Archive dans février 2024

Accidents du travail : les jeunes paient un lourd tribut


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Quatre jours. L’unique expérience professionnelle de Jérémy Wasson n’aura pas duré plus longtemps. Le stage d’observation de cet étudiant en première année à l’Ecole spéciale des travaux publics, du bâtiment et de l’industrie (ESTP) devait durer deux mois, dans l’entreprise Urbaine de travaux (filiale du géant du BTP Fayat). Le 28 mai 2020, il est envoyé seul sur le toit du chantier du centre de commandement unifié des lignes SNCF de l’Est parisien, à Pantin (Seine-Saint-Denis). A 13 h 30, il fait une chute en passant à travers une trémie de désenfumage – un trou laissé dans le sol en attente d’aménagement – mal protégée. Il meurt deux jours plus tard, à 21 ans.

Lire la tribune : Article réservé à nos abonnés Accidents du travail : « Pour une politique zéro mort ! »

L’accident de Jérémy a laissé la grande école du bâtiment en état de choc. « C’est ce qui m’est arrivé de pire en trente ans d’enseignement supérieur », exprime Joël Cuny, directeur général de l’ESTP, directeur des formations à l’époque. La stupeur a laissé la place à de vibrants hommages. Un peu courts, toutefois… L’ESTP ne s’est pas portée partie civile au procès, regrette Frédéric Wasson, le père de Jérémy, qui souligne que « Fayat est l’entreprise marraine de la promo de [s]on fils… », ou que, dès 2021, Urbaine de travaux reprenait des dizaines de stagiaires issus de l’école.

Stagiaires, élèves de lycées professionnels en période de formation en milieu professionnel, apprentis… Les jeunes paient un lourd tribut parmi les morts au travail : trente-six travailleurs de moins de 25 ans n’ont pas survécu à un accident du travail en 2022, selon le dernier bilan de la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM). C’est 29 % de plus qu’en 2019. Et encore cela ne porte que sur les salariés du régime général. La CNAM souligne aussi que, par rapport aux autres accidents du travail, il s’agit davantage d’accidents « classiques, c’est-à-dire hors malaises et suicides », et d’accidents routiers.

« Irresponsabilité totale »

L’inexpérience de ces jeunes, quand elle n’est pas compensée par un accompagnement renforcé, explique en partie cette surmortalité. Quelque 15 % des accidents graves et mortels surviennent au cours des trois premiers mois suivant l’embauche, et plus de la moitié des salariés de moins de 25 ans morts au travail avaient moins d’un an d’ancienneté dans le poste.

Tom Le Duault a, lui, perdu la vie le lundi 25 octobre 2021. Cet étudiant en BTS technico-commercial entame alors son quatrième contrat court dans l’abattoir de LDC Bretagne, à Lanfains (Côtes-d’Armor). Sa mère y travaille depuis vingt-neuf ans, et il espère ainsi mettre un peu d’argent de côté. Comme lors de ses premières expériences, il est « à la découpe », où il s’occupe de mettre en boîte les volailles. Ce matin-là, un salarié est absent. Tom doit le remplacer dans le réfrigérateur où sont stockées les caisses de viande. Il est censé y empiler les boîtes avec un gerbeur, un appareil de levage.

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Casino a trouvé un accord avec Carrefour pour lui céder vingt-cinq magasins

Le distributeur Casino, en proie à de graves difficultés financières, a annoncé jeudi 8 février avoir conclu un accord avec Carrefour pour lui céder vingt-cinq supermarchés et hypermarchés.

« La réalisation des cessions [aurait lieu] le 30 avril 2024, après la consultation des instances représentatives du personnel concernées », selon un communiqué du groupe Casino, qui ne donne pas la liste des magasins concernés.

Les vingt-cinq enseignes font partie d’un ensemble de 288 hypermarchés et supermarchés dont Casino avait acté à la fin de janvier la vente à Auchan et Intermarché. Le même jour, Carrefour avait annoncé être entré en « négociations exclusives » avec Intermarché pour lui racheter une partie du parc de magasins vendu par Casino, pour éviter des problèmes de concurrence.

Des craintes pour les 50 000 salariés

Alors que le démantèlement du groupe Casino suscite des craintes parmi ses quelque 50 000 salariés, « Carrefour a pris des engagements sociaux similaires à ceux du groupe Les Mousquetaires [propriétaire d’Intermarché] envers les salariés affectés aux magasins et aux stations-service transférés », précise dans le communiqué publié jeudi le distributeur basé à Saint-Etienne. Le tribunal de commerce de Paris doit examiner lundi le projet de plan de sauvegarde accélérée du groupe Casino.

En grande difficulté, le distributeur a signé en juillet un accord prévoyant la restructuration de sa dette et un changement d’actionnariat d’ici à mars ou avril. C’est le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, le Français Marc Ladreit de Lacharrière et le fonds britannique Attestor, qui doivent en prendre les commandes à cette date.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés L’effondrement de Casino promet une nouvelle vague de consolidation

Casino précise jeudi que la cession des vingt-cinq magasins à Carrefour est conditionnée à l’obtention de « toutes les autorisations usuelles », et notamment celles des « autorités de la concurrence compétentes ».

A la fin de décembre, l’Autorité de la concurrence avait contraint Intermarché à céder à ses rivaux trois des soixante et un magasins acquis auprès de Casino dans le cadre d’une première vague de cessions de magasins.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Casino veut lancer un plan social dans les bureaux et la logistique

Le Monde avec AFP

Contrat d’engagement jeune : une insertion dans l’emploi à relativiser

Catherine Vautrin à l’Assemblée nationale, à Paris, le 31 janvier 2024.

Un bilan positif à relativiser. Près de deux ans après son lancement, le contrat d’engagement jeune (CEJ) a trouvé son public. Selon le deuxième rapport d’évaluation du dispositif, remis par le conseil d’orientation des politiques de jeunesse (COJ) à la ministre du travail, de la santé et des solidarités, Catherine Vautrin, jeudi 8 février, et auquel Le Monde a eu accès en exclusivité, 540 413 contrats ont été signés entre le 1er mars 2022 et le 8 novembre 2023. Dans le détail, 192 918 l’ont été avec France Travail (ex-Pôle emploi) et 347 495 à travers les missions locales.

Parmi les dernières réformes sociales du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, le CEJ a remplacé la garantie jeune. Ce dispositif d’insertion intensif s’adresse aux 16-25 ans − et aux moins de 30 ans en situation de handicap − qui ne sont ni en études, ni en activité, ni en formation, et qui peinent à accéder à un emploi durable. Il repose sur un double engagement : le jeune qui signe un contrat d’engagement jeune s’engage à respecter un accompagnement de quinze à vingt heures d’activité hebdomadaire que lui propose son conseiller d’insertion, en fonction de son parcours. En contrepartie, il bénéficie d’une allocation mensuelle de 528 euros.

L’évaluation de ce dispositif centré sur les jeunes est d’autant plus intéressante aujourd’hui que son architecture a inspiré la réforme du revenu de solidarité active (RSA), entérinée fin 2023. Désormais, chaque bénéficiaire du RSA devra également s’acquitter d’au moins quinze heures d’activité par semaine pour toucher l’allocation. Actuellement expérimenté dans 18 territoires, le conditionnement du RSA va être étendu à 47 bassins d’emploi, d’ici à la fin de février, a précisé Catherine Vautrin, mercredi 7 février, sur la chaîne Public Sénat. La mesure sera ensuite généralisée à tous les départements « d’ici au 1er janvier 2025 », a annoncé le premier ministre, Gabriel Attal, lors de son discours de politique générale à l’Assemblée nationale, le 30 janvier.

Un difficile suivi

Le rapport du conseil d’orientation des politiques de jeunesse dresse un bilan de ce dispositif pour le CEJ. Et l’« accompagnement intensif » promis à l’origine est tout relatif. En moyenne, les jeunes ayant signé un contrat d’engagement réalisent 16,2 heures d’accompagnement par semaine. Mais, parmi ces activités, celles réalisées en autonomie (démarches administratives, de santé, liées au logement, à la mobilité, de prospection auprès des entreprises, de recherche d’information, etc.) prennent une part prédominante (47,4 %). « Il est difficile de considérer ce type d’activité comme un réel accompagnement », souligne le président de la commission insertion du COJ, Antoine Dulin. Un peu plus de 32 % des heures sont également consacrés à l’activité professionnelle (CDD, intérim ou immersion en entreprise).

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La SNCF se démène pour éviter une grève pendant les vacances d’hiver

Jean-Pierre Farandou, PDG de la SNCF, à la gare de l’Est à Paris, le 12 décembre 2023.

Opération déminage. Cernée par les préavis de grève déposés entre autres par les contrôleurs pour le week-end du 16 au 18 février, en pleine période de départ en vacances, la SNCF accélère l’annonce d’une série de mesures destinées à désamorcer la colère syndicale. Après avoir longuement reçu les quatre organisations représentatives des cheminots, Jean-Pierre Farandou, le PDG de la SNCF, a fait savoir, jeudi 8 février, que serait versée une prime exceptionnelle de 400 euros, à compter du 1er mars. Attribuée à l’ensemble du personnel, celle-ci s’ajoute à un autre versement de 400 euros intervenu en décembre 2023.

Ces primes, a insisté le patron des cheminots, font écho aux « bons résultats » engrangés par l’entreprise en 2023. M. Farandou, qui souhaite « éviter les conflits et [obtenir] la levée des préavis, afin de permettre aux Français de partir en vacances », n’a pas voulu attendre l’annonce des comptes annuels de l’entreprise, prévue le 28 février. Il a préféré égrener sans tarder les mesures contenues dans la « plate-forme pour le progrès social » qu’il venait de présenter pendant trois heures aux syndicats lors d’une table ronde, précédée, la veille, d’une autre rencontre qui aura duré quatre heures.

La SNCF a également annoncé une revalorisation de 30 % à 50 % des indemnités de résidence au 1er avril, versée aux 77 000 cheminots qui demeurent dans les régions où le marché immobilier est en tension, comme en Ile-de-France ou dans les zones frontalières. En région parisienne, le versement sera de 100 euros par mois au minimum. De même, trois mille promotions supplémentaires sont prévues pour un gain de rémunération compris entre 2 % et 4 % du salaire. Le recrutement de mille cheminots en contrat à durée déterminée, qui s’ajoutent aux 7 300 recrutements déjà programmés pour l’année en cours, est acté. Parmi eux, deux cents chefs de bord (contrôleurs) supplémentaires.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés La SNCF face à des tensions sur les effectifs et les salaires

M. Farandou a souligné que, sur les trois dernières années, la rémunération moyenne des cheminots a progressé de 17 % (jusqu’à 21 % pour les salariés en bas de l’échelle), alors que l’inflation a augmenté de 13,2 %. Il propose également que les accords salariaux soient désormais conclus pour une durée de trois ans.

« Surmonter les difficultés catégorielles »

Echaudé par la grève dure du week-end de Noël en 2022, qui avait bloqué quelque 200 000 voyageurs, le patron de la SNCF a entrepris de s’impliquer personnellement et de « tendre la main pour surmonter les difficultés catégorielles », car le climat social menace de se dégrader à l’approche des vacances de février. Les syndicats ont décidé, ces dernières semaines, d’accentuer la pression sur la direction, à laquelle ils reprochent de ne pas mettre en application assez rapidement le contenu de l’accord négocié non sans mal, fin 2022. A la suite d’un conflit qui avait été animé par des coordinations regroupant des contrôleurs mécontents hors du contrôle des syndicats, direction et salariés s’étaient entendus sur les rémunérations, les embauches, ainsi que l’ouverture de discussions sur la pénibilité.

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Vous êtes une femme, et vous avez vécu un burn-out, racontez-nous

La Société éditrice du Monde souhaite présenter dans ses publications une sélection de témoignages, sous forme d’écrits, de photographies et de vidéos (ci-après désignés ensemble ou séparément « Contribution(s) ») qui lui sont soumis librement par les internautes.

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« L’Intervention sociologique dans les organisations » : quand les sociologues entrent dans l’entreprise

Le livre. « Au revoir mes bourreaux. » A l’issue d’une réunion, le responsable d’une structure publique spécialisée dans les conduites addictives salue les deux sociologues qui viennent de réaliser la restitution de leur enquête menée au sein de son organisation. L’homme est marqué. Son comportement phagocytant et déstabilisant a été mis en lumière devant ses collaborateurs par les universitaires, qui évoquent des « castrations » symboliques. Ses équipes n’avaient jamais osé s’en plaindre ouvertement. « Faut-il que je me suicide ?  », a-t-il lancé, en réaction, glaçant l’assistance. Le responsable fera en sorte que l’étude scientifique n’aille jamais à son terme.

L’intervention sociologique en milieu professionnel est bien souvent faite d’imprévus, de tensions, de remises en cause douloureuses. C’est ce que démontrent Gilles Herreros et Bruno Milly, professeurs des universités (Lyon-II), dans leur essai L’Intervention sociologique dans les organisations (Erès). Un ouvrage au travers duquel les deux sociologues reviennent sur leurs différentes missions menées dans les années 2010, dévoilant l’envers du décor des études de terrain. Ils décrivent ainsi au fil des pages les « sentiers chaotiques » qu’ils doivent fréquemment emprunter, où leur volonté de « bousculer » l’organisation et de se départir de toute neutralité fait face à de nombreuses résistances.

Les deux sociologues doivent en premier lieu gérer des relations complexes avec les commanditaires de l’intervention. Parce que, bien souvent, une demande implicite a été « glissée sous la commande explicite ». Mais aussi parce que nombre d’entrepreneurs souhaitent que le travail mené valide leur stratégie ou favorise son acceptation par le collectif de travail.

C’est là qu’un malentendu peut naître, source de futures tensions : se détachant de toute « orientation hagiographique », MM. Herreros et Milly rappellent que leur mission se distingue de celle des cabinets de conseil ou d’audit. Ils décrivent des « enquêtes universitaires plus libres, plus risquées pour le commanditaire ».

Libérer la parole

Mais elles sont également, assurent-ils, « plus intéressantes parce qu’elles peuvent faire bouger l’organisation, la mettre au travail, en mobilisant un grand nombre d’acteurs (et pas seulement ses échelons dirigeants) ». C’est là l’atout majeur de ces interventions sociologiques, aux yeux des auteurs.

Leurs missions peuvent permettre de libérer la parole. « Les organisations contiennent, dans leurs plis, de l’invisibilité, de l’enfoui, de l’indiscutable, de l’indiscuté, du refoulé, de l’inconscient ; que ces dimensions oubliées soient sociales ou psychiques, le silence qui les accompagne permet leur reproduction à l’infini, installant une aliénation collective », analysent-ils.

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Le difficile retour au travail des cadres après un congé maternité

C’est un moment charnière trop souvent impensé, celui du retour des femmes sur leur lieu de travail après un congé maternité. Alors que peu d’études existent sur le sujet, l’Association pour l’emploi des cadres (APEC) publie ce jeudi 8 février les résultats d’une enquête menée auprès de 12 400 femmes cadres en janvier-février 2023. Son résultat est sans appel : près de la moitié d’entre elles dévoilent que la reprise du travail après leur grossesse a été « difficile ».

A cela plusieurs raisons. La plus évoquée reste sans conteste celle d’une charge mentale compliquée à gérer en raison de la fatigue. Mais nombreuses sont les femmes qui pointent également les défis à relever pour être aussi efficaces et engagées qu’avant. « Cette reprise est un moment crucial pour les femmes, elles sortent de leur cocon pour se remettre dans la vie professionnelle », relate Thi Nhu An Pham, autrice sur le sujet d’un podcast et du livre La Reprise. Le tabou de la condition des femmes après le congé maternité (Payot, 2023). « C’est une transition compliquée que personne ne conscientise vraiment. On attend d’elles qu’elles reviennent comme avant sans contrainte familiale », insiste-t-elle.

Dans l’enquête de l’APEC, 71 % des femmes interrogées considèrent que les entreprises sont insuffisamment organisées pour accompagner le retour de leurs salariées. Elles ne se donnent pas la peine de mener un entretien de retour (pourtant obligatoire), ni de les informer sur les changements qui ont eu lieu pendant le congé maternité, ni encore de les former aux nouveaux supports et logiciels informatiques. « Il est normal que la charge mentale des femmes soit plus élevée à ce moment-là. Ce qui l’est moins, c’est que les entreprises n’adoptent pas les mesures pour les aider à la réduire », constate Gilles Gateau, directeur général de l’APEC.

Pour les y aider, de jeunes mères actives ont lancé en décembre 2021 une charte de bonnes pratiques baptisée « Parental Challenge », que de plus en plus de groupes s’engagent à respecter, même si, à ce jour, elle ne concerne encore que 34 275 salariés.

Comportement « culpabilisant »

Si le retour de congé maternité reste un moment crucial, il est loin d’être le seul : « On aimerait ne plus voir un manageur se prendre la tête entre les mains à chaque fois qu’une collaboratrice lui annonce qu’elle est enceinte », poursuit M. Gateau, qui note que ce genre de comportement est « culpabilisant » pour ces femmes.

Certaines gardent d’ailleurs contact avec leur entreprise pendant leur congé, à des degrés divers, contrairement à l’obligation légale. « Si je ne me connectais pas durant mon congé maternité, j’allais me retrouver à mon retour avec 1 800 mails ! », raconte ainsi une jeune manageuse de la finance qui préfère garder l’anonymat.

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Accidents du travail : quand les machines mettent en péril la vie des salariés


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Lorsqu’il prend son poste, ce lundi 27 décembre 2021, cela fait déjà plusieurs mois que Pierrick Duchêne, 51 ans, peste contre la machine qu’il utilise. Après deux décennies dans l’agroalimentaire, il est, depuis cinq ans, conducteur de presse automatisée dans une agence Point P. de fabrication de parpaings, à Geneston (Loire-Atlantique). Depuis un an et demi, la bonne ambiance au boulot, cette fraternité du travail en équipe qu’il chérit tant, s’est peu à peu délitée. L’atmosphère est devenue plus pesante. La cadence, toujours plus infernale. Les objectifs de productivité sont en hausse. Et ces machines, donc, « toujours en panne », fulmine-t-il souvent auprès de sa femme, Claudine.

Ce jour-là, il ne devait même pas travailler. Mais parce qu’il était du genre à « toujours aider et dépanner », dit Claudine, il a accepté de rogner un peu sur ses vacances pour participer à la journée de maintenance et de nettoyage des machines. Pierrick Duchêne a demandé à son fils qu’il se tienne prêt. Dès la fin de sa journée, à 15 heures, ils devaient aller à la déchetterie. Mais, vers 11 h 30, il est retrouvé inconscient, en arrêt cardiorespiratoire, écrasé sous une rectifieuse à parpaing. Dépêché sur place, le service mobile d’urgence et de réanimation fait repartir son cœur, qui s’arrête à nouveau dans l’ambulance. Pierrick Duchêne meurt à l’hôpital, le 2 janvier 2022.

Son histoire fait tragiquement écho à des centaines d’autres, se produisant chaque année en France. En 2022, la Caisse nationale d’assurance-maladie a recensé 738 accidents du travail mortels dans le secteur privé, selon son rapport annuel publié en décembre 2023. 1 % d’entre eux sont liés au « risque machine » – auquel on peut ajouter les accidents liés à la « manutention mécanique », de l’ordre de 1 % également. Selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), qui répertorie plus précisément les incidents de ce type, les machines sont mises en cause dans 10 % à 15 % des accidents du travail ayant entraîné un arrêt supérieur ou égal à quatre jours, ce qui représente environ 55 000 accidents. Dont une vingtaine sont mortels chaque année.

« La peur suppure de l’usine parce que l’usine au niveau le plus élémentaire, le plus perceptible, menace en permanence les hommes qu’elle utilise (…), ce sont nos propres outils qui nous menacent à la moindre inattention, ce sont les engrenages de la chaîne qui nous rappellent brutalement à l’ordre », écrivait Robert Linhart, dans L’Etabli (Editions de Minuit), en 1978. L’industrie, et notamment la métallurgie, est un secteur d’activité dans lequel les risques pour la santé des ouvriers sont amplifiés par l’utilisation d’outils et de machines. Les employés agricoles, les salariés de la chimie ou les travailleurs du BTP sont aussi très exposés. Sur le terrain, les services de l’inspection du travail font régulièrement état de la présence de machines dangereuses.

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L’expérimentation du RSA sous condition élargie à 47 départements à la fin de février

C’était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron en 2022. Le nombre de départements où l’obtention du revenu de solidarité active (RSA) sera conditionnée à 15 heures d’activité va passer d’ici la fin de février de dix-huit à quarante-sept, avant la généralisation de cette obligation prévue pour 2025, a annoncé la ministre du travail, Catherine Vautrin, mercredi 7 février.

« Il y a dans notre pays des postes qui ne sont pas pourvus aujourd’hui », a insisté sur Public Sénat Mme Vautrin, selon laquelle amener les chômeurs en fin de droits vers l’emploi « est tout à fait important ». « Un demandeur d’emploi, ce qu’il cherche, c’est à retourner dans l’emploi. Notre objectif, c’est de l’accompagner vers l’emploi, c’est la meilleure émancipation possible », a répété la ministre.

Le premier ministre, Gabriel Attal, avait annoncé lors de son discours de politique générale que les chômeurs en fin de droits n’auront plus d’allocation de solidarité spécifique (ASS) et seront basculés vers le RSA, au titre duquel ils ne pourront plus valider de trimestres pour leur retraite.

Le montant mensuel du RSA, qui est versé par les caisses d’allocations familiales, est de 607,75 euros pour une personne seule et de 911,63 euros pour un couple sans enfants.

Les départements, qui financent le RSA, ont eux dénoncé le « manque de concertation », et redoutent un transfert de charge de l’ordre de « 2,1 milliards d’euros » auquel ils ne pourront « faire face ».

Le Monde avec AFP

L’armée de l’air face au risque du manque d’effectifs

Un avion Rafale sur la base aérienne Prince Hassan (H5) de la Royal Jordanian Air Force, le 22 décembre 2023.

A partir de mercredi 7 février, une nouvelle série de spots télévisés et de posts sur les réseaux sociaux devrait faire irruption sur nos écrans : ceux de l’armée de l’air et de l’espace, qui ouvre, cette année, la saison des recrutements pour les trois armées (avec celle de terre et la marine). Une campagne lancée dans un contexte marqué par une évaporation de plus en plus soutenue des effectifs.

En 2023, l’armée de terre est celle qui a le plus été affectée par ce trou d’air, avec un manque d’environ 2 500 recrues sur un objectif de 16 000. Mais l’armée de l’air n’a pas évité totalement ce désamour. Il lui a manqué 200 candidats pour atteindre son objectif de 4 000 recrutements. Seule la marine a atteint ses ambitions avec 4 200 embauches, même si elle n’échappe pas à d’autres effets de bord.

« Aujourd’hui, il faut reconnaître que l’on a beaucoup trop de départs », a admis, vendredi 2 février, le général de corps aérien Manuel Alvarez, directeur des ressources humaines de l’armée de l’air et de l’espace, lors d’un Salon du lycéen et de l’étudiant qui se tenait porte de Versailles, à Paris, et où était présentée la nouvelle campagne.

Une obligation de « surrecruter »

Ce n’est pas la première fois que l’armée de l’air se retrouve confrontée à une insuffisance dans ses recrutements, mais la tension s’accentue depuis la réaugmentation des budgets de défense après des années de contraction. Jusqu’en 2017-2018, l’état-major limitait ses ambitions à l’embauche de 2 000 personnes par an, mais à partir de 2021 elle est passée à 3 000 par an, et depuis 2023, ce sont 4 000 personnes que l’armée de l’air doit recruter pour assurer tous ses postes, soit autour de 40 800 équivalents temps plein.

Cette pression est en partie liée à la hausse des effectifs voulue par la loi de programmation militaire (2024-2030), qui prévoit l’embauche de 6 300 personnes, toutes armées confondues d’ici à 2030, avec des marches de 700 à 1 200 créations de postes par an. Elle est aussi en corrélation directe avec une fuite de plus en plus marquée des soldats de tous grades, dont les causes de départ vont du niveau de rémunération aux conditions de logement, en passant par la multiplication des opérations dans un contexte de conflictualités exacerbées.

En début de formation, l’armée de l’air est ainsi confrontée à une évaporation presque aussi forte que l’armée de terre : entre 2019 et 2022, de 27 % à 29 % des candidats ne sont pas allés au bout de leur formation (contre 30 % à 31,5 % dans l’armée de terre), un phénomène qui s’accroît d’année en année. En deuxième partie de carrière, les aviateurs sont ensuite souvent chassés par le privé, notamment par l’aviation civile, qui propose parfois des salaires avec lesquels ne peut rivaliser le ministère de la défense.

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