Archive dans 2022

Quatre agents de RTE licenciés, suspectés d’être intervenu sur le réseau électrique sur fond de mouvements sociaux

La direction du gestionnaire du transport d’électricité RTE a licencié quatre agents convoqués par la justice pour des soupçons d’interventions frauduleuses sur le réseau électrique, a appris l’Agence France-Presse (AFP) jeudi 15 décembre de sources concordantes.

Les quatre agents de RTE, convoqués devant le tribunal correctionnel de Paris le 28 février, avaient été placés en garde à vue début octobre dans les locaux des services de renseignements, la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), à la suite d’une plainte contre X de RTE visant des soupçons d’interventions frauduleuses sur le réseau électrique, sur fond de mouvements sociaux en juin et juillet.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Quatre salariés de RTE en garde à vue à la DGSI

Le groupe avait également diligenté une enquête interne, au terme de laquelle il avait signifié aux quatre salariés, lors d’entretiens préalables, envisager leur « mise à la retraite d’office », ce qui équivaut à un licenciement.

Francis Casanova, délégué syndical central CGT pour RTE, a dénoncé une « direction en mode bulldozer, en guerre contre les représentants du personnel, en guerre contre les grévistes, ne supportant aucune contestation interne ».

Contactée par l’AFP, la direction a confirmé ces sanctions, indiquant qu’elles « font suite à des actes graves commis sur le réseau électrique, qui auraient pu entraîner de lourdes conséquences, comme de la coupure d’électricité, voire l’effondrement du système électrique de toute une région ».

Une « machination orchestrée par la direction de l’entreprise »

Le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez était intervenu lui-même dans cette affaire. Interpellant la première ministre Elisabeth Borne dans une lettre le 7 décembre, il lui a demandé de « stopper » ces procédures de licenciements.

Le leader de la CGT a dénoncé une « machination orchestrée par la direction de l’entreprise », estimant, sur la foi des procès-verbaux de la DGSI qui a interrogé les quatre agents, que le directeur de la sécurité de RTE avait « saisi directement la DGSI, après que l’entreprise a déposé une plainte contre X au commissariat de Lille ».

La direction a démenti, indiquant avoir simplement « informé la section cyber de la DGSI », et évoquant une « procédure habituelle » pour ce type d’action.

Elle a assuré que « le procureur de la République, et lui seul, a décidé de saisir la section spécialisée en matière de cybercriminalité », laquelle a « ensuite désigné la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) comme le service enquêteur ».

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Les syndicats de l’électricité et du gaz se mobilisent contre « la baisse du pouvoir d’achat »

Le Monde avec AFP

Le futur RSA, conditionné à des heures d’activité, testé dans dix-neuf territoires

Dix-huit départements et une métropole. Le ministre du travail, Olivier Dussopt, a annoncé, mardi 13 décembre, quels seront les territoires qui expérimenteront le nouveau revenu de solidarité active (RSA), en 2023. On y trouve notamment l’Aisne, les Bouches-du-Rhône, la Creuse, la métropole de Lyon, La Réunion ou encore la Seine-Saint-Denis. « L’ensemble de ces départements reflète une pleine diversité sur le plan géographique, démographique et social », précise le ministre dans un communiqué.

Avec cette réforme, qui s’inscrit dans celle, plus globale, du service public de l’emploi, avec la création de France Travail, le gouvernement souhaite conditionner le RSA à des heures d’activité hebdomadaires, à l’image de ce qui a été fait pour le contrat engagement jeune. Dans un courrier envoyé aux parties prenantes en novembre et que Le Monde s’est procuré, M. Dussopt explique que « tous les allocataires des territoires d’expérimentation seront amenés à signer un contrat d’engagement sur la base d’un accompagnement intensif avec une cible de quinze à vingt heures par semaine ».

Un accompagnement qui pourra prendre plusieurs formes : immersion et formation en entreprise, démarche sociale accompagnée, ateliers collectifs, activité citoyenne, accompagnement à la création d’entreprise, intégration dans un chantier d’insertion, etc. Une large liste que le ministre justifie dans son courrier « par la volonté de rendre possible une adaptation aussi fine que possible à la situation de la personne » et non pas « par une logique d’activité obligatoire non rémunérée et assimilable à un emploi ».

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés En Alsace, des ateliers pour aider les allocataires du RSA à « recréer du lien social »

Alors que l’expérimentation – à laquelle sont consacrés 20 millions d’euros – prévoit par ailleurs que chaque bénéficiaire du RSA s’inscrive à Pôle emploi, l’exécutif précise qu’il y aura trois types de suivi pour les allocataires, en fonction de leur capacité à reprendre un travail rapidement. La fin de la mission de préfiguration de France Travail, confiée au haut-commissaire à l’emploi, Thibaut Guilluy, devait avoir lieu mi-décembre, mais la présentation du projet a été repoussée à mi-janvier.

« Bifurquer, asperger de soupe : ces démarches sont-elles les solutions les plus efficaces pour provoquer les changements attendus ? »

Les étudiants d’AgroParisTech ont durablement marqué les esprits. En affirmant, face caméra, lors de leur remise de diplôme, leur choix de « bifurquer », d’être apiculteurs, boulangers ou permaculteurs, plutôt que cadres dans de grandes entreprises, ils ont révélé l’exaspération d’une partie de leur génération.

Non, ils n’acceptent pas d’être associés à des organisations dont ils jugent l’impact globalement négatif. Oui, ils préfèrent gagner moins, plutôt que cautionner la passivité de certaines entreprises face à la montée des périls, le dérèglement du climat ou l’écroulement brutal de la biodiversité.

Ces discours dérangeants reflètent les perceptions de pas moins d’un tiers des 18-30 ans, refusant de postuler dans des entreprises au comportement environnemental problématique (sondage Harris, mars 2022). Certains choisissent donc le repli, la posture d’observation critique « à la Rousseau ». Ils se retirent dans des bulles progressistes depuis lesquelles ils contemplent le reste du monde et inventent de nouvelles manières de vivre, à petite échelle.

D’autres voies existent

Une stratégie de préservation de l’estime de soi face à la compromission. D’autres se tournent vers une action militante plus classique, suscitant l’émoi de l’opinion pour faire pression sur les décideurs. Ils prônent la désobéissance civile, aspergent de soupe à la tomate des tableaux de maître ou se collent à des voitures de sport…

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés L’anxiété liée au dérèglement climatique, source d’une nouvelle radicalité militante

Mais s’exposer ainsi pour dénoncer ou refuser d’intégrer les grandes organisations, bifurquer, asperger de soupe, ces démarches sont-elles les solutions les plus efficaces pour provoquer les changements attendus ? D’autres voies existent. Plusieurs recherches en management montrent que des personnes non décisionnaires, comme des managers locaux, disposent en réalité de marges de manœuvres pour faire cheminer leurs idées, les transformer en projets collectifs et infléchir ainsi les stratégies des organisations.

Écouter aussi Choquer, bloquer, saboter… les nouveaux visages de l’activisme climatique

Nous mettons en évidence dans notre thèse de doctorat (« La critique dans et à travers les organisations : une approche narrative », 2021) certains moyens de parvenir à ces résultats. Premier conseil à celles et ceux qui voudraient se joindre à cette « armée des ombres » : gérer les impressions, selon l’expression du sociologue Erving Goffman, autrement dit paraître aussi « normal » que possible pour faciliter la relation.

Proposer des narratifs attractifs

Les décisions sont rarement prises dans les instances officielles ; elles se préparent dans les coulisses. Il est donc indispensable de se faire accepter, apprécier, pour pénétrer progressivement dans les cercles de pouvoir. Pour cela, porter son indignation en bandoulière est une grave erreur. Il faut se montrer posé au contraire, rassurant, s’imposer comme crédible, membre du sérail.

Il vous reste 51.3% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

En Alsace, des ateliers pour aider les allocataires du RSA à « recréer du lien social »

Les têtes sont basses et les regards timides. Des années de précarité, d’isolement, voire de désocialisation finissent par rendre prudent, méfiant même. Pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), parler de soi est une épreuve. Difficile de s’exprimer quand votre voix paraît, la plupart du temps, inaudible. Julie, Cyril et Sandra – ils ont souhaité rester anonymes – sont de ceux-là.

Tous trois font partie des 305 Alsaciens au RSA inscrits dans un parcours de bénévolat volontaire lancé par la Communauté européenne d’Alsace (CEA, issue de la fusion des départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin), qu’ils suivent à l’Atelier, l’une des quatre structures financées par la collectivité pour mener cette mission. Un dispositif qui permet « de recréer du lien social, de se sentir utile », assure Julie, 36 ans. Titulaire d’une licence de psychologie, au RSA depuis 2015, elle est aujourd’hui en contact avec l’association Caritas pour mener un projet professionnel orienté vers le social. « C’est ce parcours qui m’a permis de savoir que je voulais vraiment faire ça », raconte-t-elle.

Sandra, 40 ans, a trouvé un emploi en juillet dans un Ehpad, grâce à l’Atelier, dans les locaux de cette association, le 18 novembre 2022, à Sélestat (Bas-Rhin).
Lorna Piasentin, référente RSA pour l’accompagnement du dispositif engagement citoyen, et Myriam Haddouf (à droite), directrice adjointe de l’Atelier, le 18 novembre 2022, dans les locaux de l’association, à Sélestat (Bas-Rhin).

L’Alsace, un territoire qu’il est utile d’observer au regard de la réforme du RSA promise par Emmanuel Macron. Lors de sa campagne pour sa réélection, au printemps, le président de la République avait annoncé vouloir conditionner le versement de l’allocation à entre quinze et vingt heures d’activités hebdomadaires. Le ministre du travail, Olivier Dussopt, a annoncé, mardi 13 décembre, la liste des dix-neuf territoires retenus pour expérimenter ce nouveau dispositif d’accompagnement en 2023, dans le cadre de la création de France Travail, le futur service public de l’emploi.

Succès mitigé

Les deux départements alsaciens n’ont pas attendu le projet gouvernemental pour tenter d’associer RSA et bénévolat. En 2016, le Haut-Rhin avait voulu rendre obligatoire un engagement associatif de sept heures par semaine. Une mesure d’abord retoquée par le tribunal administratif fin 2016 avant d’être finalement validée par le Conseil d’Etat, en 2018. Mais depuis la fusion des deux départements, en 2021, la CEA préfère miser sur le volontariat, notamment à travers ces « ateliers de l’engagement citoyen ». Les allocataires participent à des rendez-vous collectifs deux fois par mois, une première étape avant de passer éventuellement au bénévolat dans une association. « Le début d’une reprise de confiance en soi », explique Lorna Piasentin, référente RSA de l’Atelier.

Pour le président (Les Républicains) de la CEA, Frédéric Bierry, « le volontariat est la clé ». Le dispositif vise, selon lui, « des personnes particulièrement éloignées de l’emploi » pour lesquelles « la vie associative permet de recréer un réseau, de retrouver confiance en se montrant à soi et aux autres qu’on peut tenir un engagement et de réaliser quelque chose ». L’impact paraît cependant tout relatif. Avec 305 personnes accompagnées, il concerne seulement 1 % des 39 000 allocataires du RSA que compte l’Alsace.

Il vous reste 57.96% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Les DRH confrontés au phénomène insidieux du « quiet quitting »

Savoir manager les profils mercenaires pourrait bien être le défi 2023 pour les directeurs des ressources humaines. Un nouveau concept nourrit depuis quelques mois la littérature managériale, celui de quiet quitting. D’aucuns parlent de « démission silencieuse », pour désigner les salariés qui réduisent leur travail à ce qu’exige leur fiche de poste. Ils ne travaillent plus au-delà de leurs heures de travail, ne répondent plus aux mails, ne viennent pas toujours aux réunions.

Mais parler simplement de « désengagement » serait réducteur, voire erroné. « Les salariés ont rééquilibré leur niveau d’exigence entre ce qu’ils donnent et ce qu’ils reçoivent », expliquait Benoît Serre, vice-président délégué de l’Association nationale des DRH (ANDRH), lors d’une conférence bilan 2022 sur « les nouvelles organisations du travail ».

« Le désengagement est progressif et n’est pas exprimé. C’est pour ça qu’on parle de quiet quitting », témoigne Elliot Boucher, cofondateur d’Edusign, une start-up d’une vingtaine de salariés dans le secteur de l’éducation, qui a récemment été confrontée au problème : « Un de nos développeurs en poste depuis un an et demi s’est ainsi mis à travailler un peu plus lentement que d’habitude, jusqu’à s’effacer et finalement quitter l’entreprise. Un deuxième salarié, arrivé depuis quelques mois seulement, a reproduit le même scénario, jusqu’à ce qu’on le mette sur un nouveau projet. Le premier était sur un projet peut-être moins intéressant que celui de ses collègues. »

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Phénomène de « grande démission » : L’effet boomerang de la gestion individualisée des performances

Une fois le quiet quitting détecté, la start-up a pris des mesures de prévention pour casser la dynamique insidieuse et éviter l’hémorragie des départs : « La particularité d’Edusign est qu’on est tous à distance. Quand on demandait aux collaborateurs si tout allait bien, la réponse était toujours “oui”. Alors on a mis en place un processus pour suivre les salariés, en instaurant des entretiens trimestriels, avec des objectifs sur le travail et sur leurs aspirations personnelles, afin de maintenir l’équilibre vie privée-vie professionnelle. On a ainsi décelé un troisième cas qui a été réglé. On va essayer de trouver le bon équilibre pour chacun. »

L’importance de la place préservée pour la vie privée est régulièrement exprimée par les jeunes dans les sondages d’opinion. Dans la dernière édition du baromètre « les jeunes et l’entreprise » réalisé par BVA pour La fondation Jean Jaurès et la Macif et publié fin novembre, 30 % des jeunes estiment ainsi qu’une entreprise doit leur permettre d’avoir du temps libre pour leur vie personnelle (36 % à partir de bac +3).

Il vous reste 60.77% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Les écoles de management s’accrochent pour suivre les tendances en entreprise

Le deuxième campus parisien d'ESCP Europe à Montparnasse dans les anciens locaux de Novancia

« Mes cours ne sont jamais identiques d’une année à l’autre, prévient Emmanuelle Léon, professeure à l’ESCP Business School et directrice scientifique de la chaire Reinventing Work. Les tendances bougent énormément et deviennent rapidement obsolètes. » Si l’intérêt pour le management à distance ne date pas de la crise sanitaire liée au Covid-19, celle-ci a fait du travail hybride – avec le développement d’équipes virtuelles ou du télétravail – une véritable norme. Ce qui soulève de nombreuses questions concernant l’organisation des équipes et le suivi des collaborateurs au sein des entreprises.

Lire aussi l’enquête : Article réservé à nos abonnés « Sans possibilités de télétravail, certains ne postulent même pas » : Pour retenir les jeunes diplômés, le pari de l’ultraflexibilité

« Le télétravail pourrait renforcer un éloignement des manageurs du travail réel, et peut-être entraîner une focalisation sur des aspects purement techniques au détriment de la coopération, avertit ainsi Flore Barcellini, professeure des universités en ergonomie au CNAM et membre du Centre de recherche sur le travail et le développement. Il y a donc un besoin de formation sur la capacité des manageurs à organiser et à discuter des conditions de la coopération. » Sujet dont se sont saisies les écoles de commerce et les formations universitaires spécialisées dans le management.

« J’émets l’hypothèse que, quand on est à distance, on a tendance à oublier l’importance de l’humain et de l’informel », confirme Emmanuelle Léon, qui estime fondamental d’encourager les manageurs – et les futurs manageurs – à s’interroger sur le bien-être de leurs collaborateurs. Avec tout un attirail de thèmes pour remettre l’humain au cœur du travail : comment anticiper et fluidifier les échanges, comment détecter les signaux faibles, etc. « Dans une relation davantage marquée par la technologie, il faut s’assurer de faire encore communauté, qu’il y ait du lien social, qu’on arrive à intégrer les talents et à les développer », poursuit-elle. Certains de ses collègues proposent aussi du yoga ou de la méditation, une manière de « faire entrer les corps dans les cours » à l’heure du virtuel et du distanciel.

Anticiper et fluidifier les échanges

Les enseignants « restent à l’affût de toutes les tendances », poursuit Emmanuelle Léon, notamment grâce à la recherche et aux études. Elle cite ainsi les derniers travaux de l’université Stanford sur les risques que le télétravail fait peser sur la carrière des femmes : devenues mères de famille, celles-ci ont tendance à délaisser davantage le présentiel, pourtant valorisé pour obtenir une promotion. Au-delà de la recherche, les écoles de management s’appuient sur des partenariats avec des entreprises pour nourrir leur offre. « De plus en plus d’enseignements s’ancrent dans la réalité managériale des entreprises, alors qu’autrefois l’étude de cas représentait le seul point de contact avec le monde de l’entreprise », souligne Sébastien Damart, vice-président du Conseil de la formation et de la vie étudiante de l’université Paris Dauphine PSL. Au programme : hackathons (projets collaboratifs pour répondre au défi d’une entreprise), partenariats entre les masters et les entreprises, ou challenges à relever. « Nous sommes entrés dans ce nouveau paradigme : une formation en management sans ce type de partenariats serait un peu aberrante », poursuit-il.

Il vous reste 47.15% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

JO 2024 : face à la pénurie d’agents, le risque d’une sécurité au rabais

La première ministre, Elisabeth Borne, et le maire de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), Mathieu Hanotin, au Stade de France, le 13 novembre 2022, pour la pose d’une plaque rendant hommage aux victimes des attentats terroristes du 13 novembre 2015.

A dix-neuf mois des Jeux olympiques de Paris, les difficultés de recrutement des entreprises de la sécurité privée font craindre une pénurie d’agents pour assurer la surveillance des compétitions. La situation est d’autant plus tendue en Ile-de-France que la vague d’attentats de 2015 y a accru, plus qu’ailleurs, les besoins en personnel qualifié. « Il existe un déséquilibre entre l’offre et la demande sur le marché de la sécurité privée dans notre région, que les Jeux vont accentuer », résume Nadine Crinier, directrice régionale de Pôle emploi Ile-de-France.

Aux côtés des 30 000 policiers et gendarmes qui seront mobilisés, « il faut 25 000 agents de sécurité privée en plus pour les JO », a estimé, le 22 septembre, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin. En réalité, le nombre de personnes à trouver est moindre, parce que certaines entreprises franciliennes pourront libérer des agents pendant les Jeux, et qu’un grand nombre d’événements devraient être annulés ou reportés.

En fait, « c’est plutôt de 7 000 à 8 000 agents qu’il faut trouver » pour assurer les missions de sécurité relevant du Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop), précise Cédric Paulin, secrétaire général du Groupement des entreprises de sécurité, qui fédère 200 entreprises du secteur. « Mais comme il en manque déjà 8 000 en Ile-de-France, c’est un minimum de 15 000 qu’il va falloir trouver, et former, en dix-huit mois seulement. »

Une gageure

Face à cette situation préoccupante, Pôle emploi a adopté plusieurs mesures. En Ile-de-France, l’organisme public a contacté 10 000 titulaires de la carte professionnelle délivrée par le Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps), une émanation du ministère de l’intérieur, pour les inciter à revenir travailler dans le secteur.

Pendant les confinements liés au Covid-19, beaucoup de ces agents se sont réorientés vers d’autres filières, comme la logistique. Si un tiers environ travaille encore dans le secteur de façon occasionnelle, faire revenir les autres vers la sécurité constitue une gageure. « Solliciter ces 10 000 inscrits ne suffira pas, c’est pourquoi nous allons aussi nous adresser aux 50 000 demandeurs d’emploi de longue durée dans des fonctions d’accueil, de gardiennage et de nettoyage… », développe Nadine Crinier.

Lire aussi : JO 2024 : plus de 30 000 policiers et gendarmes seront mobilisés chaque jour

Pour contrer la pénurie, les entreprises de la sécurité font des efforts afin de renforcer leur attractivité : elles proposent davantage de contrats à durée indéterminée et ont accepté de revoir à la hausse leur grille de salaire. Au 1er janvier 2023, la rémunération des agents de sécurité va augmenter de 7,5 %. Il y avait déjà eu un coup de pouce de 3,5 % en 2022. Des discussions sont en cours, qui pourraient aboutir à une nouvelle hausse de 10 % au 1er janvier 2024. « Ce qui mettrait le premier niveau de rémunération dans nos métiers à plus de 10 % au-dessus du smic », se félicite M. Paulin.

Il vous reste 56.82% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Mobilité durable, évolution des métiers… Les entreprises face à l’impératif de transition écologique

Où en sont les entreprises sur le climat ? Entre énumération de leurs gestes et réflexions existentielles sur les chantiers à venir, une vingtaine de responsables des ressources humaines – et pour l’occasion, certains responsables de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) – ont échangé sur leur posture face à la nécessaire transition écologique des entreprises, mardi 6 décembre à Paris, à l’occasion des Rencontres RH, rendez-vous mensuel de l’actualité du management organisé par Le Monde en partenariat avec ManpowerGroup et Malakoff Humanis.

Chargée d’introduire les débats, Anne Le Corre, cofondatrice du Printemps écologique, nouveau syndicat de « salariés qui veulent transformer les entreprises », a tout de suite écarté les différentes formes de greenwashing et d’hypocrisie sur le sujet, comme « la compensation carbone qui revient depuis des décennies à planter des arbres pour se donner bonne conscience ». « Il faut prendre la mesure des transformations que la situation demande, or il s’agit de transformer l’intégralité des modèles de production. D’ici deux à trois ans, on va demander aux entreprises comment elles s’alignent sur l’accord de Paris, ça va devenir réglementaire. »

« 52 % des DRH mènent actuellement une réflexion sur le climat, 41 % ont mis en place un plan de réduction de l’impact carbone, et 22 % un plan de mobilité douce », énumère la DRH du groupe Afnor Laurence Breton-Kueny, également vice-présidente de l’Association nationale des DRH, citant leur baromètre de rentrée réalisé auprès de 462 de leurs 5 000 adhérents.

« On voit que le forfait mobilité durable est la première porte d’entrée de ces questions, à condition déjà de ne pas le voir simplement comme un outil pour les salariés citadins », estime Mme Le Corre. Ce forfait existe chez BNP Paribas Asset Management, Saint Gobain, Keolis ou la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), mais ne mobilise pas encore les foules.

Un difficile changement

Dans leur cheminement, les entreprises agissent d’abord sur les catégories 1 et 2 de leur bilan carbone, dites « scopes ». Elles comprennent leurs émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre. ManpowerGroup vise ainsi une baisse de 60 % de ses émissions sur les scopes 1 et 2 en 2030, par rapport à 2019.

L’action passe aussi par la sensibilisation des salariés, qui ne sont pas tous prêts à changer leurs habitudes. « Il y a un équilibre à trouver entre prise de conscience collective et accompagnement individuel des salariés, qui peut prendre du temps », dit Jérôme Friteau, DRH de la CNAV.

Il vous reste 52.01% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Au CFA de Blois, les « oubliés de l’enseignement »

Une cinquantaine des soixante-dix enseignants du Centre de formation d’apprentis (CFA) de Blois se sont rassemblés, lundi 12 décembre, dans un froid glacial, sur le parvis de la Halle aux grains de la ville. Protégés d’un épais bonnet, Sophie Bourgon y enseigne la coiffure depuis quatre ans. « Je suis arrivée pour remplacer une titulaire qui partait à la retraite. Aujourd’hui, nous sommes trois enseignantes en coiffure, toutes en CDD, pour 150 jeunes. Dans quel métier doit-on enchaîner les CDD non-stop pendant autant d’années ? »

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Le succès fulgurant des études en apprentissage : « Sans cela, j’aurais été bloquée financièrement »

Le bas salaire est une autre source de mécontentement. « Parmi mes élèves en contrat d’apprentissage, certains touchent 1 370 euros pour trente-cinq heures par semaine, en incluant leurs seize heures de cours. Moi, je suis à 1 500 euros net… » Sophie aime son métier, ces jeunes qu’elle accompagne vers l’excellence : « On essaie de leur bâtir des CV attractifs, en les emmenant à des concours, en leur faisant rencontrer Raphaël Perrier au Mans, un coiffeur reconnu à l’international… »

« Et bien, tout ça, c’est sur notre temps libre, explique-t-elle, car on ne veut pas ponctionner leur peu d’heures de cours. Mais à un moment donné, on n’a plus envie. » Derrière elle, Christophe Jauffrion, qui enseigne la chimie du cheveu teinté ou décoloré depuis trente ans. Aujourd’hui, il gagne 2 200 euros net par mois : « Ceux qui démarrent sont à 1 450 euros avec vingt-et-une heures de cours par semaine, contre dix-huit dans l’enseignement général. C’est lamentable, non ? A ce prix-là, on ne retient pas grand-chose, sauf des gens sans envie. Les autres partent. »

« Ça devient l’usine »

Lui regrette des réformes récentes, comme l’avènement des « opérateurs de compétences » en 2019, puis la régionalisation des chambres de métiers et de l’artisanat en 2021. « Avant, j’arrivais à monter des dossiers pour financer une formation supplémentaire d’aide à la mémorisation pour mes élèves. Maintenant, tout ça, c’est refusé… », explique-t-il. Au gré des témoignages, le sentiment d’être les « oubliés de l’enseignement » domine chez ces grévistes.

Leur mobilisation s’ajoute à celles, toutes récentes, des formateurs des CFA de Vannes, Lorient (Morbihan), Plérin (Côtes-d’Armor), Rouen, Chartres, Orléans ou encore Lézignan (Aude). Après vingt-quatre ans comme mécanicien puis chef d’atelier dans un garage Volkswagen, Olivier Legros s’est tourné vers le CFA de Blois par envie de transmettre. Le voici désabusé. « Je n’ai jamais fait grève, mais à un moment, on est obligé, regrette-t-il. Il faut arrêter de nous prendre pour des idiots. » Déjà quatre ans de CDD lui aussi, et toujours pas de CDI. Son salaire stagne à 1 700 euros net.

Il vous reste 34.12% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

« En se situant à l’interface entreprise-société, la RSE place le souci de l’humain et de la planète dans le champ décisionnel des manageurs »

Depuis l’adoption, le 10 novembre, de la directive sur la communication des données de durabilité (Corporate Sustainability Reporting Directive, CSRD) par le Parlement européen, un vent de panique souffle sur les entreprises européennes, qui, pour une grande majorité d’entre elles, n’étaient jusqu’à présent pas concernées par les obligations de diffusion d’informations sociales et environnementales.

La CSRD devient l’une des pierres angulaires du Pacte vert européen, dont l’objectif est de favoriser une économie soutenable afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Les différents volets du plan de finance durable, qui accompagnent le Pacte vert, se révèlent telles de nouvelles incitations à publier davantage d’informations sociales et environnementales, avant tout dans une logique de conformité aux textes de loi.

Or la multiplication des obligations de publication d’informations sociales et environnementales ou reportings extrafinancier, occulte souvent la nécessité pour les entreprises d’une analyse stratégique des enjeux sociaux et environnementaux de leurs activités.

Stratégie et reporting sont liés

Avec les dispositions de la CSRD, qui entreront en vigueur progressivement à partir de janvier 2024, ce sont près de 50 000 entreprises qui seront concernées par des obligations de divulgation. Les exigences de la CSRD se font aussi plus précises et requièrent un plus haut degré d’expertise.

D’abord parce que les indicateurs de performance extrafinancière vont être normés. Ensuite parce que les informations extrafinancières devront répondre à la question « en quoi le modèle d’affaires et la stratégie de l’entreprise prennent en compte l’intérêt des parties prenantes et les incidences de l’entreprise sur les questions de durabilité ».

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés « Le reporting extra-financier va devenir une science de la donnée et une industrie de la vérification »

La CSRD rappelle ainsi que stratégie et reporting sont liés. Ce qui semble relever d’une évidence dans le domaine de la finance doit aussi être vérifié dans celui de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) ! Et les incitations et obligations, toujours plus nombreuses, à publier des informations sociales et environnementales ne doivent pas faire oublier aux investisseurs et aux entreprises que les indicateurs de performance extrafinancière pertinents sont ceux qui résultent de la stratégie RSE engagée, qui seule donne le sens à la finalité des activités.

La Commission européenne en 2011 définit la RSE comme « la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société », questionnant ainsi l’impact des activités de ces entreprises. En se situant à l’interface entreprise-société, la RSE place le souci de l’humain et de la planète dans le champ décisionnel des manageurs.

Il vous reste 55.37% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.