A Marseille, où la réforme du RSA est expérimentée : « Ce n’est pas du travail gratuit »
Sous la lumière blanche des néons, Merouane, le regard timoré, entre dans le bureau exigu du Pôle d’insertion des Bouches-du-Rhône, dans le 5e arrondissement de Marseille. L’homme de bientôt 50 ans, au français hésitant, est allocataire du revenu de solidarité active (RSA) « depuis plusieurs années ». Suffisamment pour en avoir oublié le nombre exact. Ce mardi 10 octobre, il est accueilli chaleureusement par deux conseillers, l’un de Pôle emploi, et l’autre du département, pour un rendez-vous de « diagnostic ». « Vous êtes ici car vous allez bénéficier d’un nouveau type d’accompagnement qui doit vous permettre de sortir plus rapidement du RSA », promet Jérémie Kibongui, le conseiller insertion du département.
Depuis mi-mai, les Bouches-du-Rhône participent, comme dix-sept autres départements, à une expérimentation de la réforme du RSA, qui inscrit tous les allocataires à Pôle emploi et conditionne le versement de l’allocation à une quinzaine d’heures d’activité hebdomadaires. La mesure est l’un des points majeurs – avec la création, en 2024, de France Travail en remplacement de Pôle emploi, pour transformer le service de l’emploi et de l’insertion – du projet de loi pour le « plein-emploi » adopté à l’Assemblée nationale, mardi. Dans le département présidé par Martine Vassal (Les Républicains), l’expérimentation, qui concerne actuellement 718 allocataires, se déroule dans les 5e et 7e arrondissements de la cité phocéenne, situés dans le centre-ville, moins touchés par la précarité que peuvent l’être les quartiers nord. Un choix qui a surpris les acteurs locaux.
« On se questionne sur le choix de ces arrondissements où on retrouve des allocataires qui n’ont pas les plus grandes difficultés comme c’est le cas de ceux des quartiers nord, explique Audrey Garino, conseillère départementale d’opposition et adjointe aux affaires sociales de la mairie de Marseille. On n’y trouve pas les mêmes problématiques de transport, par exemple. » Ces arrondissements, qui recensent 2 400 bénéficiaires du RSA sur les 63 000 que compte le département, « correspondent au bassin d’emploi souhaité par le gouvernement », répond Sabine Bernasconi, vice-présidente du département déléguée à l’insertion professionnelle.
« C’est adapté aux personnes »
Après ce premier rendez-vous rapide, les bénéficiaires du RSA sont orientés de trois façons possibles : soit un accompagnement professionnel vers l’emploi (55 % des allocataires suivis), soit une suite socioprofessionnelle (33 %), soit un parcours social dit de « remobilisation » pour les plus éloignés de l’emploi (12 %). Pour rassurer Merouane, qui touche un RSA couple de 911 euros (607 euros pour une personne seule), les deux conseillers expliquent calmement le nouveau parcours qui l’attend. S’il souhaite bel et bien travailler, comme agent de sécurité, de préférence de nuit « pour être disponible en journée pour prendre soin de [s]a femme », qui a de gros problèmes de santé, il est plutôt orienté vers un accompagnement socioprofessionnel qui doit notamment lui permettre de demander le statut d’aidant familial.
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