« Comment on m’a démotivé » : Hommage aux héros du service public

« Comment on m’a démotivé » : Hommage aux héros du service public

« Comment on m’a démotivé. Un an dans la prison dorée d’une entreprise publique », de Denis Monneuse. Editions Deboeck Supérieur, 224 pages, 17,90 euros.
« Comment on m’a démotivé. Un an dans la prison dorée d’une entreprise publique », de Denis Monneuse. Editions Deboeck Supérieur, 224 pages, 17,90 euros.

Le Livre. « Le besoin d’exprimer mon dégoût devant cet immense gâchis » : voilà ce qui conduit Denis Monneuse à rédiger un journal intime professionnel. Lorsqu’il est embauché comme directeur adjoint chargé du développement durable par une grande entreprise publique française, le sociologue croit rêver. Son idylle tourne vite au cauchemar, si bien qu’au bout d’un an, il quitte l’entreprise. « J’étais plein d’énergie et d’enthousiasme au départ ; j’en suis sorti usé et totalement démotivé. » Ecrit à partir des notes prises quotidiennement pendant ces douze mois, Comment on m’a démotivé (Deboeck Supérieur) est le récit critique de cette expérience.

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Directeur d’un cabinet de conseil, conférencier, enseignant en ressources humaines, Denis Monneuse n’est pas mû par l’envie de se mêler à « la vindicte populaire contre les agents du service public » : les propos lapidaires hostiles au service public et aux fonctionnaires, confie-t-il, l’ont toujours mis mal à l’aise. Dans cette entreprise du service public, l’auteur a certes côtoyé des tire-au-flanc, des profiteurs, des planqués, des incompétents. Mais il a surtout rencontré une majorité de salariés découragés. « Je ne m’en prends donc pas aux individus, mais au système qui les entoure et, en partie, les conditionne », écrit-il. Parce qu’il serait dommage de ne se focaliser que sur le seul cas particulier d’un employeur.

Les dysfonctionnements du système

Le phénomène de démotivation va bien au-delà de cet exemple précis, l’entreprise a été anonymisée. Afin de ne blesser personne et de ne pas jeter l’opprobre sur tel ou tel ancien collègue, l’auteur a légèrement romancé les mots consignés jour après jour dans son journal intime professionnel. « J’ai par exemple interverti des personnages, fusionné certains traits, gommé des détails et flouté certains faits. Bref, ce récit se situe quelque part entre l’auto-ethnographie et le roman, dans un réel fictionné, dans ce qu’Aragon appelait le “mentir-vrai”. Tout est à la fois vrai et faux au sens où tous les détails sont faux, mais le fond de l’histoire, lui, est vrai. »

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L’ouvrage ne se veut pas un livre noir du service public, mais une critique plus subtile du monde du travail en général. En tant que consultant, Denis Monneuse croise un large éventail d’entreprises, rencontre des centaines de salariés chaque année et assure que ce qu’il observe dans le service public existe aussi dans le secteur privé. « La démotivation est sans doute à son paroxysme à S-P [l’entreprise du secteur public], mais n’épargne guère d’autres entreprises. C’est pourquoi tant de salariés font une crise de la quarantaine ou de la cinquantaine et cherchent du sens en tapant à la porte de l’économie sociale et solidaire ou bien rêvent d’intégrer une start-up ou une PME “à taille humaine”, pour fuir leur grosse entreprise qui se révèle une prison dorée. »

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