Archive dans avril 2023

Intelligence artificielle : « A chaque révolution industrielle a été proclamée la disparition du travail »

C’est l’un des paradoxes actuel : au moment même où la question du travail redevient centrale en raison du mouvement social contre la réforme des retraites, on remarque un retour en force des discours sur la fin du travail. Futurologues, essayistes et journalistes se posent cette question : pourquoi se mobiliser contre le recul de deux ans de l’âge à la retraite, alors que l’intelligence artificielle (IA) va révolutionner le monde du travail ?

A en croire tribunes et prises de position, salariés et étudiants n’auraient pas compris où sont les vrais dangers du moment. Ils auraient même tort de manifester, car le recul de l’âge légal de départ à la retraite ne serait rien face aux dangers de l’intelligence artificielle ou de ChatGPT. On annonce alors la suppression de millions d’emplois sous les effets de l’IA et de ses avancées ; on parle d’une nouvelle révolution industrielle, de « désordres indescriptibles », d’un « bouleversement » sans précédent de la structure de l’emploi. Rien de moins.

Ces discours technofatalistes et apocalyptiques n’ont rien de nouveau. Après tout, à chaque révolution industrielle a été proclamée la disparition du travail et a été opposé le « progrès technologique » au bien-être des travailleurs et des populations, même si jamais de telles prédictions ne se sont confirmées.

Mais d’où viennent ces discours ? D’abord, d’entrepreneurs du secteur du numérique qui cherchent à faire parler de leurs services et à attirer des financements. C’est ce qui explique que les discours sur les révolutions technologiques sont hyperboliques et exagérément optimistes. Ce n’est donc pas un hasard si, après l’engouement autour de ChatGPT en début d’année, Microsoft a décidé d’investir 10 milliards de dollars (9,1 million d’euros) dans OpenAI, entreprise propriétaire du robot conversationnel.

Davantage de précarité

Ensuite, de cabinets de conseil qui font leur miel de cette panique sur la fin du travail, vendant des « solutions IA » à des entreprises qui ne veulent pas être à la traîne sur un sujet présenté comme révolutionnaire dans les médias. Enfin, de « futurologues » et d’experts autoproclamés pour qui il s’agit de faire parler de leurs livres, d’être invités dans les médias et à donner des conférences.

Les discours enthousiastes sur les nouvelles technologies ont une fonction : ils contribuent à leur acceptation, au-delà de leurs conséquences sociales ou politiques, et deviennent une sorte de prophétie autoréalisatrice. La croyance en une révolution technologique favorise l’allocation de ressources supplémentaires pour le développement de ces technologies et leur introduction sur les lieux de travail, renforçant à son tour l’idée d’une révolution technologique. A chaque fois, il s’agit de nous faire croire que le changement technologique est inévitable, que s’y opposer n’a aucun sens et que tous les autres sujets sont secondaires.

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Au Canada, les fonctionnaires en grève réclament le droit au télétravail

Des augmentations de salaire, bien sûr, pour tenir compte de l’inflation galopante (6,7 % au Canada pour 2022) mais aussi l’inscription, actée dans leur convention collective, d’un droit au télétravail : la grève déclenchée, mercredi 19 avril, par le principal syndicat des fonctionnaires fédéraux, l’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC), est d’ores et déjà qualifiée « d’historique » par ses organisateurs. Un tiers des 336 000 employés fédéraux a cessé le travail ; un mouvement de débrayage d’une telle ampleur n’avait pas été observé dans le pays depuis 1991.

Quelques secteurs sont particulièrement affectés par cette grève, parmi lesquels les services de délivrance des passeports, à l’heure où se profilent les départs en vacances estivales, les services d’immigration et les activités d’approvisionnement et d’échanges commerciaux dans les ports et les aéroports mais aussi, et surtout, celui des impôts, à quelques jours de la date fatidique de la déclaration de revenus (le 1er mai) des contribuables canadiens.

Le gouvernement a néanmoins usé de son droit de réquisition pour imposer à 48 000 des 155 000 fonctionnaires grévistes l’obligation de se présenter au travail afin d’assurer les « services essentiels » dus aux Canadiens, tels que le versement des prestations sociales ou des pensions de retraite.

Droit au télétravail

Après plus de deux ans de discussions improductives entre les partenaires sociaux et le Conseil du Trésor, ministère qui chapeaute la fonction publique, les négociations continuent d’achopper sur le montant du rattrapage salarial à effectuer depuis 2021 : les syndicats réclament 13,5 % d’augmentation sur trois ans, le gouvernement s’en tient jusqu’à présent à proposer 9 %.

Mais c’est sur l’organisation du travail, avec une nouvelle réalité, née de la pandémie de Covid-19, que le dialogue semble le plus difficile. « Le ministère veut forcer tous les fonctionnaires à revenir au minimum deux jours par semaine dans leurs bureaux. Mais pour un employé qui répond toute la journée au téléphone aux administrés, expliquez-moi quelle différence cela fait qu’il travaille de chez lui ou de son bureau ? », avance Yvon Barrière, vice-président exécutif pour le Québec de l’AFPC, qui plaide pour que le droit au télétravail acquis par nécessité pendant la pandémie ne soit pas remis en cause.

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« Au nom du droit de l’employeur de dire où et comment les services aux Canadiens sont le mieux rendus », a répété, le 19 avril sur Radio-Canada, la présidente du Conseil du Trésor, Mona Fortier, le gouvernement souhaite s’en tenir à une directive énoncée en décembre 2022 pour toute la fonction publique, qui prenait acte de ce nouveau modèle de travail hybride, mais obligeait chacun à retourner au bureau entre « 40 % et 60 % de son horaire régulier ».

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Nucléaire : comme d’autres sous-traitants, Endel se prépare à recruter en masse

Il faut s’imaginer à l’intérieur d’un immense réacteur. Sauf que nous sommes dans un atelier, sorte de hangar réaménagé. Ici, une machine de soudage pour s’entraîner : face à son écran de contrôle, un technicien pilote à distance un robot. Plus tard et ailleurs, l’opération se reproduira en pleine centrale nucléaire, en milieu radioactif.

Pour l’heure, nous voilà donc plutôt à Rognac (Bouches-du-Rhône), sur les rives de l’étang de Berre, dans des locaux de la société Endel, spécialisée dans la maintenance du métal. L’un des principaux sous-traitants de l’industrie nucléaire et en particulier d’EDF, exploitant des réacteurs français. L’un des principaux « partenaires », préfère dire Madany Lias, PDG de la société, costume sans cravate. Lui n’a pas encore eu l’occasion d’un rendez-vous bipartite avec Luc Rémont, nouveau patron d’EDF, en poste depuis cinq mois.

Comme pour bon nombre de sous-traitants (Bouygues, Vinci, Onet, Spie, Spie Batignolles…), l’atome n’est pas l’unique activité d’Endel : 595 millions d’euros de chiffre d’affaires global en 2021, filiales comprises. Mais il s’agit de la principale. Au rayon des « joies à partager » aujourd’hui avec EDF, pour reprendre l’expression de M. Lias : la perspective de six nouveaux réacteurs à construire, annoncée par le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, voilà un an.

Madany Lias, PDG d’Altrad Endel, à Rognac (Bouches-du-Rhône), le 18 avril 2023.

Générateur de vapeur

Sur près de 4 800 salariés des entités Endel, quelque 3 000 salariés œuvrent déjà dans l’énergie, selon l’entreprise. Certains sont au statut de la métallurgie, un statut unique des travailleurs du nucléaire n’existant pas encore, en dépit d’une revendication syndicale.

Un millier de postes en plus est attendu à terme dans les années à venir, d’après des projections internes, sans échéance précise. Soudeurs, tuyauteurs… « Avant d’aller recruter, il faut aussi savoir garder nos compétences, considère le patron d’Endel. Le marché est tellement en tension que certains fournisseurs n’hésitent pas à débaucher massivement chez leurs confrères ou concurrents. » Pour de nouveaux chantiers, mais aussi pour les réacteurs déjà en service.

Les appels d’offres liés à de futurs réacteurs n’ont pas encore été lancés. Mais Endel s’y prépare, en association avec deux autres sociétés spécialisées dans les tuyauteries, Fives Nordon et le groupe Ponticelli. « EDF reste à l’écoute de nos contraintes, mais encore faut-il les mettre sur la table, le problème est que certains sous-traitants peuvent avoir tendance à ne pas le faire », reconnaît Madany Lias, la promesse de délais ou de coûts intenables pouvant être reprochée aux sous-traitants.

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Soudeurs, chaudronniers, ingénieurs : le gouvernement sonne la « mobilisation » générale dans le nucléaire

Daniel, monteur levageur au sein de la société Endel, à Rognac (Bouches-du-Rhône), début avril 2023.

L’industrie de l’atome compte ses rangs, avec un besoin criant de les élargir. Sans quoi, impossible d’envisager la relance du nucléaire. Du moins, celle souhaitée par le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, dans son discours de Belfort, en février 2022 : au moins six nouveaux réacteurs à construire, voire huit autres par la suite.

D’où l’urgence de parvenir à « la disponibilité des ressources au bon niveau de compétence et au bon moment », résume le Groupement des industriels de la filière nucléaire (Gifen), en préambule d’une note très attendue – le rapport « Match » –, publiée vendredi 21 avril.

Après des années de tergiversations gouvernementales, y compris durant le premier quinquennat de M. Macron, l’organisation patronale se livre à un exercice périlleux : quantifier le nombre de recrutements nécessaires, métier par métier, pour les accorder (un sens du verbe « Match », en anglais) aux futurs plans de charge prévus par les entreprises.

Très attendu, le document de 87 pages résulte d’une commande gouvernementale. D’après Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, la relance du nucléaire permettra à « des dizaines de milliers de jeunes d’accéder à des emplois à tous niveaux de qualification, à un bon niveau de rémunération », avec l’enjeu « de contribuer à lutter contre le réchauffement climatique ». Dans un même communiqué, le ministre délégué à l’industrie, Roland Lescure, s’exprime pour « les acteurs de la filière, grands donneurs d’ordre comme PME » : « Nous lançons la mobilisation générale pour rendre possible la relance du nucléaire annoncée par le président de la République. »

Inverser la tendance

Le rapport confirme d’abord un premier ordre de grandeur, déjà communiqué depuis novembre 2022. Au cumul des emplois directs et indirects (220 000 jusque-là), les recrutements concerneraient 100 000 personnes sur l’ensemble de la période allant de 2023 à 2033. L’étude ne précise pas le nombre de départs à la retraite, dans le même laps de temps, pour les emplois indirects (commerciaux, ressources humaines, manageurs…).

Cette projection, très ambitieuse, part d’une extrapolation. Car l’étude quantitative du Gifen se focalise sur les emplois directs. La note recense « un peu plus de 125 000 équivalents temps plein » (ETP) en 2023, dans vingt principaux segments d’activité et quatre-vingt-quatre métiers. Ce volume de travail devrait croître de près d’un quart, pour parvenir à 155 500 ETP dans dix ans. Soit environ 6 000 renforts par an au total : une moitié pour compenser des départs en retraite, une autre moitié en raison de la croissance.

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Salaire des enseignants : Macron annonce des hausses, mais crispe sur le « travailler plus pour gagner plus »

Emmanuel Macron et Pap Ndiaye échangent avec des enseignants, des élèves et des parents d’élèves dans la cour du collège Louise-Michel, à Ganges (Hérault), le 20 avril 2023.

Pour son deuxième déplacement après la promulgation de la très contestée réforme des retraites, Emmanuel Macron a choisi de parler d’éducation. C’est au milieu d’un petit cercle d’une quinzaine de professeurs, d’élèves et de parents installés dans la cour ensoleillée d’un établissement rural de l’Hérault, le collège Louise-Michel de Ganges, qu’il a lui-même mis fin, jeudi 20 avril, au suspense sur les mesures salariales promises aux enseignants.

A la rentrée 2023, « tous les enseignants » bénéficieront d’une augmentation comprise entre « 100 et 230 euros par mois », a annoncé le chef de l’Etat, qui était accompagné du ministre de l’éducation nationale, Pap Ndiaye. Il a également confirmé la mise en place du « pacte enseignant », par lequel les professeurs se voient proposer de nouvelles missions en échange d’une rémunération supplémentaire. « J’assume ce choix d’un investissement un peu différencié pour ceux qui font des efforts supplémentaires et systématiques », a-t-il déclaré, entérinant ainsi la création d’un dispositif vivement rejeté par l’ensemble des syndicats.

En 2024, 3 milliards d’euros seront consacrés à ces mesures salariales, dont les deux tiers pour la revalorisation inconditionnelle (1,9 milliard), appelée « socle ». « Il n’y a jamais eu une telle dépense [pour les rémunérations] depuis 1990 », a souligné le président de la République, en défendant un investissement indispensable à l’amélioration du service public d’éducation. Il a même évoqué – sous les regards dubitatifs des enseignants – un réinvestissement « permis par la réforme des retraites ».

Un important dispositif policier quadrillait la petite ville de 4 000 habitants, où plusieurs centaines de manifestants se sont réunis à l’occasion de la visite du chef de l’Etat. Du parvis de l’établissement, dont le périmètre avait été bouclé, ne parvenaient que les sons lointains des sifflets et des vuvuzelas. La contestation a cependant rattrapé Emmanuel Macron dans le collège, où le courant a été coupé dès son arrivée – une action revendiquée par la CGT du département –, empêchant la tenue des discussions à l’intérieur du bâtiment. Plusieurs professeurs l’ont par ailleurs interpellé sur le manque de reconnaissance, le risque de « perdre » une majorité d’enseignants avec le pacte, et les insuffisances de la revalorisation inconditionnelle à l’échelle individuelle – en particulier pour les enseignants en milieu de carrière. A la question de savoir si un salaire de 2 300 euros net au bout de quinze ans était suffisant, Emmanuel Macron a répondu : « Je regarde d’où on part et où on arrive. (…) Il y a un effet de rattrapage, et on rattrape trente ans. Ce n’est jamais suffisant. »

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La police et la gendarmerie confrontées à des départs massifs

Formation d’élèves volontaires à la préparation des réservistes de la police nationale française. A Lognes (Seine-et-Marne), le 26 octobre 2022.

« Le record du nombre de départs au sein de la police et de la gendarmerie a été battu en 2021, puis de nouveau dépassé en 2022. » Dans un rapport sur l’exécution budgétaire de la mission « Sécurités » pour l’année 2022, communiqué au gouvernement le 13 avril, la Cour des comptes s’inquiète d’un niveau sans équivalent de départs, « un phénomène de fond installé depuis la fin de la crise sanitaire ».

Ce mouvement de fond, déjà record en 2021 et qui s’est amplifié en 2022, s’explique moins par les départs à la retraite, d’un niveau relativement étale, que par « la concurrence avec les polices municipales, qui attirent de plus en plus de policiers et gendarmes » grâce à de meilleures conditions de travail et de rémunération, la hausse des démissions des élèves en cours de formation et une augmentation des détachements dans d’autres administrations – de 50 % dans la police par exemple.

Dans la police, les créations d’emplois permettent d’autant moins d’enrayer le phénomène qu’elles concernent avant tout des personnels administratif et scientifique : en 2022, ces services ont connu 874 recrutements, « tandis que le nombre de policiers actifs a baissé de 117 ETP [équivalent temps plein] », un véritable défi alors que l’Elysée comme la Place Beauvau ont fait du doublement des effectifs affectés à la voie publique un point central de leur politique sécuritaire.

Qualité des recrutements « dégradée »

Police et gendarmerie, contraintes d’augmenter les recrutements en 2022 – respectivement de 25 % de 29 % –, se retrouvent confrontées à une série de conséquences en cascade, d’autant qu’elles ont notablement sous-estimé les volumes de départs en retraite pour cette même année.

D’abord, parce que cette nécessité d’augmenter en urgence les effectifs pèse sur le « coût du sac à dos », c’est-à-dire les dépenses en équipement des nouvelles recrues, de l’ordre de 4 144 euros dans la police et de 2 328 euros dans la gendarmerie. Ensuite, parce qu’elle contribue à accentuer la pression sur la capacité d’accueil des écoles. Avec 8 500 recrutements prévus d’ici à 2027, note la Cour des comptes, « le Beauvau de la sécurité puis la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur ont fixé des objectifs très ambitieux », une annonce qui « apparaît peu réaliste au regard de l’état de quasi-saturation de l’appareil de formation ».

Or, pour fournir de nouveaux effectifs et tenir l’engagement politique d’un « recrutement massif de policiers et de gendarmes » rappelé dans le rapport annexé de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, les pouvoirs publics n’ont d’autre choix que celui de « dégrader la qualité des recrutements ». En attestent la hausse considérable du taux d’admission au concours de gardien de la paix, passé de 2 % en 2014 à 18 % en 2020, et qui atteint 20 % chez les sous-officiers de gendarmerie.

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Au lycée Airbus, à Toulouse, des formations pour devenir « compagnon » de l’avionneur

Un élève du Lycée Airbus, à Toulouse, le 21 octobre 2022.

Après son baccalauréat professionnel « usinage » qu’elle passera cette année, Aurélia Coule, 18 ans, « veut continuer en BTS pour [s]’enrichir ». Valentin Badou, 19 ans, lui, a « hâte de bosser », dans son domaine de prédilection, la chaudronnerie, quand il aura décroché son bac professionnel. Dans leur tenue bleue floquée du logo Airbus, ils ont trouvé ici « une discipline, une bonne ambiance, des professeurs attentifs, des ateliers spacieux et modernes, et une assurance de trouver un travail ».

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« Ici », c’est le lycée Airbus. Un établissement unique en France, créé en 1949 dans l’usine de Saint-Eloi, à deux pas du centre-ville de Toulouse, au cœur des usines de l’avionneur, d’où sortent encore les mâts réacteurs des avions, un élément de très haute technologie qui permet de relier le moteur à la voilure.

Après la guerre, Louis Casado, un ingénieur, a l’idée d’ouvrir un centre de formation pour les jeunes : l’Ecole professionnelle de l’industrie aéronautique. L’établissement devient privé en 1981, lié par un contrat au ministère de l’éducation, puis sera rebaptisé Lycée professionnel privé de l’industrie aéronautique et « lycée Airbus » en 2006. Avec un objectif clair : « Former des jeunes à partir de 15 ans aux métiers spécifiques de l’aéronautique et à une véritable culture d’entreprise », détaille Nicolas Coadou, 42 ans, directeur de l’établissement depuis 2020.

« Nous allons augmenter les recrutements »

Electricité, chaudronnerie, usinage, production mécanique, peinture, intégration cabine, les « artisans d’Airbus » sont formés par le biais de plusieurs diplômes, du CAP au BTS, en passant par le bac professionnel. Le lycée, et sa cinquantaine de salariés, reçoit environ 500 élèves par an, avec un taux de renouvellement annuel de 120 jeunes, sur un peu plus de 500 élèves en tout. « Face aux hausses de productions annoncées par Airbus, nous allons même augmenter de 20 % les recrutements de ces élèves », précise M. Coadou.

Le 18 mars, lors de journées portes ouvertes, plus de 1 700 jeunes sont venus découvrir les filières proposées. Avec un invité surprise, Guillaume Faury, le directeur exécutif du groupe Airbus. Chaque année, sur 500 candidatures, 120 élèves sont intégrés, après un test de personnalité en ligne, puis un entretien avec un enseignant et un salarié de l’entreprise. « On les forme aux techniques, mais aussi à des valeurs comme le respect, l’esprit d’équipe », précise le directeur.

Avec une volonté assumée d’ouvrir ces formations à des jeunes filles, qui ne représentent actuellement que 15 % des effectifs. Une diversité également recherchée en direction des jeunes issus des zones d’éducation prioritaire, et au sein même des équipes enseignantes.

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Un manageur sur deux se dit angoissé au travail

Qui veut encore grimper dans la hiérarchie de son entreprise ? Un tiers des non-manageurs envisagent de le devenir, et seulement un quart des femmes, tandis qu’un Français sur deux estime que la fonction managériale est plus difficile à exercer aujourd’hui que par le passé. C’est ce que révèle le baromètre réalisé par Harris Interactive pour la start-up Alan, spécialisée dans les mutuelles pour les entreprises, et publié jeudi 20 avril.

Cette étude annuelle évaluant le niveau de « bien-être mental » au travail et les attentes des actifs, a sondé un échantillon de 4 054 personnes représentatif des Français âgés de 18 ans et plus, du 21 février au 3 mars 2023 ; 64 % d’entre eux occupent une fonction de manageur.

« Les manageurs de proximité sont en première ligne pour morfler en permanence. » Le juriste Jean-Emmanuel Ray, professeur à l’université Paris I-Panthéon Sorbonne, a introduit les débats qui ont accompagné la présentation de l’étude, en insistant sur l’inadéquation entre le lien de subordination propre au contrat de travail, et la réalité des entreprises, où les salariés revendiquent plus d’autonomie. « Avant la verticalité était naturelle, dans la société et l’entreprise. Avec le télétravail ou le forfait jour, le manageur a beaucoup plus de travail », poursuit-il.

« Entre le marteau et l’enclume »

Il ressort des chiffres que les manageurs s’estiment toujours en première ligne depuis la pandémie, et semblent encore plus « entre le marteau et l’enclume » qu’auparavant. Un sur deux se dit angoissé, contre 35 % des non-encadrants ; 68 % d’entre eux se déclarent actuellement stressés, contre 52 % des autres salariés.

« C’est une fonction plus difficile à exercer que par le passé, car les modes d’organisation et rapports au travail ont changé, et ils ont du mal à tout concilier. Les collaborateurs veulent des rapports plus individualisés, a expliqué Magalie Gérard, directrice adjointe du département Politique Opinion d’Harris Interactive. Mais les manageurs ne sont pas suffisamment soutenus par leur direction et RH [ressource humaine], les exigences de performance ne baissent pas, et ils se sentent à 41 % isolés dans leur fonction. »

« Les jeunes de mon master ont des maîtres d’apprentissage, et ils me disent que ces derniers sont épuisés, qu’ils n’ont pas le temps, a renchéri M. Ray. Comment pourrais-je avoir envie d’être manageur ? Sans compter les risques pénaux dans une société qui se juridicise et se judiciarise, les risques de harcèlement moral. Si on veut être un manageur crédible, il faut en plus connaître le droit du travail. »

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Un accord va garantir un revenu minimal horaire fixé à 11,75 euros aux livreurs des plates-formes en France

Les plates-formes ont signé un accord, jeudi 20 avril, en France avec les instances représentatives des livreurs deux-roues indépendants pour leur garantir un revenu minimal horaire fixé à 11,75 euros, selon un communiqué de la Fédération nationale des autoentrepreneurs et microentrepreneurs (FNAE).

« Ces premiers accords consacrent le dialogue social et constituent une réelle avancée en faveur du renforcement des droits des travailleurs de la livraison », s’est réjoui sur Twitter le ministre du travail, Olivier Dussopt.

Les instances représentatives des chauffeurs VTC (véhicules de tourisme avec chauffeur) avaient déjà signé en janvier un accord avec les plates-formes pour instaurer un revenu minimum par course – et non horaire – d’un montant de 7,65 euros.

Au total, trois accords sur des sujets différents étaient soumis à signature jeudi, l’un sur les revenus, l’autre sur la désactivation d’un compte de livreur, le troisième sur le dialogue social.

En ce qui concerne les revenus, c’est « un gain immédiat pour les livreurs, dont 20 % au moins sont en dessous de ce seuil », s’est félicité Grégoire Leclercq, président de la FNAE, qui a signé l’accord.

Accord sur la désactivation de comptes

Le syndicat Union-Indépendants « consulte les livreurs et livreuses sur la garantie minimale horaire » mais a signé l’accord qui permet de mieux encadrer les modalités de rupture de la relation commerciale entre les plates-formes et les livreurs (dites « désactivation » du compte ou « déconnexion »), a-t-il fait savoir par voie de communiqué.

La FNAE a, elle aussi, signé cet accord sur la désactivation de comptes. « Alors que les déconnexions étaient jusque-là à l’initiative unilatérale des plates-formes », l’accord prévoit que le livreur pourra signaler lui-même des incidents, notamment avec des clients, devra être informé de la survenance d’incidents par la plate-forme et pourra « se défendre et contester les motifs » de la déconnexion, détaille la FNAE.

Par ailleurs, cette décision devra être prise « par une personne physique et non un algorithme » et ne pourra pas advenir « sans préavis » dans les cas où serait invoquée une raison administrative, a ajouté la FNAE.

L’Association des plates-formes d’indépendants (API) – qui réunit dans sa commission livraison Deliveroo, UberEats et Stuart – a signé jeudi « trois accords inédits », s’est-elle félicitée par communiqué. Ceux sur les revenus et la déconnexion, ainsi qu’« un accord de méthode pour renforcer les moyens des représentants et la qualité du dialogue social ».

« Ces accords s’inscrivent dans le cadre d’un dialogue social sectoriel mis en place par les pouvoirs publics ces derniers mois et seront donc applicables à l’ensemble des plates-formes de mise en relation dans le secteur de la livraison », a rappelé l’API.

Le Monde avec AFP

Emploi des seniors : les inconnues autour d’un dossier renvoyé au dialogue social

Retour à la case départ pour l’emploi des seniors. Ce dossier, qui avait commencé à être traité par la réforme des retraites, devait également être abordé dans un grand projet de loi sur le travail, susceptible d’être présenté avant l’été. Mais les cartes viennent d’être rebattues en quelques jours. Il appartient désormais aux partenaires sociaux de s’emparer du sujet pour trouver des solutions concrètes.

Les plans du gouvernement ont été remis en cause le 14 avril, lorsque le Conseil constitutionnel a invalidé six dispositions du texte qui repousse à 64 ans l’âge d’ouverture des droits à une pension. Parmi les mesures censurées, deux ont beaucoup retenu l’attention et concernent les travailleurs vieillissants : l’index senior, qui devait « objectiver la place » de cette catégorie d’âge dans les entreprises d’au moins 300 personnes, et le « contrat de fin de carrière », destiné à soutenir l’embauche de chômeurs de longue durée ayant atteint ou dépassé le cap de la soixantaine. L’institution de la rue de Montpensier, à Paris, a considéré que ces mécanismes n’avaient pas leur place dans le véhicule législatif choisi par l’exécutif – en l’occurrence une loi de financement rectificative de la Sécurité sociale – car ils étaient dépourvus d’effet direct ou leur effet était trop indirect, en 2023, sur les comptes des régimes obligatoires de base.

Deuxième changement de programme : il résulte de l’allocution prononcée lundi 17 avril par Emmanuel Macron. Ce jour-là, le président de la République a annoncé un « pacte de la vie au travail », qui sera « construit dans les semaines et les mois qui viennent par le dialogue » entre centrales de salariés et mouvements d’employeurs. Le lendemain, il a précisé ses attentes, lors d’une rencontre à l’Elysée à laquelle étaient conviés les syndicats et le patronat – mais que les premiers ont boycottés.

Chantiers réagencés

De ces interventions successives du chef de l’Etat, il ressort que plusieurs chantiers vont être un peu réagencés. Il y aura tout d’abord un texte législatif pour retranscrire l’accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur signé en février par les partenaires sociaux – à l’exception de la CGT. S’ensuivra, avant l’été, une deuxième réforme, avec deux volets : l’un sur la refonte des lycées professionnels et l’autre sur la transformation du service public de l’emploi avec la création de France Travail. Enfin, le « pacte de la vie au travail », sur lequel les organisations de salariés et d’employeurs vont plancher à la demande de M. Macron, doit se traduire par des cycles de discussions consacrées à plusieurs thèmes – dont l’emploi des seniors –, le but étant de parvenir à des accords à l’échelon national, sectoriel et dans des entreprises, d’ici à la fin de l’année.

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