Une annonce gouvernementale n’est pas la loi

Une annonce gouvernementale n’est pas la loi

Droit social. Depuis la crise sanitaire, l’annonce gouvernementale en formation spécialisée du conseil de « défense sanitaire » est devenue une quasi-source de droit. Cette structure de décision auto-organisée par l’exécutif est compétente de par une interprétation large de la notion de « sécurité nationale ». A l’origine, la Constitution de la Ve République attribue à l’autorité réglementaire une compétence de principe, tandis qu’elle confie au législateur une compétence limitée : le Parlement a essentiellement pour fonction de légitimer et de soutenir l’action du gouvernement.

La loi française est donc autant l’œuvre du gouvernement, disposant de puissants outils, que du Parlement. L’on sait également que le recours aux ordonnances – un transfert du pouvoir législatif vers l’exécutif avec ratification a posteriori, va croissant dans le champ du social. S’y ajoute donc l’annonce gouvernementale, à l’issue d’un « conseil de défense sanitaire », diffusée soit directement dans les médias, soit au moyen de communiqués de presse, puis dans des Foires aux questions (FAQ) ou des « questions-réponses » publiées sur les sites ministériels et transcrits, parfois, plus tard, dans des circulaires ministérielles.

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Ainsi, lors de son allocution du 27 décembre 2021, le premier ministre a indiqué qu’à compter de la rentrée et pour une durée de trois semaines, « le recours au télétravail sera rendu obligatoire […] à raison de trois jours minimum par semaine et si possible quatre jours, quand cela est possible ». Le 30 décembre, la ministre du travail, Elisabeth Borne, a annoncé vouloir faire sanctionner les entreprises récalcitrantes au télétravail rendu obligatoire.

Des recommandations et non des obligations

La loi subséquente du 22 janvier 2022 permet à l’inspecteur du travail, mettant en œuvre une procédure particulière, de sanctionner l’employeur d’une amende administrative de 500 euros par salarié, dès lors que le non-respect des principes généraux de prévention a fait naître une situation dangereuse, résultant d’un risque d’exposition au Covid-19. On pourrait donc penser que le non-respect de l’organisation temporaire du télétravail peut être sanctionné de la sorte.

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Il n’en est rien. Selon le Conseil d’Etat, le protocole sanitaire n’est qu’« un ensemble de recommandations pour la déclinaison matérielle de l’obligation de sécurité de l’employeur, dans le cadre de l’épidémie de Covid-19, en rappelant les obligations qui existent en vertu du code du travail ». L’organisation de la répartition du temps télétravaillé n’est pas régie par le code du travail. Elle relève de l’accord national interprofessionnel étendu du 26 novembre 2020, qui, en cas d’urgence, par exemple lors d’une pandémie, renvoie à la seule décision d’organisation de l’employeur.

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LJD

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