Le SOS des maraîchers nantais face aux surcoûts générés par la guerre en Ukraine
« On est tous dans le même bateau. On ne fait que subir et, tous les jours, la situation empire. » Le cri d’alarme est signé Jean-François Vinet, codirigeant de la société de maraîchage Les Trois Moulins, à Saint-Philbert-de-Grand-Lieu, à 25 kilomètres au sud de Nantes. La profession, qui sortait à peine la tête de l’eau après la crise sanitaire due au Covid-19, plonge de nouveau dans le rouge depuis le début de la guerre en Ukraine. L’équation est intenable : les charges relatives aux intrants agricoles « explosent ». Les factures énergétiques flambent vertigineusement et, en un an, le prix des engrais a doublé, et celui d’autres matières nécessaires à la production – sable (+ 10 %), film de protection des cultures (+ 55 %), cartons pour emballer les marchandises (+ 35 %) – bondissent aussi dangereusement. Le CO2, utilisé en apport pour les cultures sous serre, voit aussi son prix s’envoler (+ 45 %).
La cote d’alerte est atteinte au pays de la mâche, production-phare qui pèse 30 000 tonnes annuelles, soit 85 % de la production nationale. A tel point que Philippe Retière, président de la Fédération des maraîchers nantais, s’est fendu d’un courrier pour interpeller le préfet et les parlementaires de Loire-Atlantique, mais aussi le ministre de l’agriculture, Julien Denormandie, et le premier ministre, Jean Castex, sur la gravité de la situation. A l’échelle des 200 entreprises de production de la fédération, soit 5 000 emplois équivalents temps plein revendiqués, « le surcoût annuel va atteindre 100 millions d’euros », expose M. Retière, qui dénonce « un impact inconcevable sans une revalorisation des prix payés aux producteurs doublée d’un soutien direct à la production de la part de l’Etat ».
Moins produire
Maraîcher serriste à Bouguenais, à 6 kilomètres de Nantes, Louis Vinet, spécialisé dans la production de concombres, serre les dents. « Les producteurs agricoles sont le premier maillon de la chaîne, souffle-t-il. La guerre en Ukraine nous met à terre, on se prend un peu toutes les hausses dans la gueule. » Le maraîcher, qui table sur une production annuelle de 6 millions de concombres, a d’ores et déjà décidé de réduire la voilure. « Cette année, on fera un million de pièces en moins, affirme-t-il. On va être contraints de moins chauffer les serres, donc de moins produire. On arrêtera les frais à la fin du mois d’août au lieu de poursuivre l’activité jusqu’à octobre, sous peine de produire à perte. »
La vingtaine de salariés permanents de l’entreprise risque d’être au chômage technique durant un mois à l’automne. Et le renfort de travailleurs, en pleine saison, sera moindre que prévu : une vingtaine de contrats, contre une trentaine en temps normal.
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