Otis-France lourdement condamné pour discrimination syndicale
L’ascensoriste devra payer un peu plus de 770 000 euros de dommages et intérêts pour avoir entravé l’évolution de carrière de douze salariés membres de la CGT.
Article réservé aux abonnés
Un nom vient de s’ajouter à la liste des entreprises condamnées pour discrimination syndicale : celui d’Otis-France. Mercredi 25 septembre, l’ascensoriste a été sommé, par la cour d’appel de Versailles, de payer un peu plus de 770 000 euros de dommages et intérêts pour avoir entravé le déroulement de carrière de douze de ses salariés, encartés à la CGT. Une addition très salée à laquelle vont s’ajouter des rappels de salaires et de primes, non chiffrés dans les décisions rendues par la juridiction. Sans constituer un record, les sommes allouées offrent « un très bon niveau de réparation » dans un dossier où la discrimination présente un « caractère systémique », commente Me Emmanuelle Boussard-Verrecchia, l’une des avocates des syndicalistes.
La plupart des victimes travaillent ou ont travaillé comme agent de maintenance, dans différentes agences de l’entreprise disséminées sur le territoire. Toutes ont commencé à avoir des ennuis avec leur hiérarchie, peu après avoir été désignées déléguées syndicales ou élues dans les instances représentatives du personnel (IRP). Les difficultés ont pris des formes multiples et durables. Problème numéro un : leur rémunération. Non seulement elle a peu progressé mais elle a aussi évolué beaucoup moins vite que celle de leurs collègues ayant un profil comparable. La cour d’appel évoque notamment le cas de Jean-José J., qui « établit être resté au coefficient 190 », de son recrutement en 1993 au mois de juin 2018. Parallèlement, six autres salariés, « dont l’année, l’emploi et le coefficient d’embauche sont similaires », avaient atteint, dès 2010, un coefficient oscillant entre 240 et 305. Une différence de traitement que l’employeur a, aux yeux de la cour d’appel, été incapable d’expliquer de façon convaincante.
Autre grief adressé à Otis : les douze cégétistes se sont, bien souvent, vu proposer des formations en moins grand nombre que les autres membres du personnel. Ils ont par ailleurs essuyé des réflexions désobligeantes de la part de leur chef, certains allant même jusqu’à dénoncer des « intimidations » et des manœuvres de « déstabilisation ». En pleine réunion du comité d’entreprise, l’un d’eux a été traité de « perturbateur » avant d’être interpellé en ces termes : « Nous ne sommes pas à Moscou (…). » A maintes reprises, on leur a reproché de consacrer beaucoup de temps à leurs fonctions syndicales et de négliger l’activité pour laquelle Otis les avait enrôlés. Deux d’entre eux ont été « privés de leurs voitures de service, au profit de motocyclettes », sans que cette décision apparaisse justifiée, rapporte la cour. Un autre a fait l’objet d’une procédure de licenciement, finalement annulée par le ministère du travail, et il a, du même coup, été réintégré.