Tom Chevalier : « En France, les jeunes sont vus comme des (grands) enfants »
Tribune. En France, pour accéder au revenu de solidarité active (RSA), une limite d’âge a été fixée à 25 ans : c’est une situation quasi unique en Europe. Alors que la tranche d’âge des 18-24 ans est la plus touchée par la pauvreté (23 % en 2018, contre 13 % pour l’ensemble de la population et 8,6 % pour les plus de 65 ans, selon l’Insee), elle est aussi paradoxalement celle qui est privée de la principale prestation de lutte contre la pauvreté.
Ce problème a été progressivement pris en compte par le gouvernement à cause de la crise économique et sociale qui a accompagné la crise sanitaire liée au Covid-19. Le débat s’est structuré autour de l’alternative suivante : ouvrir le RSA aux moins de 25 ans ou étendre la garantie jeunes. Le gouvernement a choisi la seconde option, en réformant la garantie jeunes et en lançant le nouveau contrat d’engagement jeune (CEJ), le 1er mars 2022.
Aligner les statuts
Pourtant, à la lumière des exemples nordiques, cette alternative ne constitue pas une opposition et l’enjeu de l’accès des jeunes à un revenu la dépasse d’ailleurs largement.
Je propose ainsi, dans une note du 20 janvier pour Terra Nova (« Soutenir les jeunes adultes »), d’adopter un point de vue plus global sur la place de la jeunesse dans le système de protection sociale en faisant quatre propositions de réforme.
Le premier enjeu renvoie à la limite d’âge ouvrant droit aux prestations sociales. En France, les jeunes sont vus comme des (grands) enfants : comme tels, ils ne peuvent pas demander le RSA en leur nom propre, en raison d’une limite d’âge élevée (25 ans) pour y prétendre, distincte des autres limites d’âge présentes dans l’action publique (18 ans) – à deux exceptions près, pour les moins de 25 ans ayant un enfant à charge et pour les jeunes justifiant d’une certaine durée d’activité professionnelle (RSA jeune actif).
La majorité sociale est par conséquent plus tardive que la majorité civile ou politique. Or, dans la plupart des pays européens, vous devenez adulte à partir de 18 ans, y compris pour la protection sociale. La première proposition consisterait donc à aligner les statuts, en ouvrant le RSA aux jeunes adultes de moins de 25 ans.
Si le débat en France s’est concentré sur l’enjeu du RSA, il faut aussi apprécier les autres prestations de la couverture chômage, qui permettent aux chômeurs d’obtenir un complément de revenu, et notamment la garantie jeunes. Les deux prestations ne sont pas contradictoires, à condition de clarifier le périmètre de chacune d’entre elles.
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