Bercy et les banques négocient âprement le sauvetage des grands groupes
Contrairement à une idée reçue, les marchés financiers sont ouverts. La plupart des grandes entreprises françaises, d’Airbus à Total en passant par Bouygues, n’ont pas eu besoin de la garantie de l’Etat pour se financer, soit à travers des émissions obligataires, soit par le biais de lignes de crédit obtenues auprès des banques, voire les deux.
Ces derniers jours, les multinationales européennes ont ainsi levé des sommes record. Airbus a obtenu auprès de ses banques un crédit syndiqué de 15 milliards d’euros. Le 3 avril, le site espagnol de réservation de voyages Amadeus a même annoncé avoir émis pour 1,5 milliard d’euros d’actions et d’obligations convertibles.
Cependant, aussi bien les marchés que les banques se montrent sélectifs : les entreprises qui sont mal notées par les agences de rating – dans le jargon, qui ne sont pas « investment grade » – ne bénéficient pas de ces accès. Même si le spécialiste de la sécurité suédois Verisure a rouvert, jeudi 16 avril, le marché européen des « junk bonds » (celui des emprunteurs à haut risque, inactif depuis près de deux mois), un prêt bancaire assorti d’une garantie de l’Etat peut se révéler nécessaire pour certains groupes. « Cela concerne environ 15-20 acteurs, à comparer aux 287 grandes entreprises répertoriées en France », souligne un dirigeant d’une banque française.
Depuis quelques semaines, Air France, Renault, Fnac-Darty, Europcar ou encore Conforama négocient avec leurs banques l’octroi de nouvelles lignes de crédit, sous condition de ce soutien public. Mais les discussions patinent.
Engagement « irrévocable et inconditionnel » de l’Etat
Toutefois, selon nos informations, un premier point de blocage vient d’être levé. Bruno Le Maire, le ministre de l’économie et des finances, a signé, jeudi, un arrêté qui précise l’engagement « irrévocable et inconditionnel » de l’Etat à honorer sa garantie sous 90 jours en cas d’incident de paiement. C’était un point technique essentiel pour les banques, car il a une incidence sur le niveau de leurs fonds propres, une ressource rare et chère.
Quand elles consentent un crédit à une entreprise, les banques inscrivent un engagement à leur bilan. En langage prudentiel, plus elles portent de risques, plus elles ont besoin de capital. En théorie, quand l’Etat garantit 90 % de ce crédit, les BNP Paribas, Crédit agricole ou Société générale ne devraient supporter que 10 % du risque.
Les banques font valoir que le prêt garanti par l’Etat ne devrait pas s’appliquer de la même manière pour une pizzeria ou une multinationale
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