Du mieux pour les lanceurs d’alerte

Du mieux pour les lanceurs d’alerte

Carnet de bureau. Irène Frachon (Mediator), Edward Snowden (écoutes illégales), mais aussi Marine Martin, Denis Breteau, et tant d’autres : les lanceurs d’alerte sont de plus en plus nombreux à oser dénoncer les crimes, délits ou simples menaces portés contre l’intérêt général par les entreprises. C’est au rythme d’une quinzaine par mois qu’ils se présentent désormais à la Maison des lanceurs d’alerte. Depuis sa création en 2018, cette association en a accueilli 316, dont 185 rien qu’en 2021, en particulier issus d’entreprises des secteurs de la santé, de l’environnement et de la finance.

Adoptée début février par l’Assemblée nationale, la proposition de loi du député Sylvain Waserman (MoDem) relative à la protection des lanceurs d’alerte vient de donner à ces salariés ou ex-salariés l’espoir que leur signalement aboutisse moins difficilement.

Quelques obstacles ont en effet été levés. « Ils ne doivent désormais plus passer par leur hiérarchie pour faire un signalement ; ils peuvent aussi faire appel à une organisation ou à un syndicat, et ils sont protégés par l’irresponsabilité civile ou pénale », explique Glen Millot, le délégué général de la Maison des lanceurs d’alerte, qui salue « des avancées significatives ». La proposition de loi Waserman apporte aussi une aide financière aux lanceurs d’alerte, protège les « facilitateurs », à savoir les organisations qui les accompagnent, et leur permet de saisir directement une autorité indépendante.

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Mais la situation va rester compliquée. « Ce que je regrette surtout, c’est l’absence de soutien psychologique. Face aux pressions des laboratoires, aux questions des médias, pendant des années de combat, on se sent très seul », souligne Marine Martin, lanceuse d’alerte sur les risques de la Dépakine prescrite aux femmes enceintes jusqu’en 2017, un antiépileptique responsable de troubles physiques et autistiques de milliers d’enfants.

Spirale

Malgré l’obligation européenne depuis 2019 d’établir des canaux de signalement dans toutes les entreprises privées d’au moins 50 salariés, en France, « seule une entreprise sur deux a mis en place un circuit de signalement », indique Franca Salis-Madinier, secrétaire nationale de la CFDT cadres et rapporteuse au Comité économique et social européen d’un avis sur la protection des lanceurs d’alerte en Europe. Un cadre pourtant vital à la résolution des affaires.

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Au départ, quand un cadre alerte son entreprise en interne, il ne se reconnaît pas comme lanceur d’alerte, le plus souvent, il veut juste régler un problème, qu’il s’agisse de fraude financière, d’atteintes à l’environnement, voire de risques sanitaires. Puis il est emporté dans une spirale, où il perd souvent son travail, et pas seulement. « Le cadre juridique de la loi Sapin II [de 2016] était très protecteur, mais ça ne m’a pas empêché d’être licencié », témoigne Denis Breteau, lanceur d’alerte et ex-cadre à la direction des achats de la SNCF. « Financièrement, c’est très lourd. La perte d’un salaire fait qu’on ne peut plus poursuivre la procédure judiciaire. Chaque expertise coûte très cher », renchérit Marine Martin.

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LJD

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