Coronavirus : l’angoisse et les attentes des équipementiers automobiles français

Coronavirus : l’angoisse et les attentes des équipementiers automobiles français

A l’usine Renault de Flins (Yvelines), le 6 mai.
A l’usine Renault de Flins (Yvelines), le 6 mai. Gonzalo Fuentes / REUTERS

Il se présente parfois comme « la Jeanne Calment du décolletage ». Roger Pernat, 75 ans dont cinquante ans de mécanique de précision dans la vallée de l’Arve, entre Genève et Chamonix, en a vu passer des crises, du choc pétrolier de 1973 à l’effondrement financier de 2008-2009. Mais celle-là, le président du groupe Pernat – 90 millions d’euros de chiffre d’affaires, 500 employés – lui aura fait baisser la tête comme à un boxeur qui aurait pris un coup sévère à l’estomac. « Cela ne fait que commencer, commente-t-il. On peut s’attendre à des effets de trésorerie mortels pour les entreprises qui ne sont pas bordées de cash. Il y aura de la casse. »

La casse, c’est-à-dire la cessation de paiement, le tribunal de commerce, la liquidation, le chômage… La casse, elle a déjà commencé, avec la mise en redressement judiciaire, le 11 mai, de Novares, spécialiste des pièces plastiques, 12 000 salariés, un chiffre d’affaires de 1,4 milliard d’euros, brûlant 4 millions d’euros par jour, incapable d’honorer ses factures et qui, désormais, attend son repreneur pour la fin mai.

Ils sont ainsi des dizaines de patrons de la filière amont de l’automobile française, dirigeants de petites, moyennes et parfois assez grandes entreprises, à mal dormir la nuit. Au moins 120 sociétés, représentant 72 000 emplois si on s’en tient aux seuls adhérents de la Fédération des industries des équipements pour véhicules (FIEV), qui fédère les équipementiers.

« La chute de notre chiffre d’affaires est vertigineuse en avril »

Au-delà des mastodontes que sont Faurecia, Valeo ou Plastic Omnium, se cachent de belles réussites industrielles françaises méconnues : Lisi Automotive (fixation mécanique), ARaymond (solutions d’assemblage), Le Bélier (pièces d’aluminium), Punch (boîtes de vitesses), GMD (pièces métalliques et plastiques), des plasturgistes comme Plastivaloire, ou Akwel, qui se propose de reprendre Novares. Ces sociétés oscillent entre 0,5 et 1,5 milliard d’euros de ventes. Elles ont créé des milliers d’emplois. Elles se sont développées hors de France. Et, aujourd’hui, elles souffrent.

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« La chute de notre chiffre d’affaires est vertigineuse en avril, constate François Liotard, directeur général de Lisi Automotive, avec − 80 % ou 90 % dans certains sites français. C’est irréel. Ce sont des magnitudes qui n’ont pas de précédent. Quant à la reprise de mai, elle reste faible, avec 40 % des volumes habituels. » « Jusqu’ici, ces entreprises vivaient avec les factures de janvierfévrier et sans besoin de fonds de roulement, puisque l’activité était à l’arrêt et que le chômage partiel avait pris le relais, explique Marc Mortureux, directeur général de la Plateforme automobile (PFA), l’entité publique qui coordonne les entreprises du secteur. Mais, en juin, nous entrons dans une période très dangereuse. L’absence des factures de mars et avril va se faire sentir au moment où il faut de l’argent pour le redémarrage. Beaucoup de sociétés vont être étranglées. »

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LJD

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