Les « slasheurs », par défaut ou par choix, cherchent leur voie dans un contexte de crise
Slasheur.se : personne qui cumule plusieurs emplois en même temps, par choix ou par obligation. L’anglicisme, qui vient de la barre oblique de ponctuation « /», a fait son entrée dans l’édition 2020 du petit Larousse illustré. Certains lui préfèrent les termes de « pluriactifs » ou « multipotentiels ». Quoi qu’il en soit, le mot dénote d’un nouveau rapport au travail, qui s’est fortement développé au cours des dernières années, sur fond de quête de sens et d’aspiration à une forme d’autonomie.
Mais ces « pluriactifs » ne se retrouvent-ils pas particulièrement vulnérables en cette période de récession, où ils peuvent facilement jouer le rôle de variable d’ajustement pour leurs différents employeurs ? « La crise va toucher tous les types d’emplois. De plus, beaucoup de ces pluriactifs travaillent dans des domaines particulièrement touchés par la baisse d’activité, comme la culture ou le tourisme », estime Christine Fournier, chargée d’études au Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Cereq). Mais avoir plusieurs activités dans différents secteurs peut aussi « permettre de davantage rebondir », estime Marielle Barbe, autrice de « Profession Slasheurs » (Marabout, 2017).
L’art de cumuler aussi les statuts
Le salon SME, dédié aux microentrepreneurs, évaluait à 4 millions le nombre de pluriactifs en France, selon un sondage de 2016. D’après cette enquête, 77 % des personnes interrogées exercent un second métier dans un secteur différent de leur activité principale. Cumuler les activités est un choix pour plus des deux tiers d’entre eux. Les motivations sont variées : 73 % « cumulent » pour augmenter leurs revenus, et 27 % pour alimenter leur passion. Si certains sont microentrepreneurs (l’autoentrepreneuriat, créé en 2009, a favorisé l’émergence des « slasheurs »), d’autres sont passés maîtres dans l’art de cumuler aussi les statuts (salarié, auteur, entrepreneur, intermittent…)
Situation subie ou choisie, parfois un peu des deux, ces diplômés pluriactifs tentent de trouver leur voie dans cette période mouvementée. « Les slasheurs qui vivent bien leur situation sont la partie émergée de l’iceberg des pluriactifs, note Christine Fournier, qui est en train de réaliser une étude sur « l’emploi éclaté ». La plupart accusent le coup, d’autant plus qu’ils disposent souvent d’une faible protection sociale.
« Mes différents emplois sont comme un jeu de cartes. Je peux les jouer différemment selon les contextes », explique Stéphanie Schoene, tatoueuse, graphiste, consultante…
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