« Nous appelons à des Etats généraux sur la promotion de la santé et du bien-être au travail et en faire une grande cause nationale »
Tribune. La crise sanitaire, économique et sociétale qui perdure depuis mars 2020 a considérablement augmenté les manifestations anxieuses et dépressives chez les Français, liées à la fois à leur crainte d’une contamination virale mais également aux menaces sur leur emploi et aux restrictions sur leur mode de vie liées aux confinements et couvre-feux successifs.
L’enquête CoviPrev de Santé publique France a révélé un doublement du taux d’anxiété, à 33 %, et la prévalence d’états dépressifs pouvant atteindre 27,7 % dans certaines régions, ce qui est très élevé. Pour les travailleurs s’y ajoute un accroissement des risques psychosociaux (RPS) dû à une accélération de la numérisation du travail, et en particulier du télétravail (Le numérique et la sécurité et la santé au travail, programme de recherche de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail).
Une plus forte charge cognitive, un effacement des frontières entre vie professionnelle et vie personnelle, un isolement social et un effondrement des collectifs de travail sont autant de sources qui ont accentué la souffrance. Dans une enquête menée en novembre 2020 par Malakoff Humanis, 70 % des télétravailleurs disent que le principal risque pour leur santé est le risque psychologique.
Des contreparties pas suffisantes
Ces constats préoccupants convergent avec ceux qui nous reviennent par nos réseaux professionnels respectifs de DRH, de syndicalistes, de spécialistes de la santé mentale. Les restructurations et les changements organisationnels du travail et le climat d’incertitude sur l’avenir professionnel qui ont accompagné cette crise ont eu aussi un impact non négligeable sur la santé mentale et le bien-être au travail.
Des contreparties existent, comme la réduction du temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail qui a réduit le niveau de stress et de fatigue des télétravailleurs, mais elles sont loin de compenser les souffrances vécues dans un contexte anxiogène rarement atteint.
Depuis une quinzaine d’années, et essentiellement à la suite d’événements dramatiques (suicides au travail, développement des cas de burn-out d’origine professionnelle…), la France a pris conscience des enjeux de la prévention des risques psychosociaux (RPS), non seulement pour la santé des salariés, mais aussi pour la performance économique des entreprises.
La France dans le peloton de queue des pays de l’UE
Les Accords nationaux interprofessionnels (ANI) qui se sont succédé sur le stress au travail en 2008, le harcèlement moral et les violences en 2010, la qualité de vie au travail en 2013 et la santé au travail en 2020 montrent la préoccupation renouvelée des partenaires sociaux sur ces questions. Le vote d’une loi sur la santé au travail à l’Assemblée nationale le 17 février 2021 va aussi dans ce sens.
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