Carnet de bureau. Ce n’est rien de moins qu’une « révolution culturelle »,assurela ministre du travail et de l’emploi, Astrid Panosyan-Bouvet, à propos des nouvelles obligations de transparence salariale. Invitée par l’Association des journalistes de l’information sociale, le 3 avril, elle a annoncé pour septembre un premier texte de transposition de la directive européenne, qui doit être réalisée d’ici à juin 2026.
Dès l’année 2026, la directive européenne obligera ainsi les employeurs à « informer les demandeurs d’emploi du salaire de départ ou de la fourchette de rémunération initialedes postes publiés » et, dans l’entreprise, à communiquer les rémunérations médianes pour chaque type de poste. « Les offres devront être beaucoup plus précises : offre de rémunération, fourchette étroite et interdiction pour un recruteur de demander la rémunération actuelle, ce qui jouera un rôle important pour les femmes », a précisé la ministre du travail et de l’emploi.
Une révolution en effet, quand évoquer son salaire est toujours tabou. La journaliste Nathalie Saint-Cricq, qui l’avait divulgué dans un article de Libération, a été interpellée par RTL sur les raisons qui l’avaient poussée à le faire. « Je ne vois pas pourquoi j’aurai dit : “Je ne vous le donne pas” », a-t-elle répondu à l’antenne en janvier.
A la Défense (Hauts-de-Seine), le 4 septembre 2015. FLORIAN DAVID / AFP
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A l’usine Renault de Cléon (Seine-Maritime), le 18 juin 2015. CHARLY TRIBALLEAU / AFP
« Il y a d’abord eu une fatigue qui s’est installée. Puis, au fil des mois, une difficulté à me concentrer. Le moral était bas. Je prenais du retard et j’ai commencé à douter. J’ai préféré ne plus me positionner sur de gros projets. Je suis restée dans l’entreprise, mais en retrait, sans ambition. » Durant plusieurs années, Nathalie, cadre dans le secteur informatique, a subi de nombreux symptômes qui ont altéré ses capacités professionnelles. Les antidépresseurs prescrits par son médecin n’ont pu lui permettre de retrouver son état de forme initial. Et pour cause : ces troubles étaient liés à son entrée en préménopause.
C’est là l’un des principaux freins à la prise en charge de la ménopause : « Les symptômes sont peu connus, y compris par les femmes », relève Florence Chappert, responsable du projet « Genre, égalité, santé et conditions de travail » à l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail. Une difficulté renforcée par le fait que ces mêmes symptômes peuvent être multiples (bouffées de chaleur, douleurs articulaires, troubles urinaires, « brouillard cérébral »…) et d’une intensité inégale. « S’ajoute à cela un tabou considérable autour du sujet, poursuit la gynécologue Brigitte Letombe. Il est très dur, pour une femme, d’oser évoquer, dans l’entreprise comme dans la société, ses problèmes de santé et sa ménopause, tant cela sera associé à son propre vieillissement. »
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Le siège du Groupe Les Echos-Le Parisien, à Paris, le 20 décembre 2022. CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP
Moins de deux mois après l’annonce d’un plan d’économies assorti d’un projet de suppression de 39 postes (dont 29 parmi les journalistes, sur un effectif de 400) au Parisien, la tension n’est toujours pas retombée au quotidien du groupe Les Echos-Le Parisien (propriété de LVMH). Pour la troisième fois depuis la mi-février, une assemblée générale s’est conclue, mardi 8 avril après-midi, par le vote d’une motion. Approuvée par 77 % des 333 votants (255 pour, 60 contre et 18 bulletins blancs), elle donne mandat aux organisations syndicales « pour obtenir le maintien des effectifs suffisants, notamment dans les éditions locales, à condition qu’il n’y ait pas de départ contraint ni de mobilité forcée ».
Dès la première AG, le 13 février, le collectif avait fait connaître ses inquiétudes quant à ses futures conditions de travail, une fois les postes sacrifiés sur l’autel des économies rendues nécessaires par une année 2024 une nouvelle fois déficitaire (33 millions d’euros de pertes). Le 6 mars, c’est en décidant d’une grève de vingt-quatre heures, assortie d’une motion de défiance contre la direction, que la rédaction avait réaffirmé son opposition à « la réorganisation de la rédaction telle qu’envisagée ».
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Lors d’une manifestation devant une agence Société générale-Crédit du Nord, à Lille, le 25 mars 2025. SAMEER AL-DOUMY / AFP
Après la mobilisation contre la réforme des retraites et les congrès, la représentativité syndicale chez les salariés du privé reste inchangée, avec la CFDT, la CGT et FO dans le trio de tête, mais en léger recul, contrairement aux plus petites organisations qui progressent, selon des chiffres de la direction générale du travail (DGT) publiés mardi 8 avril.
La CFDT, qui avait ravi en mars 2017 la place de premier syndicat du privé à la CGT, a obtenu 26,58 % des voix (contre 26,77 % en 2021), devant la centrale de Montreuil qui se classe deuxième avec 22,21 % (contre 22,96 % précédemment), d’après la DGT. Force ouvrière (FO), troisième, obtient 14,91 % (contre 15,24 % en 2021), tandis que la CFTC se classe toujours cinquième en progressant très légèrement (9,58 % contre 9,50 %).
« Pour la troisième fois consécutive, les salariés ont porté la CFDT à la première place des organisations syndicales françaises », a salué dans un communiqué la centrale dirigée par Marylise Léon.
Congrès au printemps 2026
La CGT n’a pas pu regagner la première sa place en dépit de son score obtenu dans le scrutin des très petites entreprises (TPE) et des employés chez des particuliers (avec 27,64 % des suffrages exprimés, contre 14,86 % pour la CFDT).
Depuis la réforme de la représentativité syndicale de 2008, cette audience est calculée tous les quatre ans en additionnant les suffrages recueillis par les syndicats lors des élections professionnelles (CSE) organisées dans les entreprises d’au moins 11 salariés et dans les TPE, ainsi que lors des élections dans les chambres départementales d’agriculture.
Les syndicats représentatifs, recueillant plus de 8 % des suffrages, peuvent négocier des accords, désigner des conseillers aux prud’hommes, percevoir des subventions. L’enjeu est essentiel pour les organisations syndicales, particulièrement pour les trois premières avant leurs congrès respectifs prévus au printemps 2026, car la mesure de la représentativité dessine les rapports de force à l’intérieur des centrales comme à l’extérieur.
La surprise vient du syndicat des cadres, la CFE-CGC, qui connaît une progression de 1,05 % (avec 12,95 % contre 11,90 %), talonnant ainsi FO de deux points. « On progresse chez les cadres comme chez les techniciens et agents de maîtrise », s’est réjoui le président de la CFE-CGC, François Hommeril, qui incarne une ligne plus combative au sein de son organisation.
Pour le syndicaliste, « les évolutions en termes d’audience sont inscrites dans la durée, ce n’est pas comme en politique où des gens inconnus deux ans plus tôt peuvent se présenter et être élus », a-t-il ajouté dans une allusion au président français, Emmanuel Macron.
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Le résultat de cette séquence électorale était aussi essentiel pour les plus petits syndicats comme Solidaires et l’UNSA, qui jouissent de scores élevés dans certains secteurs (respectivement l’aide à domicile et la petite enfance) et espéraient encore devenir représentatifs.
Séquence favorable aux syndicats
Las, la marche reste encore un peu haute. L’UNSA obtient ainsi 6,45 % (contre 5,98 %) et Solidaires décroche 3,75 % des suffrages (contre 3,66 %). « Quand la majorité des autres organisations baissent ou stagnent, l’UNSA connaît la deuxième meilleure progression sur l’ensemble du champ des salariés du privé », s’est réjouie l’organisation dans un communiqué publié mardi.
« Les résultats sont globalement positifs, avec l’obtention de la représentativité dans de nouvelles branches », souligne auprès de l’Agence France-Presse Aurélien Bourdon, secrétaire national de Solidaires, « conscient du chemin qui reste à parcourir ».
Cependant, peu de salariés ont participé aux différents scrutins, qui se sont pourtant déroulés après une séquence favorable aux syndicats, celle de la mobilisation contre la réforme des retraites en 2023, avec des cortèges importants partout en France. La mobilisation s’était traduite par une forte hausse des adhésions dans chaque organisation, mais celle-ci ne s’est pas traduite concrètement dans les urnes.
Un rapport de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du travail, publié en janvier, pointait ainsi une baisse de trois points de pourcentage du nombre d’entreprises ayant une instance élue de représentants du personnel et une baisse de cinq points, entre 2017 et 2023, du nombre de celles ayant des délégués syndicaux.
Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail, et François Bayrou, premier ministre (à droite), lors d’une visite à l’agence gouvernementale France Travail à Nanterre, le 4 avril 2025. THIBAUD MORITZ/AFP
Les demandeurs d’emploi vont-ils être soumis à un énième tour de vis ? Le devenir de l’assurance-chômage a, en tout cas, été examiné lors d’une récente réunion à l’Elysée, comme l’a révélé le quotidien L’Opinion daté du lundi 7 avril. Officiellement, aucun scénario concret n’est privilégié, mais l’exécutif reconnaît que le dossier est posé sur la table, parmi d’autres.
La rencontre a eu lieu le 3 avril au 55, rue du Faubourg-Saint-Honoré, à Paris. Emmanuel Macron recevait le chef du gouvernement, François Bayrou, ainsi que plusieurs ministres, dont celle qui est chargée du travail, Astrid Panosyan-Bouvet, pour discuter de l’agenda des réformes. L’objectif était d’identifier des solutions afin de réduire les déficits publics, tout en finançant les dépenses de défense, alors que le contexte économique et géopolitique ne cesse de s’assombrir, avec la guerre commerciale déclarée par le chef d’Etat américain, Donald Trump.
C’est dans ce cadre que l’hypothèse d’une nouvelle transformation de l’assurance-chômage a été mentionnée, sans que des idées précises émergent. Mais le simple fait d’évoquer cette piste retient l’attention, car le système d’indemnisation des demandeurs d’emploi a déjà connu de nombreux changements depuis l’arrivée à l’Elysée de M. Macron, en 2017. Le pouvoir en place a durci les règles à plusieurs reprises, puis les partenaires sociaux, qui gèrent le régime à travers l’association paritaire Unédic, se sont réinstallés aux commandes pour aboutir, en novembre 2024, à un accord agréé par le gouvernement.
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La coconstruction avec l’enseignement supérieur affichée par Elisabeth Borne ressemble davantage à une reprise en main de la formation par le ministère de l’éducation nationale, sans moyens supplémentaires pour les universités.
Les entreprises françaises souhaitant un vaste retour au bureau ont désormais une alliée : la Cour de cassation. Son arrêt du 19 mars indique que « l’occupation du domicile du salarié à des fins professionnelles constitue une immixtion dans sa vie privée, de sorte qu’il peut prétendre à une indemnité dès lors qu’un local professionnel n’est pas mis à sa disposition ». Jusque-là, rien de nouveau : il en va ainsi pour un travailleur itinérant ne disposant d’aucun bureau et consacrant donc une partie de son domicile à son activité professionnelle.
C’est l’ajout suivant qui détonne : « ou qu’il a été convenu que le travail s’effectue sous la forme du télétravail ». Or, légalement, le télétravail doit résulter d’un double accord : cela signifie donc que s’il est « convenu », cela entraîne le versement de cette « indemnité compensant la sujétion résultant de cette modalité d’exécution du contrat ». « Sujétion », mais donc librement choisie, et plébiscitée car fondée sur l’équation globale du télétravail : flexibilité et meilleur équilibre vie professionnelle et vie personnelle.
Certes, l’envolée de la facture énergétique pèse lourdement sur les ménages comme sur nombre de (grandes) entreprises, qui ont comprimé leurs coûts immobiliers avec de rudes programmes de « flex office », réduisant excessivement les postes disponibles. Reste à savoir qui doit payer l’électricité nécessaire au télétravail.
Que disent les textes ? L’ordonnance du 22 septembre 2017 a supprimé l’obligation patronale de prise en charge des coûts liés au télétravail, et l’accord interprofessionnel du 26 novembre 2020 en a fait également le thème d’une éventuelle négociation. Prudent, aucun n’évoque cette onéreuse prise en charge spécifique, par ailleurs rarissime en Europe – c’est le cas par exemple au Portugal.
Frais récurrents
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Première femme à diriger le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres), la scientifique est entrée en fonctions en pleine crise de l’institution. Dans un entretien au « Monde », elle liste les changements qu’elle compte apporter et réaffirme que l’existence et l’indépendance du Hcéres sont des garants de la démocratie.
Des syndicalistes de SUD-Rail, le 2 juin 2016, à Rennes. DAMIEN MEYER / AFP
Le syndicat SUD-Rail a appelé, vendredi 4 avril, les contrôleurs de TGV à se mettre en grève les vendredi 9, samedi 10 et dimanche 11 mai, en plein week-end de pont du 8 mai, pour dénoncer la dégradation de leurs conditions de travail. Le syndicat a aussi appelé les conducteurs à faire grève le 7 mai.
SUD-Rail, deuxième syndicat du groupe chez les contrôleurs, avait déposé fin mars un préavis allant du 17 avril au 2 juin, couvrant ainsi les vacances scolaires et les ponts du printemps. Le syndicat a donc mis sa menace à exécution après « trois réunions stériles sans le moindre engagement de la direction », a-t-il écrit dans un tract.
SUD-Rail critique notamment les changements de planning constants à la dernière minute. Il réclame, outre des plannings mieux anticipés, une augmentation de 100 euros par mois de la prime de travail des contrôleurs.
Dialogue social tendu
Cette catégorie s’est surtout mobilisée ces dernières années par le biais d’un collectif informel créé sur un groupe Facebook et baptisé « Collectif national ASCT » (CNA). Ce collectif n’a pour le moment pas fait savoir s’il va rejoindre le mouvement lancé par SUD-Rail. Lors des deux dernières grèves à l’initiative du CNA à Noël 2022 et en février 2024, plusieurs centaines de milliers de personnes avaient vu leurs trains annulés.
Le dialogue social s’est tendu ces dernières semaines à la SNCF sous l’impulsion de SUD-Rail. Le syndicat a quitté les négociations des droits syndicaux dans le cadre de l’ouverture à la concurrence et de l’éclatement du groupe en de multiples filiales.
En fin d’année 2024, il avait été, sans succès, à la pointe du combat contre la liquidation de Fret SNCF, transformé en deux filiales avec suppression de 500 emplois.
Un livreur d’Uber Eats à Toulouse, le 18 mars 2025. ED JONES / AFP
L’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi (ARPE), s’appuyant sur les données des plateformes de livraison, dévoile vendredi 4 avril que le taux de rémunération horaire brute des livreurs indépendants – 71 000 personnes en France – a chuté ces quatre dernières années.
Entre 2021 et 2024, en tenant compte de l’inflation, ce taux baisse de 34,2 % chez Uber Eats, de 26,6 % chez Stuart et de 22,7 % chez Deliveroo. Un aveu d’échec, selon le syndicat Union-Indépendants, de l’accord signé en 2023 prévoyant que les plateformes versent aux livreurs un revenu minimal horaire de 11,75 euros brut.
L’ARPE a aussi constaté que les temps d’attente entre deux courses s’étaient allongés, de 16,9 % chez Deliveroo et de 35,3 % chez Uber Eats, même si ce calcul « ne prend pas en compte le recours simultané à plusieurs plateformes par un même travailleur » et qu’en réalité le livreur peut ne pas attendre mais effectuer une course pour une autre plateforme.
« Garantie horokilométrique »
Le syndicaliste Fabian Tosolini, d’Union-Indépendants, explique auprès de l’Agence France-Presse (AFP) que les livreurs sont obligés de parcourir des « zones de livraison s’étendant de plus en plus ». Ils se retrouvent ainsi contraints de troquer leur vélo contre un scooter ou une voiture, avec les frais que cela engendre.
« Nous entendons [les] demandes [des livreurs] de rééquilibrer les revenus », a réagi Uber Eats auprès de l’AFP. L’entreprise se déclare « favorable à la mise en place d’un revenu minimal par course et d’une garantie horokilométrique » calculée en fonction de la durée et de la distance des courses, et chiffre à 20,50 euros le revenu horaire brut moyen en 2024 de ses livreurs partenaires. Deliveroo évoque pour sa part, entre 2021 et 2024, un revenu moyen par prestation qui a « toujours été supérieur à 5,50 euros, atteignant 5,70 euros (…) sur 2024 », et un « revenu horaire brut en course (…) de 26,31 euros par heure ».
Union-Indépendants a également analysé les données des plateformes de voitures de transport avec chauffeur (VTC), comme Bolt et Uber, et constate une « baisse continue et généralisée des revenus » entre 2022 et 2024. Le taux horaire s’est effondré de 12 % – soit une perte de 9 500 euros de chiffre d’affaires – chez Bolt, et de 1 % chez Uber, d’après le syndicat, qui souligne que « les travailleurs doivent rester connectés deux fois plus longtemps pour gagner autant ».
Un accord collectif prévoit un revenu minimum de 9 euros par course et de 30 euros de l’heure (sans compter les temps d’attente) pour les chauffeurs VTC. Chez Uber, le temps d’attente moyen entre deux courses a quasiment doublé en deux ans, d’après Union-Indépendants. Un étirement du temps qui provient de « l’afflux de plus en plus important de chauffeurs », saturant l’offre, selon M. Tosolini.