Archive dans décembre 2023

L’intérim chez les infirmiers, un phénomène qui inquiète les hôpitaux

Une infimière dans une salle d’opération de l’hôpital de la Croix-Rousse, à Lyon, le 26 septembre 2023.

A l’hôpital, le cercle vicieux de l’intérim ne se limite pas au monde des médecins. Dans les rangs infirmiers aussi, ce mode d’exercice, prévu pour des remplacements ponctuels de courte durée, s’est développé ces dernières années à mesure que les postes vacants se sont multipliés, en particulier en Ile-de-France. Avec une même difficulté, dans des établissements qui souffrent cruellement du manque de soignants : ce mode d’exercice un peu mieux rémunéré, avec une grande liberté de planning, vient désormais concurrencer le recrutement classique. Et participe, en prenant de l’ampleur, à la désorganisation des services.

L’article 7 de la proposition de loi sur l’accès aux soins portée par le député (Horizons) de Seine-et-Marne Frédéric Valletoux, soutenue par le gouvernement, veut endiguer cette tendance en visant les jeunes professionnels. Le texte, qui doit être examiné en commission mixte paritaire, jeudi 7 décembre, prévoit d’interdire l’intérim en début de carrière aux jeunes médecins, infirmiers et aides-soignants.

Si la mesure est adoptée, la durée de l’interdiction sera précisée par décret – de trois à quatre ans étaient initialement envisagés. « L’intérim doit redevenir un phénomène à la marge, il ne doit pas être un modèle de carrière, défend Frédéric Valletoux. Il faut envoyer ce signal parce qu’aujourd’hui, nous avons des jeunes qui commencent par l’intérim et poursuivent leur carrière comme ça. »

Sur ce phénomène, comme sur l’intérim médical, il n’existe pas de données détaillées. Selon une note de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) datant de septembre, le recours des hôpitaux à ce mode d’emploi temporaire reste « faible » par rapport à d’autres secteurs de l’économie, mais il est « en nette hausse » : ces six dernières années, le taux de recours est passé de 0,2 % à 0,4 %. Cela s’explique en grande partie par l’intérim infirmier, dont la progression est marquée depuis 2021. Entre début 2017 et début 2023, la part des intérimaires dans l’emploi d’infirmiers croît de 0,6 % à 1,5 % dans les hôpitaux privés et de 0,1 % à 0,7 % dans les hôpitaux publics.

Enjeu de « regarnir les effectifs »

L’Ile-de-France fait partie des régions les plus concernées, d’après les acteurs de la santé. A l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), l’intérim représente environ 1 000 postes (équivalents temps plein), toutes qualifications confondues et principalement dans les rangs paramédicaux, selon la direction du groupe de trente-huit hôpitaux ; et un budget de 90 millions d’euros en 2022, soit 20 millions de plus qu’il y a deux ans.

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Au Bangladesh, les ouvriers travaillent pour les marques occidentales contre un « salaire de pauvreté »

Un rassemblement d’ouvriers du textile manifestant à Dacca, la capitale du Bangladesh, le 12 novembre 2023.

Debout, pieds nus, sur une table de travail tout en longueur, un ouvrier s’élance et déroule une grosse bobine de tissu bleu pour la déployer. L’étoffe flotte un instant dans les airs avant de retomber. Là, des carrés de taille identique seront découpés dans la fibre estampillée « made in China ». A l’étage supérieur de cette usine textile de Dacca, au Bangladesh, des vêtements de prêt-à-porter prennent forme aux sons mécaniques des machines à coudre. Des pantalons camouflage, des chemises en lin rouge et blanc, mais aussi de petits shorts en jean pour enfant s’entassent par dizaines. Les étiquettes des prix sont affichées en euros : 14,99 euros pour une chemise, 16,90 euros pour un chemisier. Ces vêtements fabriqués au Bangladesh pour environ un tiers du prix de vente garniront bientôt les rayons d’enseignes allemandes, espagnoles, italiennes ou encore néerlandaises.

Dans cette usine de l’entreprise APlus Group, située dans le quartier industriel de Mirpur, à Dacca, les ouvriers, dont 95 % sont des femmes, s’appliquent à la tâche. A la fin du mois d’octobre, pourtant, cette unité du groupe qui emploie 1 800 personnes est restée portes closes durant plusieurs jours. Des vitres ont été brisées et des véhicules endommagés, dégâts intervenus à la suite des violentes manifestations qui ont récemment secoué le secteur du textile. Des milliers de travailleurs étaient alors descendus dans les rues de Dacca et des banlieues industrielles, à Gazipur ou à Ashulia, pour réclamer la hausse du salaire minimum mensuel, établi jusque-là à 8 300 takas, soit environ 70 euros.

Les troubles, au cours desquels des dizaines d’usines ont été saccagées et quatre ouvriers ont été tués, ont brièvement paralysé ce secteur clé de l’économie bangladaise, qui fournit les grandes marques comme Zara, H&M, Primark ou Uniqlo.

Le pays n’avait pas connu un tel conflit social au cours de la dernière décennie. Les conditions désastreuses de travail des quatre millions de travailleurs bangladais du textile se sont encore dégradées depuis la pandémie de Covid-19. Frappés de plein fouet par une inflation galopante qui avoisine les 10 %, ils subissent également une dépréciation d’environ 30 % du taka par rapport au dollar, et il leur est devenu impossible de joindre les deux bouts.

« Auparavant, je mangeais de la viande, mais maintenant je me contente d’œufs et, quand je dois acheter des vêtements, je saute des repas pour pouvoir me les payer », confie Munir Hussain, une vingtaine d’années, chargé d’emballer des habits pour un salaire de 70 euros par mois dans une usine qui fournit notamment le français Kiabi. « Toutes mes dépenses sont fixes, le seul budget dans lequel je peux tailler lorsque j’ai des frais supplémentaires, c’est celui qui est consacré à la nourriture », explique le jeune homme, qui a participé aux manifestations pour l’augmentation des salaires.

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A Paris, The Conran Shop fermera définitivement ses portes fin décembre

La boutique « The Conran Shop » à l’angle des rues du Bac et Babylone, à Paris, en mai 2023.

The Conran Shop tire le rideau. Le magasin d’ameublement et de design, qui a ouvert ses portes en 1992, rue du Bac, à Paris, à proximité du Bon Marché, ferme définitivement ses portes, « au plus tard le 31 décembre », précise sa direction. Alors qu’elle mène une opération de liquidation en vendant ses dernières pièces, dont des meubles d’exposition, l’enseigne fondée par Sir Terence Conran, créateur d’Habitat en 1964, décédé en 2020, fait pâle figure.

Déficitaire depuis plusieurs années, le magasin parisien est détenu depuis 2020 par un homme d’affaires britannique, Javad Marandi, qui a racheté la marque The Conran Shop créée en 1974 et continue de l’exploiter outre-Manche. En France, son chiffre d’affaires a atteint 13 millions d’euros sur son exercice 2022-2023, tandis que ses pertes s’élevaient à 2,5 millions d’euros.

Depuis janvier, The Conran Shop est dirigé par le cabinet Prospheres, spécialiste de la restructuration d’entreprises. D’après l’un de ses 53 salariés promis au licenciement, un projet de cession n’a pas abouti. Reste à savoir quel sera le destin de ce local, propriété du Bon Marché, filiale du groupe LVMH.

Un secteur fragile

La fermeture de ce magasin très haut de gamme, en plein cœur du 7e arrondissement, l’un des quartiers les plus huppés de la capitale, en dit long sur la fragilité du secteur. De fait, après avoir traversé la crise induite par la pandémie due au coronavirus, en 2020 et 2021, la distribution d’équipement pour la maison est désormais en crise. Tous les segments sont concernés. L’enseigne d’ameublement Habitat a demandé son placement en redressement judiciaire, le 30 novembre. Deux mois plus tôt, le 9 octobre, la chaîne Maisons du Monde, connue pour ses plus petits prix, a publié un avertissement sur résultats sur son exercice en cours.

Ce n’est pas le seul secteur en souffrance, à la veille des achats de fin d’année. L’Alliance du commerce estime que les ventes d’habillement ont chuté de 2 % en novembre par rapport à novembre 2022, en dépit des promotions du Black Friday. D’après cette fédération du commerce de centre-ville, le chiffre d’affaires de cette opération censée lancer la période faste des ventes de cadeaux de Noël a reculé de 1,9 % durant la semaine du 20 au 27 novembre.

En octobre, l’Institut français de la mode avait chiffré à 7,3 % la chute d’activité des magasins d’habillement et de textile par rapport à octobre 2022. Enfin, le secteur du jouet s’interroge sur les intentions d’achat des Français à Noël : les ventes de jeux et de jouets ont reculé de 4,5 % entre janvier et octobre, par rapport à la même période en 2022, selon la fédération du commerce spécialisé Procos.

Aller à la rencontre des candidats, nouvelle course à l’innovation des recruteurs

« Déposez votre CV et gagnez 100 000 euros et plein d’autres lots ! » En juin 2022, faute de recevoir suffisamment de candidatures, le cabinet de recrutement Lynks Partner lançait une loterie alléchante. Pour tenter sa chance, il suffisait de s’inscrire sur le site dédié et d’y inviter deux autres candidats titulaires d’un bac + 2. Le tirage au sort devait avoir lieu après l’enregistrement de 1 million de CV.

Pour tenter de se démarquer, de nombreuses entreprises innovent dans leur processus de recrutement dans une démarche d’« aller vers », c’est-à-dire qui rompt avec l’idée que le candidat doit postuler et considère que l’entreprise doit aller à sa rencontre pour le convaincre de la rejoindre. Mais cette démarche doit être particulièrement bien ciblée, car l’opération est également un coup de dés pour l’entreprise : à peine six mois après le recrutement-loto de Lynks Partner, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l’ouverture d’une liquidation judiciaire du cabinet.

Les offres d’emploi ont du mal à trouver leur public, tant les projets de recrutement sont nombreux. Publiée en avril, l’étude annuelle de Pôle emploi sur les « Besoins en main-d’œuvre » montre que 61 % des employeurs anticipaient des difficultés pour recruter cette année, un nombre en augmentation de 3,1 points par rapport à 2022. Premier motif invoqué, le nombre insuffisant de candidats (pour 85 % des entreprises), avant l’inadéquation des profils (79 %) des postulants. Pour les attirer malgré un marché qui ne leur est pas favorable, les entreprises n’hésitent plus à aller directement chercher les candidats, dans la rue ou sur les places de village.

Rompre avec l’aspect formel de l’entretien lève des freins. « Dans la rue, on trouve des candidats qui ne se trouvent pas légitimes pour postuler lors d’un processus classique. La relation s’inverse, car nous montrons que nous avons besoin d’eux autant qu’ils ont besoin de nous », indique Nicolas Morby, fondateur, en 2020, d’Ethypik, société de recrutement dont la spécialité est de démarcher des candidats sur les places publiques.

Selon le dirigeant, 65 % des profils de sa base de données sont des personnes éloignées du marché, qui ne sont inscrites ni à Pôle emploi, ni au sein des missions locales, ni sur les réseaux sociaux liés à l’embauche.

La rue pour recruter des salariés

De la même manière, l’Oise s’est dotée, en 2016, d’un bus itinérant, allant de communes en villages pour approcher des habitants qui n’ont pas toujours la possibilité de se déplacer en transports en commun. Là aussi, les résultats sont probants : « Une personne reçue en entretien individuel par le conseiller en insertion professionnelle sur deux retrouve le chemin de l’emploi, de la formation ou crée son entreprise », pointe le département, qui a inauguré un cinquième bus en 2022.

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La Poste prise en défaut sur le devoir de vigilance

Un camion Chronopost devant le bureau de poste de Blanzat (Puy-de-Dôme), le 7 mai 2020.

C’est une première judiciaire : La Poste a été condamnée, mardi 5 décembre, à améliorer la mise en œuvre de la loi de 2017 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de risques humains et environnementaux, dans un dossier impliquant l’emploi de travailleurs sans papiers par des sous-traitants.

Le groupe, dont le capital est contrôlé à 66 % par la Caisse des dépôts et 34 % par l’Etat, devra donc améliorer sa « cartographie des risques » et les dispositifs de suivi et d’alerte censés la compléter. A l’origine de cette décision, la mise en demeure de La Poste, en 2020, par le syndicat SUD-PTT, qui considérait que les documents publiés par l’entreprise ne répondaient pas aux exigences légales, entre autres en matière de recours à la sous-traitance.

« Nous avons été alertés en 2019 par un collectif de la plate-forme Chronopost d’Alfortville (Val-de-Marne) sur le fait que des sans-papiers, sous-traitants de l’entreprise Derichebourg, y travaillaient de nuit en s’échangeant des papiers et des badges, explique Nicolas Galépides, responsable fédéral de SUD-PTT. Et deux ans après, le même schéma s’est reproduit chez DPD, une filiale de La Poste. »

« Des procédures d’évaluation des sous-traitants »

Sur le recours à des sans-papiers, le tribunal judiciaire de Paris constate, entre autres, que la cartographie des risques établie par La Poste « ne fait nullement ressortir l’existence de risques liés au travail illégal », ce qui justifie de lui imposer d’établir « des procédures d’évaluation des sous-traitants en fonction des risques précis identifiés ». « Le message envoyé à l’entreprise par le tribunal, c’est : “Il faut vous mettre au boulot” », conclut M. Galépides.

Le tribunal a toutefois rejeté plusieurs demandes de SUD-PTT. Il a notamment refusé de contraindre La Poste à rendre publique la liste de ses sous-traitants et fournisseurs et de lui imposer la mise en œuvre des mesures de prévention du travail dissimulé.

Rejetée également la demande du syndicat d’une astreinte financière de 50 000 euros par jour de retard dans l’amélioration du plan de vigilance, le tribunal prenant acte d’une « évolution notable, dans le cadre d’une démarche dynamique d’amélioration » depuis 2021.

Le groupe public, qui a pris acte du jugement sans se prononcer dans l’immédiat sur un éventuel appel, dit regretter que la loi de 2017 n’ait « fait l’objet d’aucun décret d’application ou de lignes directrices, laissant les entreprises qui y sont soumises dans une grande incertitude juridique » en attendant l’adoption d’une directive européenne en la matière.

Le groupe CBC Radio-Canada supprime 600 emplois

Le groupe audiovisuel public canadien CBC Radio-Canada a confirmé, lundi 4 décembre, la suppression de 600 emplois, soit 10 % de ses effectifs, en raison « de la diminution des revenus publicitaires de la télévision et de la concurrence féroce des géants du numérique ».

Les premiers licenciements doivent se concrétiser dans les semaines qui viennent « mais la plupart seront mis en œuvre au cours des douze prochains mois », a précisé le diffuseur public dans un communiqué. CBC Radio-Canada a également prévu de réduire ses dépenses de programmation pour permettre au total 125 millions de dollars d’économies pour l’exercice 2024-2025.

Au final, 250 des suppressions de poste concerneront CBC, le réseau anglophone du groupe ; et 250 autres, Radio-Canada, sa partie francophone ; le reste touche des fonctions techniques et de support. Le groupe a également annoncé que « près de 200 postes actuellement vacants (…) seront abolis ».

Des créations de poste gelées depuis octobre

« CBC Radio-Canada n’est pas à l’abri des bouleversements que subit l’industrie canadienne des médias », a déclaré sa PDG, Catherine Tait, qui estime que, face à ces pressions, le groupe n’avait « plus la souplesse nécessaire pour continuer sans compressions ». « Ces pressions découlent des mêmes facteurs structurels qui touchent l’ensemble des médias canadiens, notamment la hausse des coûts de production, la diminution des revenus publicitaires à la télévision et la concurrence féroce des géants du numérique. »

Le diffuseur public n’avait pas connu pareilles coupes depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement de Justin Trudeau, en 2015. Au début d’octobre, CBC Radio-Canada avait annoncé que les créations de poste étaient gelées jusqu’à nouvel ordre et que les départs ne seraient pas remplacés.

« Nous comprenons à quel point cette annonce est préoccupante pour les personnes concernées et pour la population canadienne qui compte sur nos émissions et nos services », a encore déclaré Catherine Tait, promettant « plus de précisions dans les mois à venir ».

« Jour sombre »

Il s’agit d’« un jour sombre » pour le diffuseur public et pour l’accès à l’information, a réagi le Syndicat des travailleuses et travailleurs de Radio-Canada dans un communiqué. « Nous sommes atterrés », a renchéri la présidente de la Guilde canadienne des médias, Annick Forest. « Nous demandons au gouvernement fédéral de garantir sans attendre un financement stable à CBC Radio-Canada, et ce, avant que le diffuseur public devienne incapable de remplir son mandat. »

De nombreux médias canadiens sont dans une mauvaise situation financière et le groupe public n’est pas le premier à annoncer un plan social. Au début de novembre, plus de 500 employés du groupe TVA ont été licenciés, soit environ le tiers de ses effectifs.

Pour tenter de soutenir le secteur, le gouvernement canadien s’est lancé depuis cet été dans un bras de fer avec Google et Meta – propriétaire de Facebook et Instagram – pour les obliger à conclure des accords commerciaux avec les médias pour la diffusion de leurs contenus sur leurs plates-formes.

La semaine passée, un accord « historique » a été signé avec Google. En revanche, Meta, qui bloque au Canada l’accès aux contenus d’actualité de médias sur ses plates-formes depuis le 1er août, continue de s’opposer à la loi.

La législation vise à soutenir le secteur de l’information au Canada, où plus de 450 médias ont fermé leurs portes depuis 2008.

Le Monde avec AFP

Quand, en entreprise, les outils « de productivité » comme Slack et Teams donnent l’illusion de l’efficacité

Lidiane Jones, PDG de Slack Technologies, lors de la conférence Dreamforce 2023, à San Francisco, en Californie, le 14 septembre 2023.

« Vous avez 7 564 messages non lus dans 24 canaux. » Nous sommes lundi matin, et comme bon nombre d’employés de bureau, vous recevez ce courriel automatique de l’espace de travail virtuel Slack installé par votre entreprise pour fluidifier les échanges.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Le grand décrochage de la productivité en France

Comme la semaine démarre doucement, vous jetez un œil à Trello et Notion, deux applications permettant d’organiser sa to-do list (« liste de choses à faire ») que votre entreprise encourage vivement à utiliser. Vous ouvrez alors le logiciel maison pour réserver une salle de réunion, puis utilisez l’outil de visioconférence Teams pour l’organiser à distance avec vos collègues en télétravail.

Comme vous-même vous télétravaillez deux jours sur cinq, vous avez aussi accès à une application permettant de renseigner si le lendemain vous souhaitez rester chez vous ou venir au bureau, et si vous avez besoin d’un espace collaboratif ou d’une salle au calme. Signe que les salariés sont de plus en plus sollicités, des entreprises leur proposent même d’utiliser des applications de feed-back (retour d’expérience) sur le bien-être au travail, comme Moodwork ou Zest.

Cet exemple n’est pas (totalement) inventé. Depuis la pandémie de Covid-19 et l’émergence du travail hybride dans les entreprises françaises, les salariés se sont approprié de nombreux outils dits « de productivité », dont la majorité étaient encore méconnus du grand public. L’espace de travail numérique Google a été adopté par 10 millions d’entreprises dans le monde, et Slack revendique aujourd’hui 200 000 clients, dont 32 sociétés du CAC 40.

Certains outils, par le biais du texte ou de la vidéo, promettent aux manageurs de gérer leurs équipes à distance ou au bureau. La mutuelle Alan, ancienne start-up qui compte désormais plus de 500 salariés, a fait de l’écrit, et notamment par le biais de Slack et Notion, le cœur de ses échanges. « L’écrit permet que toutes les données soient traçables, que tout le monde ait accès à l’information », explique son DRH, Paul Sauveplane.

Stress et éloignement du cœur de métier

« Au départ, ces outils sont dits “collaboratifs”, mais il peut y avoir des dérives, relève Caroline Diard, professeure associée en management des RH à la Toulouse Business School. L’employeur peut contrôler ses salariés, en sachant qui est connecté. Côté salarié, il y a une augmentation des sollicitations. Et comme les outils sont instantanés, le salarié se contraint à répondre rapidement. »

Peu de travaux ont été menés en France sur le sujet, mais, selon une analyse par le logiciel RescueTime des données de 50 000 travailleurs du savoir américains (rédacteurs, développeurs, chefs de projet) en 2018, un travailleur vérifiait ses outils de communication toutes les six minutes.

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Les retraites complémentaires de branche, une possibilité méconnue

Droit social. Le code du travail donne aux partenaires sociaux du secteur privé la capacité d’organiser les conditions de travail et d’emploi mais aussi « des garanties sociales », au moyen de conventions collectives de travail de branche. Il existe ainsi, particularité française, un abondant droit conventionnel sur la prise en charge complémentaire au régime général des frais de santé, ou garantissant des revenus complémentaires en cas d’incapacité temporaire de travail, d’invalidité ou de décès.

A l’inverse de nombreux autres pays, plus rares sont les accords de branche portant sur des compléments de revenus aux régimes obligatoires de retraite, le régime général de la Sécurité sociale et le régime paritaire Agirc-Arrco. Méconnus, ces fonds de pension professionnels sont, par référence à la nomenclature des activités d’assurance, dénommés « branche 26 ». Comme pour tout régime d’épargne-retraite, on distingue une première période, dans l’emploi, qui consiste en l’acquisition de droits qui sont capitalisés, puis « servis » durant une seconde période, après le départ à la retraite.

Ces « régimes de branche », lorsqu’ils existent – seules cinq branches connaissent de tels régimes – possèdent toutefois des caractéristiques propres. De par l’effet impératif de la convention collective, tout salarié et tout employeur de la branche doit cotiser. Les sommes collectées sont capitalisées dans un fonds collectif. En même temps, ces cotisations sont transformées en points au moyen d’une « valeur d’acquisition du point », appelée aussi « unité de rente » ou « prix d’un point ». Au moment du départ à la retraite, la somme des points acquis est transformée en rente au moyen d’une « valeur de service du point », un facteur de conversion exprimé en euros.

Des avantages évidents

Ces valeurs-clés, qui tiennent notamment compte de la situation de l’emploi et des rémunérations propres à la branche, relèvent de la compétence des partenaires sociaux, et non plus seulement des directeurs techniques des organismes assureurs ou de la négociation entre entreprises et organismes assureurs. Les paramètres de calcul figurant dans la convention collective de retraite s’imposent à tout employeur de la branche.

Les engagements ainsi définis des employeurs envers les salariés au moyen de la convention collective doivent être transférés à des organismes extérieurs de gestion. Pour ce faire, les entreprises d’assurance, les institutions de prévoyance ou les mutuelles peuvent créer des fonds de retraite professionnel et supplémentaire, dont les règles légales particulières de gestion et de contrôle des calculs prévisionnels sont adaptées à l’épargne longue.

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