Archive dans 1970

A la Guadeloupe, 46 000 foyers privés d’électricité à la suite d’une grève des agents EDF

Le mouvement de grève lancé dimanche 15 septembre par des agents d’Electricité de France (EDF) à la Guadeloupe paralyse une partie de la production électrique de l’île. Mardi soir, 46 000 foyers étaient privés d’électricité. « Le système électrique est en déficit de production notamment en raison de l’indisponibilité de huit moteurs à la centrale de la Pointe Jarry », a fait savoir EDF Guadeloupe dans un communiqué.

Depuis deux jours, une grève oppose les agents d’EDF Production électrique insulaire (PEI) – qui produit près de 70 % de l’électricité de Guadeloupe grâce à une centrale diesel – à leur direction. En cause, « de persistantes situations non conformes au protocole de fin de conflit » signé en février 2023, après une grève de 61 jours, a rappelé le délégué syndical de la Fédération de l’énergie de la Confédération générale du travail de la Guadeloupe (FE-CGTG), Nathanael Verin, dans le préavis de grève envoyé en août.

Des négociations se tiennent actuellement sous la houlette de la direction du travail. Selon La 1ere, il est entre autres question du respect des dispositions relatives au temps de travail, de régularisations de salaires, du paiement des indemnités kilométriques et du libre fractionnement des congés annuels calculés en heures.

« Afin d’éviter l’incident généralisé, des délestages tournants par tranche de deux heures sont en cours », a annoncé EDF, qui appelle à « limiter sa consommation », précisant faire appel à « toutes les sources de production disponibles ».

La Guadeloupe, une zone non interconnectée, produit son électricité grâce à plusieurs sources : centrale thermique diesel (68,6 % de la production) mais aussi énergies renouvelables (biomasse, géothermie, éolien, photovoltaïque, hydraulique, etc.), dont la production ne suffit pas à équilibrer l’offre et la demande en électricité dans l’archipel.

Le Monde avec AFP

Réutiliser ce contenu

A l’hôpital, plus d’un tiers des postes de praticien sans titulaire

C’est l’un des marqueurs de la crise de l’hôpital : les praticiens hospitaliers continuent de manquer dans les services, année après année, avec de nombreux postes sans titulaire. Mais combien, exactement ? Alors que le Centre national de gestion (CNG), organisme ministériel chargé des concours et des carrières des praticiens, ne fait plus mention de ce recensement dans ses documents officiels depuis deux ans, le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi (SNPHAR-E) a, lui, obtenu et agrégé ces données, au 1er janvier 2024.

Selon ses calculs, 35 % des postes restent inoccupés par un médecin titulaire (temps plein et temps partiel réunis). Un chiffre qui s’est stabilisé par rapport à l’année précédente, après une dégradation continue sur les quinze dernières années. En 2008, ces postes vacants représentaient 20 % des postes ouverts dans les hôpitaux. Certaines spécialités sont plus fortement touchées par la désaffection, comme la psychiatrie, qui voit sa situation s’aggraver encore, avec 52 % de postes occupés en 2024, contre près de 75 % il y a dix ans.

« Le “choc d’attractivité” promis n’a pas eu lieu »

« La tendance reste extrêmement alarmante », soutient l’anesthésiste Anne Geffroy-Wernet, présidente du SNPHAR-E, tout en reconnaissant des limites à ce chiffrage. Les postes vacants sont en partie occupés par des praticiens contractuels. C’est l’argument avancé par le CNG pour refuser de publier les statistiques sur le sujet, alors qu’il ne dispose pas des données sur les contractuels. En juillet, dans son rapport annuel, il faisait état de 48 552 médecins hospitaliers en exercice au 1er janvier 2024, soit un nombre en augmentation de 13,5 % sur la dernière décennie. « Les contractuels sont nécessaires, mais en avoir trop, cela déstabilise les hôpitaux qui ont besoin d’équipes stables », souligne la docteure Geffroy-Wernet.

Autre limite : les postes vacants dépendent aussi des postes que les hôpitaux décident d’ouvrir, selon les stratégies d’établissements ou les difficultés budgétaires, explique-t-on au SNPHAR-E. « Mais on voit bien, quoi qu’il en soit, que le “choc d’attractivité” promis n’a pas eu lieu », soutient Anne Geffroy-Wernet. Son syndicat regrette, depuis des mois, que les négociations avec le gouvernement sur l’attractivité du métier n’avancent pas, alors que ni le plan du Ségur de la santé (2020) ni la réforme, plus technique, du statut de praticien hospitalier, appliquée depuis 2022, n’ont permis de renverser la tendance.

Le collectif Vignobles Gabriel & Co assure la défense de vignerons bordelais face aux puissants négociants

Jean-François Réaud, vigneron et président-fondateur du collectif Vignobles Gabriel & Co, à Saint-Aubin-de-Blaye (Gironde), le 3 mars 2021.

Ils ont choisi de se regrouper pour mieux se défendre. Avant même que la crise des ventes de vin ne frappe le Bordelais, ils avaient dressé leurs cuvées en ordre de bataille. Et, aujourd’hui, il y a comme un parfum de victoire, avec une douzaine de références sélectionnées pour les foires aux vins d’automne. Eux, ce sont les Vignobles Gabriel & Co, un nom qui réunit une trentaine de vignerons bordelais sur la rive droite de la Garonne. Grâce à cette structure atypique, ce collectif à la croisée du négoce, de la coopération et de la viticulture indépendante écoule environ 6 millions de bouteilles chaque année, à prix sages (7 euros en moyenne).

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Vins : la coopération, un bien commun

« Ce modèle hybride permet de mutualiser idées et moyens techniques, de valoriser l’identité de chaque vigneron, de bâtir une force commerciale, et aussi de favoriser un engagement éthique et environnemental », assure Jean-François Réaud, 63 ans, président et fondateur de cette entreprise. Le modèle est vertueux : les deux tiers des producteurs travaillent désormais en agriculture biologique et les bouteilles affichent toutes le logo Fair for Life, un label attribué par Ecocert, attestant de pratiques commercialement équitables.

Certes, Jean-François Réaud, lui-même vigneron propriétaire des Châteaux Le Grand Moulin, Les Aubiers et Haut Sociondo, dans l’appellation blaye-côtes-de-bordeaux, ne nie pas le contexte maussade du marché bordelais, soit une baisse de 7,1 % des ventes depuis un an dans le pays. Mais le créateur de Vignobles Gabriel & Co veut croire aux atouts de son projet, qui a grandi en marge de la « place de Bordeaux », le système de négoce qui régit la mise en marché de plus de 70 % des vins de la région.

L’histoire du collectif est d’abord la sienne. Quand, au début des années 1980, il récupère la ferme familiale du Grand Moulin, dans le nord de la Gironde, avec ses 7 hectares de vignes subsistantes, il veut s’affranchir du système consensuel du négoce girondin. « Je trouvais que ce modèle nous privait du ressenti du consommateur », justifie Jean-François Réaud. Mais le jeune vigneron a beau s’échiner à faire connaître lui-même ses vins, ses ventes patinent. « La banque menaçait de me lâcher, il me fallait trouver un marché de gros volume. »

Du bricolage à la maîtrise

Plutôt que de vendre en vrac au négoce, il tente alors de pénétrer la grande distribution : « Un acheteur de chez Carrefour, qui aimait bien mon vin, m’a fait comprendre que si je voulais contourner la “place de Bordeaux”, il fallait que je devienne moi-même négociant pour sécuriser une qualité et un volume constants. »

Il vous reste 57.94% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Patronat et syndicats relancent les discussions, après des mois de tensions

Lors du débat entre la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, et le président du Medef, Patrick Martin, à la fête de « L’Humanité », à Brétigny-sur-Orge (Essonne), le 14 septembre 2024.

Les prises de contact s’enchaînent pour retisser des liens qui s’étaient distendus. Depuis la rentrée scolaire, le patronat et les syndicats ont eu plusieurs entretiens apaisés, dans le souci manifeste de se montrer constructifs. Après les tensions engendrées par l’échec, en avril, de la négociation sur l’emploi des seniors, les deux camps semblent, à nouveau, désireux de se parler en composant avec leurs antagonismes.

L’une de leurs principales préoccupations est d’apporter la preuve qu’ils sont des acteurs responsables, aptes au compromis – à la différence, selon eux, des formations politiques, plus promptes à s’entredéchirer qu’à rechercher l’intérêt général. Autant d’initiatives enclenchées au moment où des collaborateurs du premier ministre, Michel Barnier, reçoivent, à partir de lundi 16 septembre et à tour de rôle, les organisations de salariés et d’employeurs.

La relance des discussions entre les partenaires sociaux vient de s’illustrer dans une scène très inhabituelle : la participation du Medef à la Fête de L’Humanité, qui s’est tenue, de vendredi 13 à dimanche 15 septembre, à Brétigny-sur-Orge (Essonne). Samedi après-midi, Patrick Martin, le numéro un du mouvement patronal, a débattu, pendant presque une heure trois quarts, avec Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT. La confrontation s’est déroulée sous un chapiteau plein à craquer, avec une assistance ultramajoritairement acquise à la syndicaliste et, la plupart du temps, respectueuse à l’égard du président du Medef, abstraction faite de quelques courtes huées.

« Dialogue franc »

Si M. Martin s’est jeté dans la gueule du loup, c’est au nom de la « conviction profonde » que les représentants des travailleurs et des chefs d’entreprise doivent parlementer, « en assumant leurs désaccords », mais sans se livrer au « jeu dangereux de l’anathème, de l’insulte et de la fracturation », a-t-il dit peu après la fin de la joute. Mme Binet, elle, a remercié son contradicteur d’accepter un moment de « dialogue franc ». « J’ai bien entendu votre appel à la réouverture de la négociation », a-t-elle ajouté, faisant allusion au souhait de M. Martin, exprimé le 26 août, de reprendre les tractations sur l’emploi des seniors qui avaient capoté en avril. Et d’observer : « Je pense que votre présence ici s’inscrit dans ce cadre-là. »

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Emploi des seniors : le Medef propose une reprise des négociations

D’humeur moqueuse, la cheffe de la CGT a proposé au leader patronal d’engager immédiatement les pourparlers, à la Fête de L’Huma : « J’ai un stylo, donc c’est bon. J’espère que vous avez le chéquier et tout va bien se passer », a-t-elle lancé devant un auditoire hilare. Un zeste d’humour pour égayer des échanges que les deux protagonistes avaient visiblement préparés avec beaucoup de sérieux, au vu de la précision de leurs argumentaires respectifs.

Il vous reste 45.75% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Face à la grève de ses salariés, Boeing annonce réduire ses dépenses et envisage du chômage technique

Des salariés de Boeing en grève brandissent des pancartes, le 15 septembre 2024, près de l’usine d’Everett (Washington).

Le constructeur aéronautique américain Boeing, touché depuis le 13 septembre par une grève paralysant notamment la production du 737 MAX et du 777, a annoncé, lundi 16 septembre, réduire ses dépenses.

Selon son directeur financier, Brian West, l’avionneur a décidé de geler tous les recrutements ; il se prépare à réduire « de manière importante » les dépenses d’approvisionnement et il envisage de mettre en place « dans les prochaines semaines » des mesures temporaires de chômage technique.

« Nous travaillons de bonne foi pour parvenir à un nouvel accord de convention collective qui tienne compte des réactions et qui permette à l’activité de reprendre », a rapporté M. West dans un message aux employés. « Cependant, notre groupe traverse une période difficile, a-t-il poursuivi. [Le débrayage] menace notre reprise d’une manière importante. » La direction a pris des « mesures nécessaires pour préserver les liquidités et protéger notre avenir commun », a-t-il déclaré, et pour assurer le financement de la « sécurité, de la qualité et de l’assistance directe aux clients ».

Une « étape difficile »

Boeing a ainsi gelé tous les recrutements et les hausses salariales liées à des promotions, suspendu tous les voyages « non essentiels », supprimé les voyages en première classe et en classe affaires y compris pour les membres de sa direction.

L’avionneur a également mis sur pause toutes les dépenses de conseil, caritatives, publicitaires et marketing, parmi les nombreuses actions déjà entreprises. Par ailleurs, le groupe devrait ne plus passer de commandes liées aux programmes du 737, du 777 et du 767 qui sont fabriqués dans les usines de Renton et d’Everett, dans la région de Seattle (Etat de Washington), dont la production est à l’arrêt depuis vendredi.

M. West a ajouté que le groupe envisageait une « étape difficile » : la mise en place « dans les prochaines semaines » de mesures temporaires de chômage technique pour de nombreux salariés, responsables et dirigeants. Les négociations entre Boeing et l’antenne locale du Syndicat international des machinistes et des ouvriers de l’aérospatial (IAM) doivent reprendre mardi, sous l’égide d’une médiation fédérale.

Multitude de problèmes de qualité

Les plus de 33 000 adhérents représentés par l’IAM-District 751 (sur quelque 170 000 employés du groupe) ont rejeté, jeudi, le projet de convention collective annoncé le 8 septembre à 94,6 % et approuvé un débrayage à 96 %.

Leur mouvement de grève a entraîné la fermeture de deux grandes usines d’assemblage dans la région de Puget Sound, paralysant la production du 737, du 777 et du 767 cargo, dont les livraisons cumulent déjà les retards. Une situation d’autant plus problématique pour l’avionneur qu’il encaisse la plus grosse partie du paiement (environ 60 %) à la remise des avions.

Le Monde Guides d’achat

Gourdes réutilisables

Les meilleures gourdes pour remplacer les bouteilles jetables

Lire

Boeing traverse une situation financière précaire depuis le crash de deux 737 MAX 8 en 2018 et en 2019, ayant coûté la vie à 346 personnes, et une multitude de problèmes de qualité de la production. Les mécontents jugent toutefois la hausse salariale trop éloignée des demandes du syndicat (+ 40 % initialement) et le volet sur les retraites, insatisfaisant.

Boeing fait l’objet d’une supervision accrue depuis un incident en vol au début de janvier sur un 737 MAX 9 d’Alaska Airlines. Survenu après une série de problèmes de conformité et de contrôle qualité, il a ravivé les questions soulevées sur ces mêmes lacunes après les deux crashs.

La dernière grève chez l’avionneur américain remonte à 2008 et avait duré cinquante-sept jours. Selon la société d’analyse financière TD Cowen, une grève de cinquante jours priverait Boeing de 3 à 3,5 milliards de dollars de liquidités et aurait un impact de 5,5 milliards sur le chiffre d’affaires.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Faut-il avoir peur de voler dans un avion Boeing ?

Le Monde avec AFP

Réutiliser ce contenu

« Le travail ne serait pour les jeunes plus qu’une pièce du puzzle de leur vie » : le grand malentendu des générations au travail

Depuis plusieurs années, ils concentrent toutes les critiques : à écouter leurs chefs, ils seraient « infidèles », « individualistes », « rétifs à l’autorité », « obsédés par l’équilibre entre leur vie personnelle et leur vie professionnelle », « trop souvent prompts à démissionner ». « Ils », les jeunes de la génération Z, nés dans les années 1990, arrivent sur un marché de l’emploi qui leur est désormais favorable et mettent en difficulté les ressources humaines des entreprises. Combien de colloques, d’études scientifiques, de rapports, d’articles de presse (dont celui-ci) ou de livres portent sur le sujet brûlant des jeunes au travail ?

La dernière enquête menée par l’institut de sondage Ipsos, pour le compte du CESI, une école d’ingénieurs, intitulée « Quel rapport la gen Z entretient-elle avec l’entreprise ? », insiste sur le hiatus entre les attentes des uns et des autres. Brice Teinturier, le directeur général d’Ipsos, parle carrément d’un « malentendu » entre les chefs d’entreprise et les jeunes âgés de 18 à 28 ans. Les chiffres en disent long : « Quatre-vingt-six pour cent des chefs d’entreprise estiment que la génération Z est vraiment différente de la génération d’avant, 70 % qu’il est difficile d’identifier leurs aspirations professionnelles, et pour 49 % d’entre eux qu’il est difficile de les faire évoluer dans le monde de l’entreprise. » Mieux, ou pis, un tiers des patrons interrogés pensent que l’arrivée de ces jeunes salariés « dégrade » l’organisation du travail.

Ce malentendu est d’autant plus prégnant que, en raison de la démographie et de l’allongement de la durée du travail, jusqu’à quatre générations peuvent aujourd’hui cohabiter dans le milieu professionnel. Avec des attentes sensiblement différentes vis-à-vis du travail, estime Yann Orpin, à la tête du groupe Cleaning Bio, PME spécialisée dans le nettoyage industriel, et président du Medef dans la métropole lilloise : « Les anciens sont très attachés à la notion d’horaires, alors que les plus jeunes sont clairement demandeurs de plus de flexibilité, de télétravail, d’horaires aménagés, etc. »

« Une pièce du puzzle de leur vie »

La frontière entre la vie privée et la vie professionnelle serait aussi plus poreuse pour les jeunes : « Ils parlent assez facilement de leur vie privée ou de leurs obligations familiales au boulot… » Mais, surtout, a-t-il l’impression, le travail ne serait « pour les jeunes générations plus qu’une pièce du puzzle de leur vie, là où il reste central dans celle de leurs aînés ». Face à cette évolution perçue, les entreprises doivent « apprendre à avoir plus de souplesse dans la façon de gérer les équipes, à être pragmatiques et intelligentes pour ne pas passer à côté de talents, mais sans transiger non plus sur leur stratégie et leur cap », veut croire Yann Orpin. Une nouvelle enquête du cabinet de conseil Deloitte publiée ce mardi 17 septembre le dit en d’autres mots : « Le travail reste [pour les jeunes] un pilier essentiel en termes d’identité, mais seulement après les amis et la famille. »

Il vous reste 72.74% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Dans le Loir-et-Cher, une usine d’injecteurs diesel lutte pour son avenir

Une quinzaine de pick-up flambant neufs sont alignés sur le parking de l’usine. « Ce sont de nouveaux modèles pour lesquels on mesure les émissions de C02. Leur constructeur, coréen, est un client fidèle », dit Marc Landier, l’actuel directeur des lieux. A l’intérieur de son usine, une armée de bras mécaniques fore le métal dans des cabines transparentes. Quelques techniciens déambulent. « On ne manque pas d’ingénieurs, mais on manque d’ouvriers spécialisés dans l’usinage de précision », précise le responsable.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Automobile : le déclassement du diesel

Fondée en 1959 pour répondre aux besoins accrus de petits moteurs diesel pour les engins agricoles, l’usine Phinia à Blois produit aujourd’hui des injecteurs diesel pour les principaux constructeurs automobiles mondiaux. « Mais attention, on est aujourd’hui dans quelque chose de sophistiqué, qui calcule la quantité de carburant nécessaire à la microgoutte près. Au final, cela permet d’émettre moins de C02 qu’un moteur hybride essence », explique Marc Landier.

Depuis le « dieselgate », le scandale du truquage des émissions polluantes impliquant Volkswagen, puis l’annonce d’une fin de la production de véhicules thermiques en Europe pour 2035, les commandes baissent. L’usine est ainsi passée de 1 300 salariés à moins de 900 en cinq ans. Mais le site demeure le premier employeur privé du Loir-et-Cher. Il tente de s’ouvrir à l’aéronautique et au sport automobile, grâce à de nouvelles certifications et des commandes en série limitée. Pour assurer son avenir, Phinia n’espère cependant pas un retour en grâce du diesel. Il s’est lancé dans un pari industriel : l’hydrogène combustible.

Un système dit « de rétrofit »

En trois ans, la deuxième partie de l’usine s’est transformée en centre de recherche et développement sur l’injecteur à hydrogène basse pression. Elle regroupe 400 de ses 900 salariés. Avec d’autres équipementiers français, Phinia a mis au point un système dit « de rétrofit », soit de conversion d’un moteur thermique classique en moteur à combustion hydrogène, aux émissions carbone nulles. Cela suppose notamment de changer de réservoir et d’injecteur. Deux fourgons ont ainsi déjà été adaptés et même une vieille Jeep Cheerokee de 1976 pour séduire le marché américain, « qui n’a pas du tout renoncé à la combustion interne », selon Jean-Luc Béduneau, le responsable de l’innovation.

Lui pense que l’Inde sera le premier pays à se tourner massivement vers cette solution. « Ils connaissent déjà bien l’usage du gaz comme carburant et disposeront d’un parc de 17 500 stations de gaz naturel comprimé en 2030. Ils souhaitent aussi garder une certaine indépendance que ne leur offrira pas le basculement vers le tout-électrique. »  L’approvisionnement en batteries de véhicules électriques dépend en effet massivement de grands groupes asiatiques, et singulièrement chinois. M. Béduneau guette des signes positifs de Bruxelles : « Si l’Europe s’engage prochainement dans cette voie, on sera prêt. »

Le secteur industriel alerte le gouvernement sur le brouillard stratégique et politique actuel

Mardi 10 septembre, Emmanuel Macron a inauguré la nouvelle usine du groupe pharmaceutique français Sanofi, à Neuville-sur-Saône, en région lyonnaise. Entièrement « modulable », celle-ci est capable de fabriquer plusieurs vaccins en même temps. L’occasion pour le chef de l’Etat de rappeler l’importance de l’« attractivité industrielle française », qui « sert notre besoin de souveraineté ». Quelques jours auparavant, la centrale EPR de Flamanville, dans la Manche, a enfin démarré son activité, avec douze années de retard pour ce chantier nucléaire. Dans le même temps, le laboratoire Servier a renoncé – pour le moment – à la vente de sa filiale Biogaran, le leader des médicaments génériques en France.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Pour les patrons, une rentrée sous le signe de l’inquiétude

Ces différentes nouvelles sont-elles le signe d’un regain de dynamisme pour l’industrie française ? Pas si sûr. Malgré les annonces, les difficultés semblent, au contraire, s’accumuler depuis plusieurs mois, mettant en péril le début de réindustrialisation enclenché en 2021 dans la foulée de la crise due au Covid-19. Pour la première fois en trois ans, le solde de créations d’usines sur le territoire est redevenu négatif depuis le mois d’avril, et les emplois industriels ont chuté en juin et juillet. En un an, la production industrielle manufacturière a reculé de 3 %, affaiblie entre autres par les mauvais résultats dans l’automobile et dans la construction, selon une note de l’Insee publiée le 6 septembre. Le nombre de défaillances d’entreprises atteint des records, la demande de biens d’équipement plonge, les capacités d’investissement sont réduites par le niveau des taux d’intérêt, et le coût de l’énergie a dégradé de nombreux secteurs.

La crise gouvernementale de cet été ne fait qu’ajouter à la confusion. Au point que de nombreuses filières industrielles alertent le nouveau premier ministre, Michel Barnier, sur l’urgence de la situation. Toutes mettent la pression sur le futur gouvernement et appellent à la poursuite des aides publiques et à une plus grande visibilité sur la politique industrielle de la France, au moment où l’ancien gouverneur de la BCE, Mario Draghi, exhorte, dans un rapport l’Union européenne, à investir massivement pour ne pas décrocher par rapport aux Etats-Unis et à l’Asie. Le nouveau chef du gouvernement français a certes mis en avant la « réindustrialisation des territoires » dès sa prise de fonctions, mais M. Barnier a d’ores et déjà annoncé qu’il n’y aura « pas de miracle » et que la « première des priorités » de son gouvernement sera de réduire le déficit public.

Il vous reste 64.49% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

La nouvelle manufacture Hermès en Auvergne, symbole des investissements français de la marque

La manufacture Hermès de Riom (Puy-de-Dôme), le 22 août 2024.

Hermès étend son réseau d’ateliers. « C’est notre vingt-troisième maroquinerie en France », s’est félicité Axel Dumas, gérant de la marque de luxe, vendredi 13 septembre, en marge de l’inauguration du bâtiment rénové à grands frais, à Riom (Puy-de-Dôme). Dans le centre-ville de la sous-préfecture, la marque de luxe, qui fabrique ses articles en cuir exclusivement en France, occupe, depuis le début de l’année, deux anciens bâtiments de la manufacture des tabacs qu’exploitait la Seita jusqu’en 1975, date du déménagement de ce site de production des cigarettes Gauloises et Gitanes en périphérie de la ville, avant la fermeture définitive, en 2018, par Imperial Tobacco.

Ce que les Riomois appelaient la « manu » était un « vaisseau fantôme », se souvient le maire de la ville, Pierre Pécoul. Quatre ans de chantier ont été nécessaires pour transformer cette friche industrielle, située dans le cœur de Riom, agglomération de 19 000 habitants située à une quinzaine de kilomètres au nord de Clermont-Ferrand. En 2019, Hermès avait sollicité l’agence Auvergne-Rhône-Alpes Entreprises, chargée du développement économique de la région, pour l’aider à trouver un site de production, à proximité de la ville voisine de Sayat, où la marque exploite une maroquinerie depuis vingt ans.

Très vite, Hermès exprime sa volonté de choisir un site existant pour entreprendre une réhabilitation. « A la première visite de la manufacture des tabacs de Riom, les responsables de l’immobilier du groupe ont eu un coup de cœur », se souviennent Sonia François et Vania de Oliveira, de l’agence publique. Inscrit au titre des monuments historiques, le site, propriété d’un promoteur qui, un temps, y avait projeté un hôtel, est racheté par la communauté d’agglomération Riom Limagne et volcans. Avant d’être cédé pour le « même montant » à Hermès, explique le président de la collectivité auvergnate, Frédéric Bonnichon.

Une nouvelle maroquinerie par an

Depuis, la marque de luxe a dépensé environ 25 millions d’euros d’investissement, d’après nos informations, sans aides publiques, pour transformer le bâtiment des années 1930 en atelier de production avec l’aide de l’agence Tracks ; il abritera aussi un centre de formation d’apprentis (CFA) analogue à la dizaine de CFA qu’il a créés en France depuis 2022, pour former 1 600 personnes au CAP de sellier-maroquinier. Dans ce bâtiment de 7 000 mètres carrés, baigné de lumière, près de 280 personnes devraient travailler – à moyen terme – pour fabriquer entièrement à la main des sacs Constance, Bolide et autres Birkin.

Il vous reste 49.39% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Au Japon, travailler vieux, une habitude ancrée

Une femme âgée est assise dans son magasin de fruits à Tokyo, au Japon, le 18 septembre 2023.

Le restaurant Hopu-Ken sert des ramens depuis 1960. Face au stade des Jeux olympiques de 2021, au cœur de Tokyo, la devanture jaune du restaurant est toujours ouverte en grand. On y avale son bol debout. Le soir venu, c’est un repaire de chauffeurs de taxi. Ils s’y retrouvent pour s’accorder une pause rapide pendant leur journée, qui dépasse souvent les vingt heures de travail d’affilée.

Beaucoup sont âgés et occupent cet emploi par obligation, faute de revenus suffisants pour vivre leur retraite. « Mon premier emploi était commercial. Faire du porte-à-porte, ce n’était pas pour moi. J’ai arrêté et je suis devenu taxi », explique l’un d’eux, grand et massif, désirant conserver l’anonymat. A plus de 65 ans, il ignore jusqu’à quand il pourra conduire. Un mal de dos récurrent pourrait l’obliger à arrêter plus tôt qu’il ne le souhaite.

Travailler longtemps après l’âge de la retraite n’a rien d’exceptionnel dans un Japon dont la population active décline en raison du vieillissement. Un tiers de la population a plus de 65 ans. Selon les statistiques officielles, 10,1 % des Japonais ont même plus de 80 ans, ce qui représente 12,6 millions de personnes sur cet archipel de 125,1 millions d’habitants. Face à la grave pénurie de main-d’œuvre frappant les entreprises, le gouvernement enchaîne les assouplissements de textes pour autoriser à exercer de plus en plus tard. Depuis septembre 2023, les conducteurs de taxi peuvent ainsi travailler jusqu’à 80 ans.

Contrats très flexibles

Officiellement, il est certes possible de prendre sa retraite dès 60 ans. Mais la pension est souvent trop faible pour vivre. Il en est ainsi pour une septuagénaire qui enchaîne des missions de plonge ou de ménage dans des restaurants le temps d’une journée, voire de quelques heures, pour gagner péniblement 100  000 yens (642 euros) par mois. « Je ne peux pas me satisfaire de recevoir uniquement des aides sociales », confie cette dame aux cheveux grisonnants, qui a toujours vécu d’emplois précaires et se dit prête à travailler « encore dix ans ». Elle habite seule avec son chat, joue au tennis de table et cultive des cactus.

Beaucoup de personnes âgées privilégient des postes proches de chez elles, notamment dans des supérettes qui proposent des contrats très flexibles, parfois juste deux heures par jour une fois par semaine. A 60 ans, Kunio Anzai a été mis à la retraite par son employeur, dans le domaine des transports. Puis, comme le permet la loi, il a été réembauché dans la même entreprise, mais en contrat à durée déterminée et à temps partiel. Dans ce cadre, il peut aller jusqu’à 67 ans. « Aujourd’hui, je travaille trois jours par semaine, de 6 heures à 11 heures du matin ». Il enchaîne sur un poste dans une supérette. L’activité ne lui déplaît pas, car « il y a beaucoup d’échanges et de rencontres ».

Il vous reste 14.21% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.