Les épreuves de spécialité de terminale doivent se tenir du 20 au 22 mars. Pour la première fois, elles se déroulent aux dates prévues. Ces épreuves, qui ont traversé bien des péripéties, continuent de susciter des critiques.
Natixis, filiale du groupe Banque populaire Caisse d’épargne (BPCE), investit quelques centaines de milliers d’euros dans la réalité virtuelle pour dispenser de la formation immersive (immersive learning, en anglais). La société est par ailleurs fondatrice – avec la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM), Orange ou encore l’université Paris-Est-Créteil-Val-de-Marne (UPEC) – de l’association France Immersive Learning, créée en 2018 et consacrée aux technologies immersives dans les domaines de l’orientation, de l’éducation et de la formation. Quelque 150 organisations en sont membres.
Le groupe BPCE est ainsi aiguillonné par sa filiale. « Depuis mi-2022, 5 000 collaborateurs du groupe BPCE ont notamment suivi une formation obligatoire des consignes de sécurité s’appliquant dans leurs nouveaux locaux. Cette opération a permis une première expérimentation à grande échelle de la réalité virtuelle par les collaborateurs. D’autres formations sont également à l’étude grâce à la création d’un “Lab VR” dédié », explique Pascal Aubert, responsable de l’apprentissage numérique chez Natixis.
« Des équipements majoritairement européens et français »
Si cette formation virtuelle concerne d’abord la sécurité incendie et les règles sanitaires pour un usage professionnel, le groupe bancaire étudie par ailleurs toutes les possibilités offertes par ces technologies d’immersion. « Notre groupe a réalisé l’acquisition de matériel, de licences et s’est doté d’un budget pour la réalisation de projets. Les équipements et services sont majoritairement européens et français », indique-t-il.
France Immersive Learning fournit l’application Case et le matériel d’encadrement (retour écran pour l’animateur de huit casques en simultané) ; la société française Emissive réalise les principaux projets sur mesure ; le britannique Mocap Studio enregistre les captations de personnages (des comédiens jouent le rôle des avatars ensuite rendus en 3D dans la VR) ; le finlandais Glue et l’irlandais Engage apportent des solutions de métavers complémentaires. Quant aux casques, ils proviennent du taïwanais HTC « en attendant la disponibilité de ceux du français Lynx ».
Charles de Laubier
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L’avenir indécis d’Orange Bank, foyer de pertes récurrentes, préoccupe Christel Heydemann, la directrice générale d’Orange, depuis sa prise de fonctions en avril 2022. Mais ce n’est rien à côté d’Orange Business, dont le bénéfice opérationnel s’est effondré de 35 % en trois ans. Avec ses 7,9 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022, cette division dédiée aux entreprises pèse 60 fois plus lourd que la banque.
D’où l’urgence de l’opérateur à enrayer le dérapage de ces activités. Orange Business nécessite un « plan intense de restructuration », a prévenu Christel Heydemann lors de la présentation, le 16 février, de sa stratégie à l’horizon 2025. Après plusieurs mois de travaux préparatoires, ce plan est sur le point d’être lancé. La direction d’Orange doit annoncer des suppressions d’emplois, mercredi 22 mars, lors d’un comité social et économique.
Un peu moins de 700 postes sont concernés, sur les 5 700 que compte SCE, l’entité d’Orange Business concernée par ce plan, comme l’a indiqué La Lettre A le 16 février. Les activités logées chez Orange Business SA (cloud, gestion des données) et chez Orange Cyberdefense (cybersécurité), en croissance, ne sont pas concernées par ces suppressions d’emplois. L’objectif affiché est de mettre un terme à l’hémorragie du bénéfice opérationnel en 2025, ce qui laisse encore deux années de baisse à l’horizon.
Recherche d’accord sur une rupture conventionnelle collective
Le sujet est sensible. Il s’agirait du premier plan de départs volontaires lancé par le groupe depuis la crise des suicides de 2009. Ces dix dernières années, Orange a réduit ses effectifs en France, mais toujours par le biais des départs naturels, notamment en incitant ses salariés les plus âgés à anticiper leur départ en retraite via un temps partiel senior (TPS). Depuis sa création en 2010, 42 000 salariés d’Orange ont profité de ce dispositif, dont 7 600 rien qu’en 2022 pour la dernière année du TPS.
Pour ces quelque 700 postes, Orange Business espère pouvoir mettre en place une rupture conventionnelle collective, mais cela nécessite d’obtenir un accord majoritaire avec les organisations syndicales. En cas d’échec, l’opérateur devrait alors passer par un plan de départs volontaires. « Orange Business souhaite s’appuyer sur le dialogue social de qualité qui caractérise le groupe, indique Orange. De fait, il réserve aux partenaires sociaux et aux collaborateurs le détail des modalités qui seraient proposées. »
Pour la direction, ces mouvements de personnels sont indispensables pour faire de la division B to B une vraie entreprise de services du numérique, tirée par la cybersécurité et le cloud. Il s’agit de compenser la chute des activités historiques, laminées par le Covid-19. Avant la pandémie, Orange Business installait des serveurs téléphoniques dans les entreprises et des postes fixes sur le bureau de leurs employés. Mais depuis 2020, les applications de visioconférence (Zoom, Microsoft Teams, Google Meet…) et le télétravail ont ringardisé le téléphone fixe. En trois ans, les activités de télécoms fixes d’Orange Business ont vu s’envoler 500 millions d’euros de chiffre d’affaires.
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Si les poubelles s’accumulent dans Paris, la lutte contre les ordures s’organise dans le principal quartier d’affaires de sa périphérie. Depuis 2018, un collectif d’une vingtaine d’entreprises de la Défense (Hauts-de-Seine) a décidé de prendre à bras-le-corps le problème des déchets générés par ses restaurants d’entreprise. « A l’échelle du quartier, on a estimé le gaspillage de nourriture encore consommable entre six à neuf tonnes par jour », explique Martine Baruch, présidente de l’association La Défense des aliments et responsable RSE chez Allianz France, une des entreprises à l’origine du projet.
Pour sensibiliser les collaborateurs, des « gâchimètres à pain » ont été installés dans plusieurs entreprises participantes, comme Suez. « On met tout le pain non consommé dans un bocal et on l’expose à l’entrée du self », explique Martine Baruch. Avec un certain succès, puisque le volume de pain gaspillé a diminué d’une année sur l’autre, a constaté Suez.
108 grammes par jour et par personne
En moyenne, l’association International Food Waste Coalition estime à 108 grammes par jour et par convive le gaspillage alimentaire en restauration d’entreprise en 2022. Des chiffres qui « évoluent plutôt à la baisse, du fait des changements des habitudes des consommateurs et de la crise du Covid, qui a simplifié l’offre », explique Thomas Candeal, Project Manager au sein de l’association.
Pour éviter que salades ou gratins délaissés partent à la poubelle, la loi sur l’agriculture et l’alimentation (EGalim) de 2018 est venue mettre son grain de sel. Les opérateurs doivent désormais mettre en œuvre un diagnostic obligatoire pour estimer les quantités de denrées gaspillées et leur coût ; en outre, ceux qui préparent plus de trois mille repas par jour doivent mettre en place des partenariats avec des associations pour écouler leurs invendus encore consommables.
Dans la grande famille de la restauration collective, les prestataires s’activent pour réduire la taille des poubelles. Compass Group France met en vente des paniers de nourriture encore consommable à prix cassés sur l’application Too Good To Go. La société fait également don de son surplus de denrées à des associations, qui redistribuent à des personnes en difficulté.
Pour le reste des déchets alimentaires, le prestataire fait appel à des entreprises spécialisées qui se servent du reste des assiettes pour faire du compost. Côté plastique, des fontaines à eau dans les restaurants visent à remplacer les bouteilles d’eau.
Systèmes de réservation
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Dans les bureaux d’Euronews, à Lyon, en novembre 2018. JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP
Journalistes et techniciens de la chaîne Euronews se sont mis en grève dans la soirée de jeudi 16 mars, en réaction à la mise en œuvre du plan massif de licenciements annoncé par la direction, au cours d’un conseil social et économique extraordinaire.
Votée « très majoritairement » en assemblée générale, selon les syndicats, la grève est prévue jusqu’à lundi 20 mars, possiblement reconductible. Pour les salariés en grève, le plan ne relève pas d’une restructuration, comme le prétend la direction, mais d’un « démantèlement, qui remet en cause la vocation essentielle de la chaîne européenne ». « Avec ce plan qui supprime des pans entiers de notre activité, la ligne éditoriale d’Euronews est complètement remise en cause, la marque de la chaîne est désormais détournée. L’information internationale n’est plus du tout la priorité du projet qui nous est imposé », déclare Marie Jamet, déléguée du Syndicat national des journalistes.
Neuf mois après son rachat par le fonds d’investissement portugais Alpac Capital, la chaîne Euronews, située à Lyon, fait l’objet d’un plan de sauvegarde de l’emploi, qui prévoit 197 licenciements, sur un effectif de 349 salariés permanents, selon le dernier comptage des syndicats. Ce plan supprime les deux tiers de la rédaction. Seules les équipes française et russe resteraient finalement à Lyon, siège de la chaîne depuis sa création, en 1993.
Une perte de 20 millions d’euros en 2022
L’immeuble à l’architecture futuriste, situé sur les bords de Saône, est mis en vente depuis le début de l’année. En 2022, Euronews a affiché une perte de l’ordre de 20 millions d’euros. Le plan de licenciement a pour but de « sauvegarder » la chaîne, afin qu’elle reste un « véritable média européen », a justifié Guillaume Dubois, directeur général, en annonçant le plan devant les salariés, jeudi 2 mars.
Les effectifs restants seraient redéployés à Bruxelles et répartis dans différentes capitales. « Parmi les journalistes licencié.e.s, se trouvent des consœurs et confrères russes et turcs qui ne peuvent pas rentrer dans leurs pays sous peine d’être emprisonné.e.s », souligne le communiqué de l’intersyndicale. Les syndicats dénoncent l’abandon de tournages et de productions de magazines, transférés à des sous-traitants.
Syndicats et grévistes en appellent désormais aux plus hautes instances européennes, et à chaque dirigeant des Etats membres, pour alerter sur la situation sociale d’Euronews, et la signification politique de cette brutale restructuration.
« Service public essentiel »
« Au moment où la chaîne devait fêter ses trente années d’existence, au moment où l’histoire nous invite à la relance de l’Union européenne face aux crises et à la guerre, la chaîne Euronews est démembrée. Chaque dirigeant politique doit prendre position et nous dire s’il faut nous abandonner, et en finir avec la seule chaîne d’information internationale d’échelle européenne. S’ils ne veulent plus de ce service public essentiel, nous partirons au chômage, mais qu’ils assument devant l’histoire », confie au Monde Alexis Caraco, délégué de la CGT.
La direction affirme que la vocation de la chaîne s’inscrit dans un suivi de « l’actualité des institutions européennes ». Les journalistes d’Euronews craignent que la chaîne européenne ne perde sa vocation informative, au profit « d’une chambre d’écho des lobbyistes, à destination des 10 000 technocrates des structures de Bruxelles », selon Alexis Caraco.
Les salariés en grève en appellent particulièrement au président de la République, Emmanuel Macron. « Ne laissez pas un fonds d’investissement nous détourner de notre mission de service public, ne le laissez pas licencier 200 personnes en France, au nom d’un projet incertain », insiste le communiqué de l’intersyndicale de la chaîne.
Les sondages concernant la perspective d’un allongement de la durée de vie au travail dans le projet de réforme des retraites en France ont mis en lumière la perte d’attractivité du travail pour de nombreux salariés. Différents facteurs expliquent cette insatisfaction : faible rémunération, perte de sens, pénibilité, cadences excessives, fragmentation des métiers, injustice sociale, manque de reconnaissance. Ce à quoi aspirent les salariés, c’est exercer un travail qui a du sens, avoir les moyens et le temps de le pratiquer et être reconnus comme des professionnels compétents.
Il est rare que les salariés puissent trouver dans la description de leur métier ou de leur poste de travail une indication sur son utilité sociale. Ils y trouvent essentiellement des listes de compétences. Comment devenir un « pro » si rien n’est dit sur la façon de traiter les situations de travail ?
Dans de nombreuses entreprises ou organisations, on assiste à un accroissement des procédures à appliquer. Si certaines sont à l’évidence nécessaires et ont permis de progresser (gains en qualité et sécurité, réduction de l’incertitude, gain de temps…), leur multiplication à outrance et leur lourdeur reviennent à envoyer aux salariés un message de défiance. « Ce que je fais, ce n’est plus un métier ! », s’exclament, surchargés et découragés, de nombreux salariés.
Pouvoir intervenir comme un professionnel compétent, c’est avoir les marges de manœuvre nécessaires pour adapter ou inventer ses propres façons de décider et d’agir en fonction de la spécificité des situations et contextes rencontrés. Les procédures ne peuvent se substituer à la capacité de compréhension et d’interprétation d’une situation. Suffirait-il qu’une infirmière « colle » aux détails d’une procédure pour qu’elle puisse être reconnue comme compétente ? Face à l’imprévu et à l’inédit, il faut savoir prendre les bonnes initiatives. Le management et l’organisation du travail ne doivent-ils pas réunir les conditions nécessaires pour que les salariés puissent mettre en œuvre leurs compétences ?
Façons d’agir personnelles
Les salariés souhaitent en conséquence des modalités d’évaluation qui ne se limitent pas à mesurer des écarts par rapport à des normes, mais qui estiment et fassent reconnaître la pertinence de leurs initiatives et de leurs façons personnelles d’agir.
Lorsqu’ils consultent le contenu de leurs postes de travail, les salariés n’y trouvent qu’une description effectuée selon la seule logique de la division du travail et ne prenant pas en compte les relations de coopération qui leur seraient pourtant nécessaires pour réaliser leurs activités professionnelles. Il en résulte pour eux un isolement croissant face à la complexité des situations à traiter, aux aléas à gérer, aux exigences d’innovation à prendre en compte. Un salarié peut de moins en moins être compétent tout seul. Il doit pouvoir faire appel à la compétence d’autres professionnels. S’il ne peut y avoir de compétence collective sans compétences individuelles, il ne peut y avoir de compétences individuelles sans compétence collective.
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On a beaucoup dit et entendu que la critique suscitée par la réforme des retraites était révélatrice d’un nouveau rapport des Français au travail. Ce que l’on a moins dit est que ce nouveau rapport au travail fragilise en premier lieu les entreprises. Les mutations qui sont actuellement à l’œuvre dans le rapport au travail risquent de les déstabiliser à au moins trois niveaux.
D’abord, l’essor du télétravail semble coïncider avec une mise à distance affective à l’égard de l’entreprise. Comme si l’éloignement (et le retour sur soi et la solitude qu’il génère) entraînait une forme de désengagement qui ne peut pas rester durablement sans conséquences sur la motivation des travailleurs, et donc sur la performance des entreprises.
Ensuite, la montée de l’individualisme au travail commence à se traduire par un délitement de la dimension collective du travail et par un affaiblissement du sentiment d’appartenance des salariés à l’entreprise, ce qui rend de plus en plus complexe la tâche des responsables des ressources humaines qui peinent souvent à fidéliser les talents.
Une alternative crédible et désirable
Enfin, l’engouement pour le travail dit « indépendant » (travail de plate-forme, microentreprise, travail en freelance, etc.) pourrait finir par affaiblir la place centrale qu’occupent les entreprises aussi bien comme modèles d’organisation du travail, comme moteurs de l’activité économique et comme piliers du système de protection sociale.
Non pas que le salariat soit aujourd’hui directement menacé – il représente encore la modalité de travail de 80 % des actifs en France –, mais le statut d’indépendant, considéré comme plus libre, plus souple et moins contraignant, constitue pour un nombre grandissant de travailleurs une alternative crédible et désirable au travail en entreprise. La question qui se pose donc à ce jour est celle-ci : l’entreprise peut-elle redevenir le lieu d’un travail en commun efficace et motivant ?
Réfléchir à cela suppose que les dirigeants et les manageurs d’entreprise reconnaissent qu’ils ont eux-mêmes contribué, depuis des décennies, à affaiblir leur modèle d’organisation en établissant des rapports de plus en plus individualisés au travail (parcours, carrières, relations, modes de reconnaissance, organisation du travail), et que les réponses qu’ils tentent d’apporter aux nouvelles exigences des employés depuis les bouleversements liés à la crise du Covid-19 pourraient renforcer ce mouvement au lieu d’y remédier.
Une approche clientéliste
En effet, en développant des réflexions autour des notions de bien-être ou de qualité de vie personnelle au travail, ils risquent de contribuer à instaurer une approche clientéliste de la part des salariés qui attendent de plus en plus de leurs employeurs qu’ils leur proposent des « services » adaptés à leurs « besoins » personnels.
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La décision est tombée vendredi 17 mars. Malgré les réquisitions du procureur, le tribunal de commerce de Nouméa a officialisé la liquidation judiciaire du groupe Melchior, auquel appartient le seul quotidien de Nouvelle-Calédonie, Les Nouvelles calédoniennes.
Le groupe Melchior, qui employait près de cent vingt personnes, avait racheté le quotidien en 2013 au groupe Hersant, sans jamais parvenir à trouver le bon équilibre. Les Nouvelles calédoniennes, fondées en 1971, sont parues pour la dernière fois jeudi, faute de repreneur.
Ce nouvel épisode judiciaire est le dernier d’un long naufrage pour Les Nouvelles calédoniennes, qui avait déjà vu son édition papier disparaître au début du mois de janvier au profit d’une version entièrement numérique. Une métamorphose qui avait entraîné la fermeture de l’imprimeur Pacifique Rotative, appartenant au groupe Melchior, et le licenciement de dix-sept personnes.
« Un désastre social et une attaque contre le pluralisme »
« Le délibéré a confirmé l’arrêt du plan de sauvegarde et la mise en liquidation du groupe. Les salaires du mois de mars seront versés, mais à part ça, nous ne sommes sûrs de rien, nous n’avons aucune assurance pour la suite », a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) Baptiste Gouret, journaliste des Nouvelles calédoniennes et représentant du personnel pour le plan de sauvegarde et la liquidation. La trentaine de salariés présents au tribunal pour entendre la décision ont déploré l’absence de la direction à cette audience.
Jeudi, le procureur Yves Dupas avait demandé que soit privilégié un plan de redressement avec une poursuite d’activité. « C’est le seul quotidien de l’île. C’est important à une période de l’histoire très sensible et alors que les discussions sur l’avenir institutionnel sont ouvertes. Il y a un enjeu stratégique à préserver cet outil de la liberté d’expression, et je tenais à avoir une approche plus sage. Les actionnaires avaient obtenu un plan de sauvegarde il y a seulement quelques mois », avait expliqué Yves Dupas à l’AFP.
Le Syndicat national des journalistes (SNJ) a déploré cette fermeture, y voyant « un désastre social et une attaque contre le pluralisme », et en a appelé à la ministre de la culture, Rima Abdul-Malak, vendredi, dans un communiqué.
Le sujet central de la réforme des retraites est en fait celui du travail. Les mobilisations et les sondages montrent que la très grande majorité des actifs est contre l’idée de devoir travailler deux ans de plus. Car le travail est devenu de plus en plus dur, intense, en perte de sens pour la plupart des salariés. Cette dégradation du rapport au travail est directement liée aux politiques économiques et aux stratégies des entreprises françaises visant à lutter contre le coût du travail.
L’ensemble de ces stratégies repose sur une idée martelée en France depuis les années 1980 : le chômage et la faible compétitivité des entreprises françaises sont dus à un coût du travail trop élevé, notamment du fait d’un Etat-providence lui-même trop coûteux, les cotisations sociales qui le financent représentant près de la moitié de la masse salariale. Pourtant, avec des coûts du travail équivalents ou supérieurs, les Allemands ou les Suédois, parce qu’ils ont su investir dans la qualification et la qualité des emplois, arrivent à produire et exporter des produits et services de meilleure qualité ou plus innovants, qu’ils vendent donc plus chers que les nôtres.
Le manque de compétitivité de l’économie française est surtout lié à son positionnement en milieu de gamme : nous sommes trop chers pour ce que nous produisons. Mais plutôt que chercher à améliorer la qualité de nos productions, à monter en gamme, la France a préféré produire la même chose avec moins de monde, en faisant la chasse aux coûts et en intensifiant le travail.
Depuis le début des années 1980 fleurissent les articles d’économistes et les rapports soulignant le poids trop élevé du coût du travail. En 1987, le patronat lance « la bataille des charges », pour dénoncer le poids trop élevé des cotisations sociales, expliquant par là les réticences à embaucher et la faible compétitivité des entreprises françaises. C’est en 1993 que commencent à la fois la litanie des réformes des retraites, mais aussi des plans généraux de baisse des cotisations sociales.
Efficacité faible
Edouard Balladur, alors premier ministre, veut limiter l’augmentation prévisible des retraites avec sa réforme de juillet 1993, et réduire le coût du travail pour les entreprises avec, en décembre 1993, la « Loi quinquennale relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle », dont la mesure principale est la réduction d’une partie des cotisations sociales patronales sur les bas salaires (entre 1 et 1,2 smic).
Depuis lors, la baisse du coût du travail est devenue la pierre angulaire des politiques économiques françaises, aussi bien pour réduire le chômage que pour accroître la compétitivité des entreprises. Des mesures Juppé à celles liées aux 35 heures, des allègements Fillon au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, devenu en 2016 une baisse pérenne, les allègements ont été progressivement étendus à la fois à plus de cotisations sociales (quasiment toutes au niveau du smic, où il ne reste plus que les cotisations retraites complémentaires et chômage), et à plus de salariés, jusqu’à concerner désormais 3,5 smic. En 2021, le montant total des exonérations a atteint 73,8 milliards d’euros : la France est devenue la championne européenne des aides aux entreprises.
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En 1910, l’une des premières lois visant à instaurer des retraites est qualifiée par la CGT de « mesure pour les morts » : à cette époque, 94 % des travailleurs n’atteignent pas 65 ans. Mieux vaut donc réclamer la journée de huit heures… C’est pourquoi, plutôt que de parler de retraite, Paul Lafargue, dès 1880, revendique Le Droit à la paresse, superbe boutade pour mieux promouvoir une baisse drastique de la durée quotidienne du labeur.
Si l’on associe souvent longueur des journées, pénibilité et continuité du labeur jusqu’à la mort avec l’industrialisation du XIXe siècle, les journées de travail sont très longues depuis bien plus longtemps, à la ville comme à la campagne. Les grandes manufactures textiles du XVIIe siècle se coulent dans des horaires déjà éprouvés deux à trois siècles plus tôt : de treize à quatorze heures de travail par jour ouvrable, avec des normes de productivité exigeantes. Quand les ouvriers ne peuvent plus y satisfaire, ils sont déclassés vers des besognes moins dures mais moins rétribuées. La famille et les institutions charitables sont les seuls recours quand leurs forces les abandonnent. Point de retraite, si ce n’est pour les vieux soldats ou certains serviteurs âgés de l’Etat.
L’industrialisation ne fait que grossir les effectifs de travailleurs soumis à de tels rythmes. C’est à 40 ans pour les hommes et 35 ans pour les femmes que l’on gagne le mieux sa vie dans les filatures de coton vers 1890. Ensuite, plus on vieillit, moins on est rémunéré. La durée quotidienne du travail reste de douze heures effectives dans les industries depuis le décret du 9 septembre 1848, et cela environ deux cent quatre-vingts à deux cent quatre-vingt-dix jours par an. Ce décret est un des premiers signes, timide, d’une intervention de l’Etat dans les questions sociales.
Mais entre fraude, exceptions légales et secteurs ignorés par la loi, on trouve toujours vers 1880 des ouvriers qui atteignent des maxima analogues à ceux du début du siècle ou de l’Europe préindustrielle, soit 3 400 à 3 700 heures annuelles – contre 1 500 aujourd’hui ! Certes, beaucoup ne travaillent que par intermittence. Mais quand la besogne presse, ils ne comptent plus leurs heures. Le raisonnement par moyennes trouve ici ses limites.
Vision tripartite de la vie
D’autant que la définition des horaires n’est rien sans l’analyse des contenus du travail. L’intensification des gestes n’a pas attendu l’industrialisation : la machine dicte son rythme, les cadences croissent au fil des progrès techniques et obligent à des efforts accrus. Laboratoire de la modernité, la filature, par exemple, exige une mobilisation plus intense des corps et de l’attention. L’intensification concerne également des secteurs peu touchés par la révolution mécanicienne. A la mine, dans le bâtiment, dans les industries du feu, les modes de rémunération (tâcheronnage et marchandage) sont faits pour mettre les ouvriers en concurrence, tandis que la diffusion, à partir des années 1870-1880, du petit matériel (les machines à coudre, par exemple) fait du travail domestique à la tâche le pendant harassant de l’usine. La peine au labeur est ainsi parfois bien plus grande à la fin du XIXe siècle qu’à son début.
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