A l’alliance locale de Saint-Girons, « la société est transformée abondamment dure »
Dans la sous-préfecture de l’Ariège, la CGT arrange des constances procédurières pour supporter les salariés en pénurie.
C’est une femme au visage manifesté qui a poussé la porte de l’union locale CGT de Saint-Girons, sous-préfecture de l’Ariège, ce lundi de février. Cette salariée n’est pas syndiquée, mais elle ne savait pas vers qui se tourner. Dans sa boîte, une grosse PME, des syndicats, il n’y en a pas. Une de ses amies l’a persuadée de venir prendre conseil ici où, les lundis soir, une constance juridique ouverte à tous est organisée.
La dame veut ne pas donner son nom, ni même son prénom. Dans le Couserans, ce pays aux dix-huit vallées, tout le monde se connaît et son patron aurait rapidement l’identifier. La quinquagénaire l’accuse de vouloir se dégager d’elle et de lui augmenter sa charge de travail pour la pousser à la démission. Plus de vingt ans d’ancienneté et « pas une lettre » pour se plaindre d’elle, assure-t-elle. Depuis une dizaine de jours, elle est en arrêt maladie et elle a la boule au ventre à l’idée de retourner travailler. « Je suis morte, lâche-t-elle. Je n’ai pas la force de revenir. Je sais que je ne pourrai pas faire tout ce qu’ils me demandent. »
« Souffrance au travail »
Face à elle, Jean-Marie Munoz écoute. Ce militant CGT, retraité d’EDF, est un des bénévoles qui font tourner l’union locale (UL). Devant lui, un volumineux code du travail. Pas besoin de le défaire pour savoir que, sans preuve, la partie sera pénible. « Il y a de plus en plus de punition au travail, juge-t-il. Son cas n’est pas isolé : on a ça tous les lundis. Toutes les méthodes sont bonnes pour dégraisser, y compris déstabiliser les salariés. »
Jean-Marie Munoz est la mémoire vive des lieux. Le cégétiste a participé à sa création dans les années 1970. Une grande pièce au rez-de-chaussée d’une ancienne école que la mairie, qui paye également l’électricité et l’eau, met à disposition gracieusement. Une accommodement qui n’est pas écrit mais sans cesse renouvelé depuis. Situé à un petit kilomètre du centre-ville, le local et son panneau défraîchi pourraient approximativement circuler inaperçus pour celui qui ne connaît pas Saint-Girons. Mais ici on ne vient pas par hasard. La CGT est le dernier syndicat physiquement présent dans cette commune de 6 000 habitants qui couvre un bassin de vie bien plus large.
« On en arrive à faire le travail de l’Etat, déplore François Carbou, secrétaire général de l’UL. Même l’inspection du travail nous envoie des gens… »
L’Ariège compte cinq unions locales CGT. Celle de Saint-Girons, comme ses petites sœurs, garantis plusieurs missions : elle fédère une dizaine de syndicats cégétistes des environs, joue un rôle d’animation et de développement. Elle conseille pareillement les salariés en pénurie avec leur employeur, les aide à aménager un dossier, les assiste lors d’un entretien antérieur de licenciement, et peut les conduire jusqu’aux prud’hommes. « On en arrive à faire le travail de l’Etat, déplore François Carbou, secrétaire général de l’UL. Même l’inspection du travail nous envoie des gens… »