« Rendre le travail plus soutenable pendant la carrière est un chemin exigeant, mais plus prometteur que de taper sur les chômeurs »
Il y a au moins une chose que l’on ne peut pas reprocher au président de la République, c’est de manquer de suite dans les idées. Tout le monde garde en mémoire son conseil à un horticulteur au chômage, selon lequel il suffit de traverser la rue pour trouver du travail, prélude à un durcissement des conditions d’entrée dans le dispositif d’indemnisation du chômage.
Après sa remarque du 14 juillet à l’encontre de ceux qui préfèrent « profiter de la solidarité nationale pour réfléchir à leur vie », un nouveau tour de vis sur l’assurance-chômage est clairement annoncé. « Il faut aller plus loin », assume le chef de l’Etat. Pour Emmanuel Macron, il s’agit d’appliquer le principe des vases communicants : il y a trop de chômeurs qui coûtent cher à la collectivité d’un côté, et trop d’emplois non pourvus de l’autre ; en compliquant la vie des chômeurs, on les pousse vers l’emploi.
Ce raisonnement simpliste ne résiste pas à l’examen des données disponibles. La direction de l’animation de la recherche et des études et des statistiques (Dares) du ministère du travail montre ainsi que les difficultés de recrutement sont liées, entre autres, aux mauvaises conditions de travail dans les secteurs en tension (« Quelles sont les conditions de travail qui contribuent le plus aux difficultés de recrutement dans le secteur privé ? », Analyses n° 26, Dares, juin 2022).
Des conditions difficiles de travail et des faibles salaires
« Les employeurs qui signalent que leurs salariés sont exposés à des conditions de travail difficiles sont plus nombreux (85 %) à connaître des difficultés de recrutement. Les horaires atypiques ou imprévisibles ainsi que la difficulté à pouvoir faire un travail de qualité sont parmi les expositions professionnelles les plus associées aux difficultés de recrutement », peut-on y lire. Les secteurs les plus concernés sont les industries agricoles et alimentaires, les hôtels-cafés-restaurants, les transports, la santé et l’action sociale.
Cet état de fait est récurrent. Dans une étude datée d’octobre 2021, la Dares signalait que les tensions de recrutement sur certains métiers s’expliquaient par des conditions de travail peu attractives, notamment pour les aides à domicile, les conducteurs routiers, les ouvriers non qualifiés de l’industrie, certains ouvriers qualifiés de l’industrie et du bâtiment ou les serveurs.
Pour d’autres métiers, de mauvaises conditions de travail conjuguées à une pénurie de main-d’œuvre contribuent aux tensions. C’est le cas pour les métiers de bouche (cuisiniers, bouchers, boulangers) ou encore les aides-soignantes. L’étude concluait : « L’apaisement des difficultés de recrutement (et la baisse du chômage) pourrait donc aussi passer par l’amélioration des conditions de travail et/ou la revalorisation des salaires dans certains métiers » (« Quelle relation entre difficultés de recrutement et taux de chômage ? »).
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