risque, où l’on cherche à prévenir les accidents. Après Tchernobyl en 1986, le Commissariat à l’énergie atomique a revu la conception de ses réacteurs nucléaires. La même année, quand la navette spatiale Challenger a explosé en vol, la NASA a remis en question ses spécifications. Malheureusement pour cette dernière, le REX n’aura pas fonctionné : le drame s’est reproduit en 2003, avec la navette Columbia.
Démarche d’analyse
Tolérer l’échec mais refuser la récidive, voilà l’esprit du REX : pour reprendre la phrase cliché de Nelson Mandela, « je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends ». Le retour d’expérience s’inscrit dans la mode des méthodes dites « agiles », pour s’améliorer tout en renforçant l’esprit d’équipe. Il s’agit de détecter les anomalies, comme ce qui a marché.
Le REX se pose comme une véritable démarche d’analyse, sur le temps long. En cela, elle se distingue des traditionnels débriefings, ou des « feedbacks » que l’on fait remonter « ASAP » (pour « as soon as possible », ou « dès que possible », en anglais) à sa hiérarchie, pour littéralement « la nourrir en retour ».
Le feedback n’est que la première pierre à l’édifice du grand REX : cette phase réflexive qui, outre les retours d’expérience, s’appuie sur tout un arsenal de tableaux et de grilles d’analyse sur plusieurs mois. « Plus on remonte loin dans le passé, mieux on prépare le futur », disait Winston Churchill.
Les entreprises doivent faire preuve d’une méthode structurée, tel le chimiste qui cherche à comprendre pourquoi son expérience n’a pas fonctionné.
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