Un manageur sur deux se dit angoissé au travail
Qui veut encore grimper dans la hiérarchie de son entreprise ? Un tiers des non-manageurs envisagent de le devenir, et seulement un quart des femmes, tandis qu’un Français sur deux estime que la fonction managériale est plus difficile à exercer aujourd’hui que par le passé. C’est ce que révèle le baromètre réalisé par Harris Interactive pour la start-up Alan, spécialisée dans les mutuelles pour les entreprises, et publié jeudi 20 avril.
Cette étude annuelle évaluant le niveau de « bien-être mental » au travail et les attentes des actifs, a sondé un échantillon de 4 054 personnes représentatif des Français âgés de 18 ans et plus, du 21 février au 3 mars 2023 ; 64 % d’entre eux occupent une fonction de manageur.
« Les manageurs de proximité sont en première ligne pour morfler en permanence. » Le juriste Jean-Emmanuel Ray, professeur à l’université Paris I-Panthéon Sorbonne, a introduit les débats qui ont accompagné la présentation de l’étude, en insistant sur l’inadéquation entre le lien de subordination propre au contrat de travail, et la réalité des entreprises, où les salariés revendiquent plus d’autonomie. « Avant la verticalité était naturelle, dans la société et l’entreprise. Avec le télétravail ou le forfait jour, le manageur a beaucoup plus de travail », poursuit-il.
« Entre le marteau et l’enclume »
Il ressort des chiffres que les manageurs s’estiment toujours en première ligne depuis la pandémie, et semblent encore plus « entre le marteau et l’enclume » qu’auparavant. Un sur deux se dit angoissé, contre 35 % des non-encadrants ; 68 % d’entre eux se déclarent actuellement stressés, contre 52 % des autres salariés.
« C’est une fonction plus difficile à exercer que par le passé, car les modes d’organisation et rapports au travail ont changé, et ils ont du mal à tout concilier. Les collaborateurs veulent des rapports plus individualisés, a expliqué Magalie Gérard, directrice adjointe du département Politique Opinion d’Harris Interactive. Mais les manageurs ne sont pas suffisamment soutenus par leur direction et RH [ressource humaine], les exigences de performance ne baissent pas, et ils se sentent à 41 % isolés dans leur fonction. »
« Les jeunes de mon master ont des maîtres d’apprentissage, et ils me disent que ces derniers sont épuisés, qu’ils n’ont pas le temps, a renchéri M. Ray. Comment pourrais-je avoir envie d’être manageur ? Sans compter les risques pénaux dans une société qui se juridicise et se judiciarise, les risques de harcèlement moral. Si on veut être un manageur crédible, il faut en plus connaître le droit du travail. »
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