Archive dans septembre 2020

Le chausseur français Royer contraint à un vaste plan social

Dans un magasin de chaussures à Paris, le 20 juillet 2020.

Coup dur pour Royer. La PME familiale française a perdu le contrat de distribution de la marque américaine de sport New Balance. Le contrat qui liait les deux sociétés depuis 2010 arrivera à échéance au 31 décembre 2020.

La marque américaine, numéro quatre du marché mondial des articles de sport, à la tête de 4 milliards de dollars de chiffre d’affaires, avait confié à Royer la vente de ses collections de chaussures dans l’Hexagone voilà dix ans. Depuis, New Balance connaissait un succès fulgurant en parvenant à imposer ses modèles, dont la 574, aux pieds des petits et grands. La marque américaine a décidé de reprendre en direct la vente de ses collections, sans passer par l’intermédiaire d’un distributeur, explique la société française.

200 salariés français concernés

La perte de ce contrat oblige le groupe Royer à « mener une restructuration de ses activités », explique une porte-parole, confirmant des informations parues dans Ouest-France, le 17 septembre. Car l’entreprise, dont le chiffre d’affaires a atteint 300 millions d’euros l’an dernier, devrait tomber dans le rouge en 2020.

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Jacques Royer, son PDG, a dévoilé son plan de restructuration au personnel au début du mois. Près de 200 des 500 salariés français pourraient être concernées. Le plan de sauvegarde de l’emploi concernera les cinq sites que ce spécialiste du négoce exploite dans l’Hexagone.

En centre-ville, les chausseurs ont accusé une perte d’activité de l’ordre de 30 % au cours des huit premiers mois de l’année

La fin du contrat avec la marque américaine New Balance n’est pas la seule raison des revers financiers de la société bretonne, précise une porte-parole de Royer. Depuis le début de la pandémie due au coronavirus, le groupe qui distribue une trentaine d’autres marques, dont Kickers, Umbro et Charles Jourdan, a été confronté aux difficultés financières de ses clients, les magasins de chaussures.

Ces derniers ont été contraints de fermer leurs points de vente lors du confinement en France entre mi-mars et mi-mai. Et, depuis, concurrencés par l’envolée de la vente en ligne, ils n’ont pas retrouvé les clients perdus. Le marché français est en chute libre depuis janvier. En centre-ville, les chausseurs ont accusé une perte d’activité de l’ordre de 30 % au cours des huit premiers mois de l’année selon la Fédération des entreprises de la chaussure. Dès lors, ils ne sont pas en mesure de passer commandes auprès du groupe breton.

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L’entreprise, acteur déterminant du congé paternité

«  L’élargissement du congé paternité cherche aussi à faire rentrer encore plus dans les moeurs une pratique qui ne touche pas tous les salariés : 67% des pères ont recours au congé paternité, un chiffre qui n’a que très peu évolué depuis 2002. »

« Quand j’ai eu ma première fille en 2013, moins de douze heures après la naissance, je recevais un appel de mon boss que je devais absolument prendre. Une semaine après, j’étais de retour au bureau à faire du 9 heures-20 heures. Les mentalités étaient comme ça, et finalement je l’ai assez mal vécu. » Père de deux filles, Martial Valéry aurait voulu leur consacrer plus de temps à leur naissance.

Désormais dirigeant du studio de jeux vidéo mobiles Oh BiBi, il lui a paru normal de décider, début 2020, de proposer à ses salariés un congé paternité digne de ce nom : deux mois pleins, aux frais de l’entreprise. L’objectif : « Donner du temps à nos collaborateurs pour profiter de ces moments et libérer un peu leurs conjoints. Pour un employeur qui s’inscrit dans le temps long, c’est important de s’assurer de leur équilibre personnel ». Et quatorze jours de congé paternité sont largement insuffisants pour atteindre ce but, selon Martial Valéry.

Le gouvernement semble avoir entendu ses revendications : le congé paternité va être doublé, passant de 14 à 28 jours dont sept obligatoires, a annoncé mercredi 23 septembre Emmanuel Macron. Réclamée de longue date par les syndicats, les militantes féministes et de nombreux pères, cette décision s’inscrit dans le cadre d’une réforme de la politique de la petite enfance. La réforme, qui entrera en application en juillet 2021, coûtera en année pleine plus de 500 millions d’euros supplémentaires à la Sécurité sociale.

Le congé paternité ou second parent, mis en place en 2002, prend la forme d’un congé de onze jours consécutifs accordé au père ou second parent, auquel s’ajoutent pour les salariés trois jours d’absence autorisés par l’entreprise. Si ces trois jours resteront inchangés, le congé financé par la Sécurité sociale sera désormais de 25 jours.

« Le moins de risques possible »

En premier lieu, cette réforme vise à lutter contre les inégalités femmes-hommes : « Lorsque l’enfant arrive au monde, il n’y a aucune raison que ce soit juste la maman qui s’en occupe », justifie le président de la République. Mais l’élargissement du congé paternité cherche aussi à faire rentrer encore plus dans les mœurs une pratique qui ne touche pas tous les salariés : 67 % des pères ont recours au congé paternité, un chiffre qui n’a que très peu évolué depuis 2002.

Selon la nature du contrat et les choix de son entreprise, il est plus ou moins difficile d’accéder à un congé long, et il est rare d’aller au-delà des quatorze jours inscrits dans la loi. 80 % des salariés en CDI y ont recours, mais seuls 48 % de ceux en CDD, selon un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales. « Si on est en CDD et que notre confort économique dépend du renouvellement de ce contrat, on va prendre le moins de risques possible », observe Patrice Bonfy, cofondateur du média numérique Le Paternel.

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Plan d’économies à Radio France : la direction propose 340 départs volontaires d’ici à 2022

La présidente de Radio France, Sibyle Veil, à Paris, le 27 août 2019.

Dix jours après la reprise des négociations, la direction de Radio France a maintenant bouclé la version définitive de son plan d’économies. Il prévoit 340 départs volontaires d’ici à 2022, sur 4 100 contrats à durée indéterminés (CDI). Soit plus que les 299 suppressions d’emploi du plan précédent, en 2019. Principale différence, la direction promet de remplacer plus d’un poste sur deux, soit 183 en tout, dans le cadre de cette « rupture conventionnelle collective », un format plus souple qu’un plan de départs volontaires (PDV), qui ne permet pas de réembaucher sur les places laissées vacantes.

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Les contrats à durée déterminée (CDD) et les contrats à durée déterminée d’usage (CDDU), ces précaires qui travaillent pour Radio France, seront choisis en priorité pour être titularisés. « On se donne comme objectif d’en réaliser 70 % en proposant à des salariés qui travaillent déjà pour nous de bénéficier de CDI », a expliqué la directrice des ressources humaines, Catherine Chavanier, dans un courriel consulté par Le Monde et adressé aux organisations syndicales.

Deux tiers des partants seront issus du siège parisien, et un tiers de province. Priorité est donnée aux départs en retraite, même si des départs pour « un projet professionnel » restent possibles.

« Suppressions de poste éminemment politiques »

Les organisations syndicales ont jusqu’au 1er octobre pour parapher le plan, sans quoi la direction remettra sur la table le PDV présenté en 2019. Pour que cet accord soit entériné, il faut que quatre des six organisations syndicales le signent. « Les négociations se sont bien passées, et les propositions ont évolué dans le bon sens. Même si les conditions de départ sont modestes, et que la direction triche en n’incluant pas les postes déjà vacants, qu’elle considère comme déjà supprimés », réagit une représentante du SNJ.

« Ces suppressions de poste sont éminemment politiques. Il n’y avait pas d’urgence à les mettre en œuvre. Mais il y a un principe de réalité. Les modalités vont encourager aux départs. Notre inquiétude, c’est pour ceux qui restent, et pour la titularisation des précaires », constate Jean-Paul Quennesson, du syndicat SUD, dont les adhérents vont se réunir le 1er octobre pour décider de la suite à donner à la proposition de la direction.

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La présidente de Radio France, Sibyle Veil, à laquelle le gouvernement impose des mesures d’économies, ne peut se permettre la sortie de route. Présenté l’an passé, son premier plan de départs avait engendré une grève de cinquante-deux jours, le mouvement social le plus long du groupe radiophonique public.

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Assurance-chômage pour les indépendants : que reste-t-il de la promesse de campagne ?

« Mis en place en mars dernier, le fonds de solidarité permet à un entrepreneur, dont l’activité subit les conséquences de la crise sanitaire, de toucher une aide mensuelle plafonnée à 1 500 euros »

Alors que les entrepreneurs se mobilisent pour obtenir la prolongation du fonds de solidarité consacré aux très petites entreprises, quid de l’assurance-chômage pour les indépendants ? Dans le but de séduire son cœur de cible électorale, le candidat Macron l’avait promis lors de l’élection présidentielle de 2017 : la protection sociale des travailleurs free-lance serait alignée sur celle des salariés, en leur ouvrant les droits à l’assurance-chômage. Promesse concrétisée deux ans plus tard.

Depuis le 1er novembre 2019, les travailleurs indépendants en difficulté et éligibles au dispositif peuvent bénéficier d’une allocation versée par Pôle emploi. Bien peu semblent pourtant avoir profité de ce soutien, alors que les petits entrepreneurs sont nombreux à voir leurs rentrées d’argent s’effondrer depuis la crise sanitaire. Sollicité, Pôle emploi n’a pas communiqué de chiffres sur le sujet.

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Mais les syndicats de travailleurs indépendants se montrent unanimes : l’assurance-chômage reste peu ou pas mobilisée. « A notre connaissance, aucun de nos adhérents a fait la demande d’indemnisation chômage », indique Sylvie Joseph, administratrice déléguée de L’Union, plate-forme pour les travailleurs indépendants lancée par la CFDT et qui compte près de 3 000 adhérents. « Je ne connais personne qui ait utilisé ce dispositif », renchérit Hind Elidrissi, porte-parole de Indépendants.co, une association qui rassemble 6 000 travailleurs indépendants.

Les difficiles conditions d’accès à l’assurance-chômage

Le collectif de free-lances La Collab a bien voulu sonder ses adhérents pour Le Monde. Et le résultat est sans appel : parmi les 80 répondants, aucun n’a touché l’assurance-chômage ; surtout, 90 % n’en n’ont jamais entendu parler. « Ma comptable y a effectivement fait référence, mais pour le moment je ne suis pas allé chercher plus loin », avoue Julien Bonzom, directeur artistique du studio Hexapod. « C’est à nous de nous renseigner pour savoir à quelles aides on a droit », avance en guise d’explication Alexis Fontana, travailleur indépendant dans le domaine du digital.

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Pourtant, les besoins sont là : selon un sondage publié par la plate-forme Malt, mené en collaboration avec le cabinet Boston Consulting Group entre mai et juin 2020, la moitié (52 %) des 1 465 free-lances français interrogés disent subir une perte d’activité à cause de la crise. A la tête de La Collab, Célia Chauvet relève un « problème d’accompagnement et d’information » des travailleurs qui se lancent seuls dans l’aventure de l’entreprenariat.

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Valeo propose un accord emplois contre austérité à ses salariés

Des salariés de Valeo à Etaples (Pas-de-Calais), le 26 mai 2020.

Dernière ligne droite sociale pour Valeo. La direction de l’équipementier automobile (dans le top 10 mondial et premier français, au coude-à-coude avec Faurecia) a présenté ses dernières propositions, lors d’une ultime réunion de négociations avec les syndicats sur la réduction de ses coûts salariaux en France, mercredi 23 septembre. Le groupe avait indiqué, fin juillet, à ses équipes françaises qu’elle souhaitait, face à la « crise exceptionnelle » provoquée par la pandémie de Covid-19, négocier un accord de performance consistant à diminuer de 10 % (soit un gain récurrent de 100 millions d’euros par an) ses frais de personnel pour ses trente sites de l’Hexagone, totalisant 13 400 salariés.

L’accord, révélé par Les Echos et confirmé au Monde par le principal syndicat de l’entreprise, la CFE-CGC, consiste, après plus de deux mois de discussions serrées, à échanger une cure d’austérité salariale contre l’engagement, pendant deux ans, de ne procéder à aucun plan social d’entreprise (PSE), ce qui écarte a priori une éventuelle fermeture de site. Les délégués centraux des quatre principales organisations représentatives de l’entreprise (CFE-CGC, CGT, CFDT et FO) allaient, dans les heures à venir, lancer une consultation de leurs mandants pour savoir s’ils acceptent les termes de l’accord. Mardi 29 septembre, les syndicats feront savoir s’ils signent ou non.

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L’histoire est loin d’être terminée. Car si la direction a cédé sur l’absence de PSE – la ligne à ne pas franchir pour tous les syndicats –, les salariés devront accepter un gel des salaires pendant deux ans et renoncer à des primes (médaille du travail, « prime de progrès » liée à l’amélioration des performances du site) parfois importantes.

La CGT (deuxième syndicat avec 27 % des voix contre 32 % pour la CFE-CGC) a d’ores et déjà annoncé qu’elle ne signerait pas. D’autant que le projet d’accord n’interdit pas les suppressions d’emplois. Les départs sur la base du volontariat, les ruptures conventionnelles collectives (au niveau d’un établissement) ou individuelles peuvent être enclenchés. Un peu moins de 2 000 emplois ont déjà été supprimés au premier semestre 2020 en France (4 000 en Europe et 12 000 dans le monde), essentiellement des intérimaires et des contrats courts pour l’Hexagone.

Amère potion

La situation est donc complexe et les débats d’ici au 29 septembre s’annoncent mouvementés. « Rien n’est fait, insiste Pascal Phan, coordinateur central CFE-CGC. Il va falloir écouter, discuter pour arriver à dégager un consensus, quel qu’il soit. Mais en tant que coordinateur, je ne me vois pas signer l’accord si la moitié de mes adhérents est contre. Simplement, il faut bien avoir en tête que la direction fait une grosse concession en renonçant à tout PSE. Chez Valeo, c’est une première ! Il y a probablement plus à perdre à ne pas signer qu’à signer. »

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Grandpuits : Total ferme la raffinerie et promet une plate-forme « zéro pétrole »

Des salariés de la raffinerie de Grandpuits (Seine-et-Marne) en grève contre le projet de réforme des retraites du gouvernement, le 6 janvier 2020.

Total a confirmé, jeudi 24 septembre au matin, son intention de cesser le raffinage sur son site historique de Grandpuits, en Seine-et-Marne. Le groupe a détaillé aux syndicats, lors d’un comité social et économique central (CSEC) qui s’est tenu au siège du groupe, à la Défense, son projet de reconversion de la raffinerie.

Le sort du site état en suspens depuis l’annonce, en 2019, d’un audit sur l’oléoduc qui alimente la raffinerie depuis le port du Havre, le Pipeline d’Ile-de-France (PLIF). Après une première fuite en 2014, il a été le théâtre un nouvel incident en février 2019, qui a conduit à interrompre le transport de brut. Total estime que remplacer le PLIF pourrait coûter environ 600 millions d’euros. La raffinerie de Grandpuits devait en outre connaître en 2021 un « grand arrêt » – une sorte de révision générale qui intervient tous les sept ans et nécessite un arrêt complet des installations.

Le groupe a donc décidé de transformer l’activité du site plutôt que de faire réparer le tuyau. Son projet, intitulé « Galaxie », consiste à créer sur place une « plate-forme zéro pétrole ». Le groupe prévoit d’investir 500 millions d’euros pour se consacrer, à l’horizon 2024, à la production de biocarburants destinés aux secteurs aérien et routier. Cela se fera à partir de graisses animales, d’huiles de cuisson et d’huiles végétales, « à l’exception de l’huile de palme », précise Total. Une usine de « bioplastique », fabriqué à partir de sucre, biodégradable et recyclable, sera également implantée. Enfin, Grandpuits verra s’installer une usine de recyclage de plastique et deux centrales photovoltaïques.

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Les activités de raffinage devraient prendre fin dès le début de l’année 2021, et le stockage de produits pétroliers, fin 2023. L’approvisionnement de la capitale et des aéroports de Roissy et d’Orly sera désormais assuré par la raffinerie de Donges (Loire-Atlantique). Le projet prévoit de maintenir 250 postes sur les 400 que compte aujourd’hui Grandpuits. Le groupe assure en outre que le chantier créera 1 000 emplois au niveau local au cours des trois années à venir.

« On craint aussi des mutations forcées »

Avant même d’avoir été informée en CSEC, la CGT s’est inquiétée des effets sur l’emploi. Total affirme qu’il n’y aura aucun licenciement, mais plutôt des départs à la retraite non remplacés et des mobilités vers d’autres sites du groupe. Mais les syndicats rappellent que, lors des reconversions des sites de Carling (Moselle) ou de La Mède (Bouches-du-Rhône), des licenciements secs avaient eu lieu chez des sous-traitants. « On craint aussi des mutations forcées, puisque, dans le département, il n’y a pas beaucoup d’autres emplois », note Adrien Cornet, délégué CGT, qui souligne que les syndicats ont l’intention de demander une expertise afin de démontrer la viabilité de la raffinerie.

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L’inquiétude des salariés quant au Covid-19 risque de faire flamber l’absentéisme

Des arrêts maladie en hausse, motivés notamment par le stress ou l’épuisement professionnel, et une inquiétude quant au retour en entreprise qui a du mal à se dissiper : la crise sanitaire due au coronavirus a fait grimper les chiffres de l’absentéisme. Si pendant la première semaine de mars, 8 % des salariés se sont vu prescrire un arrêt maladie, ce chiffre est monté à 13 % pendant la seconde quinzaine, avant de retomber à 12 % jusqu’à la mi-mai environ, et de redescendre à son étiage de 8 % ensuite, indique le baromètre de l’absentéisme réalisé par Malakoff Humanis sur la base d’études auprès de salariés du secteur privé.

En avril, mois entièrement passé en confinement, le Covid-19 était à l’origine d’un quart des arrêts de travail, qu’il s’agisse de cas de contamination confirmés ou suspectés (14 %) ou de cas contacts (12 %). Dans le même temps, sur toute la période de mars à juin, les risques psychosociaux sont devenus plus fréquents que les troubles musculo-squelettiques, d’ordinaire deuxième motif invoqué dans les arrêts de travail.

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Après le confinement, les arrêts de travail ont diminué, mais les salariés étaient 60 % à dire qu’ils appréhendaient leur retour au travail : la perspective de devoir porter masques et/ou gants, la difficulté de respecter les gestes barrières et les règles de distanciation en entreprise, les éventuels changements d’organisation du travail et la nécessité de reprendre les transports en commun étaient autant de préoccupations. « On note que ce niveau d’inquiétude est plus important (67 %) chez ceux qui n’étaient pas encore retournés, à la date de l’enquête, sur leur lieu de travail que parmi ceux qui y étaient retournés (58 %), fait valoir Anne-Sophie Godon, directrice de l’innovation de Malakoff Humanis. Il est probable que, quand on a repris le travail, on se rende compte que c’est moins anxiogène que ce que l’on imaginait… »

« Un fort engagement des collaborateurs »

Néanmoins, cette inquiétude a poussé 11 % des salariés à reconnaître envisager de se faire prescrire un arrêt de travail pour ne pas avoir à retourner sur leur lieu de travail. Parmi les raisons citées : volonté de ne pas reprendre les transports, de ne pas reprendre le « rythme ordinaire » ou afin de ne pas se sentir angoissé à l’idée de sortir de chez soi.

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Julien Rémy, consultant au sein du groupe Willis Towers Watson, spécialisé dans les ressources humaines, confirme que l’absentéisme a fortement augmenté pendant le confinement, si l’on inclut les arrêts de travail dérogatoires pour garde d’enfants ou pour les personnes vulnérables : la hausse notée entre le 17 mars et le 30 avril s’élève même à 98 % par rapport à la période du 1er janvier au 16 mars, soit un quasi-doublement. Mais à partir du 1er mai, lorsque les arrêts de travail dérogatoires ont basculé en activité partielle, l’absentéisme est revenu à un niveau inférieur de 6 % à celui d’avant le confinement. « Les entreprises ont alors observé un fort engagement » des employés, note l’expert.

La situation est alors revenue progressivement à la normale, avec un niveau d’absentéisme durant l’été similaire à celui observé avant le confinement. « Même si beaucoup d’entreprises ont fait le choix de reprendre le travail comme avant l’épidémie, ce qui n’est pas très bien vécu par nombre de salariés », relève M. Rémy, qui met en garde contre « une mauvaise gestion de ce virage qui pourrait se traduire par de l’absentéisme supplémentaire ».